Perspectives

Les démocrates choisissent Biden comme candidat dans une débauche de réaction

La Convention nationale démocrate s’est conclue jeudi soir par l’acceptation officielle de la nomination présidentielle du parti par l’ancien vice-président Joe Biden, au terme d’une dernière séance de deux heures remplie de clichés vides, de rhétorique inepte et d’insincérité nauséabonde.

L’atmosphère qui régnait jeudi était plus celle d’une cérémonie religieuse que d’un événement politique. On a mis l’accent sans cesse sur la supériorité morale personnelle de Biden par rapport à Trump. On a assisté aux témoignages de plus en plus larmoyants sur la prétendue profonde préoccupation de Biden pour les enfants, les opprimés et pratiquement tous ceux qui ont croisé son chemin. Un ancien fonctionnaire de la Maison-Blanche a fait référence au «don d’empathie» de Biden, une expression qui rappelle la remarque sarcastique: «Sincérité – si on peut la simuler, l’affaire est dans le sac.»

Le mépris pour l’intelligence du public a été résumé dans le discours d’acceptation de Biden. Ses rédacteurs semblent avoir essayé de condenser toutes les banalités possibles en un seul discours de 20 minutes.

Il a cité une liste de promesses, du changement climatique au racisme en passant par la dette étudiante, que le Parti démocrate n’a pas la moindre intention de tenir. Seules deux phrases avaient une réelle signification.

Biden a rassuré Wall Street et les milliardaires: «Je ne cherche pas à punir qui que ce soit». Cela a envoyé un message à l’aristocratie financière que si le candidat était obligé de lancer des attaques démagogiques contre les riches à des fins électorales, elles n’auraient pas de conséquences durables. «Rien ne changera» pour les super-riches, a-t-il déclaré lors d’une collecte de fonds à Wall Street l’année dernière, et cette promesse sera tenue.

Et l’ancien vice-président a dénoncé Trump pour avoir été trop complaisant avec la Russie. Il a menacé de tenir Vladimir Poutine responsable d’avoir prétendument payé des primes aux combattants talibans qui ont attaqué les troupes américaines en Afghanistan. Cette histoire bidon n’est que la dernière invention du New York Times dans sa campagne de quatre ans qui vise à provoquer une guerre des États-Unis contre la Russie.

Ce qui a donné le ton à la dernière journée de la convention, c’est un rapport publié jeudi après-midi selon lequel un groupe de 73 anciens responsables de la sécurité nationale de quatre gouvernements républicains soutenaient Biden et dénonçaient Trump dans une lettre ouverte qu’on va bientôt publier dans le Wall Street Journal. La liste comprend une série de militaristes et agents du renseignement qui sont responsables de la mort de millions de personnes en Amérique latine, en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie centrale.

Parmi les éléments les plus éminents et les plus susceptibles de poursuites pour crimes de guerre qui soutiennent Biden, on retrouve:

* John Negroponte, avec un bilan sanglant depuis la guerre contre le terrorisme au Nicaragua jusqu’à l’occupation de l’Irak dans les années 2000;

* Colin Powell, président de l’état-major interarmées pendant la guerre du Golfe persique en 1991, et secrétaire d’État pendant la guerre d’Irak en 2003, où il a joué un rôle central dans la justification d’une guerre basée sur des mensonges;

* Michael Hayden, ancien directeur de l’Agence de sécurité nationale et plus tard directeur de la CIA, qui a supervisé les programmes de torture de la CIA et d’espionnage interne;

* Robert Blackwill, directeur adjoint du Conseil national de sécurité, responsable de la politique de guerre en Irak en 2003-2004;

* Michael Leiter, directeur du Centre national de lutte contre le terrorisme sous Bush fils; et

* William Webster, directeur du FBI sous Reagan et de la CIA sous Bush père.

Le soutien de ces anciens dirigeants de l’appareil militaire et du renseignement ne fait que souligner le véritable caractère du conflit entre les partis démocrate et républicain, les deux instruments politiques de l’élite dirigeante américaine.

Les démocrates s’opposent à Trump, non pas en raison de ses réductions d’impôts pour les milliardaires ou de ses attaques contre les droits démocratiques et les droits des immigrants et des réfugiés. Leurs différends portent plutôt sur la politique étrangère liée au Moyen-Orient et en particulier à la Russie. Un gouvernement Biden adopterait immédiatement une politique anti-russe encore plus provocante et agressive.

C’est ce qui a été souligné dans les différents segments du programme de la dernière journée qui a précédé le discours d’acceptation de Biden, avec des segments vidéo où s’exprimaient des vétérans de l’armée et des républicains. Le message proguerre le plus strident est venu de la sénatrice Tammy Duckworth, qui a dénoncé Trump comme le «lâche en chef» pour sa prétendue capitulation devant Poutine au sujet des primes aux talibans.

En ce qui concerne la politique intérieure, le plus proche collaborateur de Biden, son chef de cabinet au Sénat, Ted Kaufman, qui dirige également l’équipe de transition qui prépare le futur gouvernement Biden, a déclaré mercredi au Wall Street Journal que le déficit budgétaire fédéral croissant rendrait impossible la mise en place de programmes de dépenses ambitieux. «Quand nous serons entrés, le garde-manger sera vide», a déclaré Kaufman. «Quand vous verrez ce que Trump a fait au déficit… oubliez le COVID-19, tous les déficits qu’il a construits avec les incroyables réductions d’impôts. Nous allons donc être limités».

La référence à ce que «Trump a fait» est une fraude, puisque les démocrates et les républicains ont approuvé, à la quasi-unanimité, le renflouement de Wall Street en mars. La pandémie de coronavirus en raison des politiques de la classe dirigeante a produit une catastrophe sociale et économique pour la population américaine. Maintenant cette crise est utilisée de nouveau par l’élite dirigeante comme une occasion de piller le trésor public. Et, de nouveau, c’est la classe ouvrière qui sera obligée de payer.

Malgré les affirmations de Bernie Sanders selon lesquelles Biden pourrait devenir le président le plus progressiste depuis Franklin Roosevelt, la véritable orientation politique du futur gouvernement Biden a été signalée par l’apparition du milliardaire Michael Bloomberg, qui a prononcé le dernier discours avant que Biden lui-même ne soit présenté, condamnant Trump en tant que mauvais homme d’affaires et gestionnaire incompétent. Ce sont les milliardaires et l’appareil militaire et du renseignement, et non les charlatans politiques comme Sanders, qui mèneront la barque si les démocrates remportent la Maison-Blanche.

La semaine prochaine, ce sont les divagations d’ultra-droite du parti républicain et de la Maison-Blanche qui seront exposées. Le parti démocrate se fait passer pour l’ami des travailleurs tout en imposant le dictat de l’élite dirigeante; le parti républicain, sous la direction de Trump, travaille à développer un mouvement fasciste. Les deux partis sont les ennemis de la classe ouvrière, qui doit développer et construire une alternative révolutionnaire indépendante.

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