Les gilets jaunes se mobilisent contre Macron pour marquer le Nouvel an

Pour le réveillon du Nouvel an, des «gilets jaunes» à travers la France ont manifesté leur opposition à Macron et leur détermination à continuer leur mouvement. Des reporters du WSWS ont interviewé des «gilets jaunes» qui manifestaient sur les Champs Elysées à Paris, entourés par un lourd dispositif de police.

Les interviews témoignent des questions politiques auxquelles réfléchissent des manifestants en lutte contre Macron. Les «gilets jaunes» ont exprimé leur conscience grandissante du caractère international et ouvrier de leurs revendications, et leur opposition aux inégalités, aux guerres et à la classe politique actuelle.

Des «gilets jaunes» sur les Champs-Elysées

Le WSWS a parlé à Pascal, qui a expliqué: «Ça fait 7 semaines qu’on manifeste pacifiquement. … Aujourd’hui le Français qui travaille, il n’arrive pas à s’en sortir.»

Il s’est déclaré favorable à une lutte internationale: «Moi, je suis travailleur en service, simple ouvrier, donc absolument c’est ce qu’il faudrait. … Les Belges bloquaient déjà les raffineries avant nous, le 17 novembre. Il faut être solidaire les uns des autres, pourquoi la France serait-elle plus importante que les autres pays? On est 27 dans l’Union européenne, il faut que tous les pays se mobilisent avec nous, sinon ça ne sert à rien.»

Par contre, il a expliqué que les appareils syndicaux et les partis qui y sont liés n’agiraient pas dans ce sens: «Franchement, on est parti dès la première manifestation le 17 novembre, et on n’a vu aucun syndicat. … Les syndicats sont là de leur côté. Ils ne sont jamais venus avec les gilets jaunes.» Il a ajouté, «Ils ne jouent pas dans la même cour que nous. ... On devrait être dans le même sac, si je puis dire. On devrait tous être à la rue ensemble, routiers, les pêcheurs, n’importe qui.»

Alexandre, Virginie, Christian et André avec deux «gilets jaunes» masqués

Le WSWS a aussi interviewé quatre travailleurs «gilets jaunes» qui évoqué leur colère contre les conditions de travail des jeunes. André a dit: «Même en travaillant, on n’arrive même pas au milieu du mois. Financièrement, ça ne va pas. On reçoit notre salaire, tout est prelevé et il ne nous reste plus rien pour vivre. On est des travailleurs pauvres. Vous vous imaginez, je travaille et je suis obligé d’aller dans les Restos du coeur. Je ne trouve pas cela normal.»

Alexandre a ajouté, «Les gens travaillent 40 ou 45 heures par semaine au black parce qu’on n’a pas le choix. On touche une misère et on est traité comme des bons à rien, des sous-fifres.»

Virginie a dit, «Je suis maman d’un petit garçon qui a quatre ans. Je cumule deux boulots, 40 heures par semaine pour mes 200 euros. Et au 15 du mois je n’ai plus rien. J’ai à peu près 1000 euros de prélevés, entre mon loyer et les factures EDF, l’eau, la nounou parce que j’ai des horaires pas faciles il faut que je fasse garder mon enfant, et voilà. Tous les frais pour vivre partent au début du mois et le 15 je n’ai plus rien, je survis avec un peu d’aide de la CAF.»

Elle a ajouté que les «gilets jaunes» ne se contenteraient pas des promesses par Macron d’accorder une petite hausse du SMIC: «Ce sont des miettes. … Pour la soi-disant augmentation du SMIC, ce n’est pas le SMIC horaire qui augmente, c’est la prime d’activité est gérée par la CAF. Puis la CAF a dit, non, non, on ne pourra pas faire cela tout de suite, il va falloir attendre le mois de juin.»

Ils se sont dits solidaires des grèves et des manifestations à travers le monde qui font écho aux «gilets jaunes.» Virginie a dit, «Il faut être solidaire, parce qu’en partant un peu loin, c’est la société actuelle qui fait que nous, ceux qui ne sommes rien, comme a dit M. Macron, c’est nous qui galérons le plus. Et pour tous les pays c’est la même chose. Les pauvres sont beaucoup plus nombreux que les riches. La richesse est trop centralisée entre les mains d’un trop petit nombre de personnes.»

André a ajouté, «Je voudrais remercier les autres pays qui ont suivi le mouvement, parce qu’au moins ça fait bouger les choses.»

Christian a souligné son opposition aux guerres impérialistes et appelé à un profond changement dans la vie politique. Il a dit, «Pourquoi y aurait-il des guerres dans le monde si ce n’est pour des intérêts financiers? Je connais des soldats, ils disent, ‘On va tuer des gens pour quelque chose. Je ne sais même pas pourquoi je vais tuer ces gens mais au final on me dit de le faire.’ Je trouve ça aberrant que cette personne-là doive aller tuer des gens pour des intérêts financiers. On veut un monde en paix où les gens peuvent s’en sortir de la misère, de cet engrenage.»

Comme la quasi-totalité des «gilets jaunes», ils a souligné sa désillusion avec les syndicats en tant qu’organisations qui prétendent défendre les intérêts ouvriers.

Il a dit, «On est pour une refonte de la politique et une mise à plat des syndicats, pour qu’ils soient maintenant comme ils étaient disons il y a 100 ans, je n’étais pas né. Ils soutenaient le peuple et ils allaient avec le peuple, pas contre le peuple pour leurs propres intérêts. On a eu l’exemple d’un syndicat de routiers qui avait appelé à la grève avec nous, un lundi, et qui le vendredi même reçoit une réponse du président sur des aides versées directement au syndicat. Puis les routiers n’ont pas fait grève suite à ça.»

Magalie

Le WSWS a également interviewé Magalie, de Corse, qui était responsable d’une équipe de maintenance et de transport avant d’être déclarée invalide. Elle a dit, «C’est ma 5e manifestation. Comme tout le monde, il y a un ras-le-bol. Je suis invalide, je touche une persion d’invalidité de 780 euros, et 400 euros d’ASS. J’ai très bien gagné ma vie avant de subir mon invalidité. Aujourd’hui, je n’ai rien.»

Elle a expliqué, «J’ai un gros problème cervical, et on m’a déclarée inapte au travail. Cela a commencé par ça, puis les problèmes de santé s’accumulent, et la Sécurité sociale s’en bat les cacahuètes. Ils restent bloqués sur la première invalidité, rien de plus. J’ai mes radios, j’ai la hanche droite toute fissurée. Je prends rendezvous avec la Sécurité sociale pour que la prise en charge soit supérieure, on me demande de travailler un tiers de temps, ce qui n’est pas facile quand on est à 30 bornes d’une première ville. Donc voilà, je vais crever comme ça.»

Tout en se disant très fière de la performance de son équipe, elle a ajouté: «Il n’y pas d’aides pour les petites entreprises. Les microentreprises ferment après un an, parce qu’il n’y a pas d’autre moyen.»

Interrogé sur le rôle des syndicats, elle a répondu: «Vous rigolez? Les syndicats, c’est une grosse blague. … Les syndicats ont été bons avant guerre, après guerre. C’est grâce à eux certainement en grande partie qu’on a eu les congés payés, plein de choses. Mais c’était en quelle année? Aujourd’hui la CGT a des bâtiments, il faut voir. Ils font quoi là-dedans? Je n’ai pas besoin d’eux, ils ne m’ont rien apporté et ils ne m’apporteront rien aujourd’hui.»

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