À la convention républicaine, Trump continue d’attaquer les normes démocratiques

Au deuxième jour de la convention nationale républicaine on a poursuivi la politique fasciste qui avait dominé la séance d’ouverture de lundi.

Cette convention marque l’évolution de l’un des deux grands partis du capitalisme américain vers un instrument pour développer un mouvement personnaliste et autoritaire au caractère de plus en plus fasciste, autour de la figure du «leader» Donald Trump. On y avait lancé lundi des appels ouverts au racisme et à la xénophobie, prétendument au nom de la défense de la «civilisation occidentale» contre la campagne supposément «socialiste» des Démocrates droitiers Joe Biden et Kamala Harris. Mardi, on y a rajouté des appels belligérants à l’affrontement avec Pékin et le Parti communiste chinois.

La convention s’est débarrassé des atours traditionnels de la démocratie, effaçant toute distinction entre la fonction de président et la campagne de réélection de Trump. Les Républicains ont même décidé de renoncer à la formalité de l’adoption d’une plate-forme à présenter à l’électorat, se contentant de déclarer leur «ferme soutien» à Trump.

On a fait défiler les membres de la famille Trump devant les caméras de télévision, qui rejoignent ainsi des dizaines d’autres non-entités dans un spectacle dégradant d’ignorance et de réaction politique. Lundi soir était apparu Donald Trump. Le lendemain, ce fut le tour de son frère et de sa sœur, Eric et Tiffany, ainsi que de la ‘First Lady’, Melania Trump.

Eric Trump, le fils du président, enregistre son discours pour le deuxième jour de la convention nationale républicaine depuis l’auditorium Andrew W. Mellon à Washington, le mardi 25 août 2020. (AP Photo/Andrew Harnik)

Trump a utilisé la Maison-Blanche comme toile de fond pour une vidéo qui le montrait en train de gracier un braqueur de banque condamné ainsi qu’une cérémonie séparée où il donne des papiers de naturalisation à un groupe d’immigrants. Il prévoit de prononcer son discours d’acceptation jeudi soir depuis la Maison-Blanche.

Le résultat d’ensemble est quelque chose ressemblant à un couronnement.

Le caractère raciste et antisémite des forces mobilisées par Trump et les Républicains a été souligné par le retrait de dernière minute mardi de la liste des orateurs de Mary Ann Mendoza, membre du conseil consultatif de la campagne Trump. Sa radiation faisait suite à un article du Daily Beast qui, plus tôt dans la journée, disait qu’elle avait retweeté et recommandé l’article d’un théoricien de la conspiration Qanon ; celui-ci citait les Protocoles des Sages de Sion et mettait en garde contre une conspiration dirigée par les Rothschild pour asservir et détruire tous les non-juifs.

Cela faisait suite à la participation lundi de Mark et Patricia McCloskey, les riches avocats sortis de leur manoir dans une communauté fermée de Saint Louis en juin pour pointer un fusil semi-automatique et un pistolet sur des jeunes gens défilant dans une manifestation pacifique contre la violence policière, devant la maison du maire dans la même communauté. Mark McCloskey a déclaré que lui et sa femme avaient agi pour défendre leur maison «alors qu’une plèbe de manifestants descendait sur notre quartier».

Dans un appel ouvert au racisme, sa femme a déclaré: «Ils ne se contentent pas de répandre la violence et le chaos dans nos communautés, ils veulent abolir complètement les banlieues, en mettant fin au zonage des maisons unifamiliales. Ce rezonage forcé amènerait la criminalité, l’anarchie et les appartements de mauvaise qualité dans des quartiers de banlieue désormais florissants… Alors, ne vous y trompez pas, peu importe où vous vivez, votre famille ne sera pas en sécurité dans l’Amérique des démocrates radicaux».

L’orateur vedette de mardi était le secrétaire d’État Mike Pompeo, dont les propos étaient préenregistrés lundi à la suite d’une réunion à Jérusalem avec le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu. L’intervention de Pompeo était une rupture avec un protocole de longue date de la politique américaine exigeant que le chef de la politique étrangère évite de s’impliquer dans des politiques partisanes. Elle s’inscrit dans la refonte du Parti républicain et dans le mouvement vers une dictature présidentielle basée sur l’armée, la police et les forces paramilitaires d’extrême droite.

Lors de sa rencontre avec Nétanyahou, Pompeo avait discuté de l’intensification des attaques conjointes des deux pays contre l’Iran et de la lutte contre l’influence croissante de la Chine dans la région. Après la réunion, Pompeo a déclaré qu’ils avaient discuté du «défi que le Parti communiste chinois représentait pour le monde entier».

Dans ses remarques, Pompeo a fait l’éloge de Trump pour avoir «tiré le rideau sur l’agression prédatrice du Parti communiste chinois». Il a répété le mensonge, devenu un mantra du gouvernement Trump, que la Chine était coupable d’une dissimulation qui a provoqué la propagation mondiale du coronavirus. Il a salué le retrait de Washington du traité FNI avec la Russie et l’armement de l’Ukraine; l’abandon de l’accord nucléaire avec l’Iran; les assassinats du leader de l’EI al-Baghdadi et du général iranien Soleimani; le transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem; et l’accord de paix conclu ce mois-ci entre Israël et les Émirats arabes unis, dirigé en premier lieu contre l’Iran.

Mardi matin, le secrétaire à la défense de Trump, Mark Esper, a publié une colonne dans le Wall Street Journal intitulée «Le Pentagone est prêt pour la Chine». En partie, c’était une réponse aux attaques des Démocrates contre la politique étrangère de Trump. C’était aussi une réponse à une longue liste d’anciens responsables Républicains de l’armée, du renseignement et de la politique étrangère qui soutiennent Biden. Esper a rédigé un article belliqueux qui définit l’Armée populaire de libération (APL) comme l’instrument du Parti communiste chinois.

Citant la Stratégie de défense nationale de 2018, qui a annoncé un changement d’orientation de l’armée américaine, passant de la «guerre contre le terrorisme» à la concurrence des «grandes puissances» avec la Chine et la Russie, Esper a déclaré que Washington était en train de contrer les plans de la Chine visant à moderniser l’APL, en renforçant sa coordination militaire avec l’Australie, le Japon et d’autres nations de la région indo-pacifique.

Accusant le Parti communiste chinois de chercher à «contraindre les autres pays et à entraver leur souveraineté», Esper a écrit: «Avant tout, la concurrence à long terme avec la Chine exige que nous ayons une force capable de rivaliser, de dissuader et de gagner dans tous les domaines: aérien, terrestre, maritime, spatial et cybernétique».

La volonté de faire la guerre à l’étranger et d’instaurer la dictature à l’intérieur a ses racines dans une crise sans précédent du capitalisme américain. La pandémie de coronavirus a déclenché une catastrophe sanitaire et un effondrement économique, les infections aux États-Unis se chiffrent à six millions et les décès à 200.000, le chômage à 30 millions et des millions d’Américains souffrent de la faim et n’ont pas de toit sur la tête.

L’incompétence, l’insensibilité et l’indifférence à la mort de la part du gouvernement, des deux partis et de la classe dirigeante dans son ensemble ont révélé l’échec du système capitaliste. Malgré leurs critiques de comment Trump a géré la pandémie, les Démocrates se sont joints à la mise en œuvre des principales politiques exigées par Wall Street. Cela a commencé par la loi CARES qui permit de renflouer à hauteur de milliers de milliards de dollars les oligarques financiers, en mars. Cela continua avec les campagnes meurtrières pour forcer les travailleurs à reprendre le travail et les enseignants et les élèves à retourner dans les écoles, sans aucune protection contre une pandémie qui fait rage.

Trump parle au nom des sections de la classe dirigeante et de l’État qui cherchent à créer un mouvement fasciste pour supprimer l’opposition sociale par la force brute. Les Démocrates appellent à soutenir non pas la classe ouvrière qui s’appauvrit, mais la CIA, l’armée, Wall Street et l’establishment de politique étrangère. Les deux camps veulent des guerres nouvelles et plus désastreuses encore ; ils diffèrent surtout sur quels pays attaquer en premier. Tous deux sont pétrifiés par la montée de l’opposition de la classe ouvrière et veulent à tout prix la bloquer et la réprimer.

La démocratie américaine s’effondre, et, quelle que soit l’issue des élections, la classe ouvrière fera face à des attaques sociales et des atteintes aux droits démocratiques de plus en plus nombreuses. Le grand danger ne réside pas dans une quelconque force inhérente du camp Trump. Ce dernier est en crise et sa politique fasciste n’a le soutien que d’une petite fraction de la population. Le mouvement prédominant du peuple américain est à gauche en opposition au capitalisme.

Le danger vient bien plutôt du poids mort que constitue le Parti démocrate et des efforts de la plupart des médias, des syndicats pro-patronaux et des organisations ex-radicales qui gravitent autour des Démocrates pour canaliser l’opposition sociale derrière ce parti droitier aux candidats droitiers. Les Démocrates sont totalement incapables de répondre à Trump, craignant d’encourager l’opposition populaire en mettant en garde contre sa politique fasciste.

Ils consacrent leurs efforts à bloquer et à réprimer un mouvement indépendant de la classe ouvrière contre le capitalisme. Ils travaillent sans relâche à diviser la classe ouvrière en dissimulant les divisions fondamentales de la société, faisant de toutes les questions des questions de race, de conflit entre une «Amérique blanche» irrémédiablement raciste et une «Amérique noire». En fait, la source du racisme et de la discrimination est le système capitaliste qu’ils défendent.

La classe ouvrière n’a pas besoin, pour combattre la pandémie, défendre l’emploi et les droits sociaux, empêcher l’installation d’une dictature et arrêter la course à la guerre, d’une stratégie électorale, mais bien plutôt d’une stratégie basée sur la lutte des classes et guidée par un programme socialiste révolutionnaire.

(Article paru d’abord en anglais le 26 août 2020)

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