Perspectives

Les Démocrates prêchent «l’unité» et la «guérison», les fascistes américains préparent les violences

Une semaine avant l'inauguration de Biden, les menaces de violence fasciste d'extrême droite se multiplient, alors même que le renseignement, le Pentagone et le Parti républicain dissimulent des informations critiques concernant la tentative de coup d'État du 6 janvier.

Une extrême instabilité prédomine au sein de l'appareil d'État. Hier après-midi, l'état-major a publié un mémo adressée aux forces armées pour souligner leur position que Biden avait été élu. Ce remarquable mémo, sans précédent dans l'histoire américaine, indique que les hauts gradés ne sont pas sûrs de pouvoir contrôler leurs troupes.

Selon ce mémo, les militaires doivent «soutenir et défendre la Constitution. Tout acte visant à perturber le processus constitutionnel est non seulement contraire à nos traditions, à nos valeurs et à notre serment, mais à la loi». Selon une enquête militaire en 2020, un tiers des militaires ont été témoins d'activités fascistes au sein des armées.

Selon Politico, Jason Crow, député démocrate du Colorado, a parlé au secrétaire de l'Armée Ryan McCarthy ce week-end de la loyauté des 20.000 soldats déployés à Washington pour sécuriser l'inauguration. Crow voulait «s'assurer que les soldats déployés ne seront pas solidaires des terroristes nationaux». Vu les manifestations pro-Trump dans les capitales des différents États, il est possible qu’il ne soit pas possible de contrôler toutes les unités militaires dans le pays.

La menace contre les élus s'accroît également. Des députés démocrates ont révélé que des agents du renseignement les ont informés lundi soir d'un complot de droite visant d’abord à perpétrer des violences de masse si le vice-président Pence tentait de destituer Trump, et ensuite à perturber l'inauguration de Biden le 20 janvier.

Le député démocrate Conor Lamb a déclaré à CNN: «Ils évoquent 4.000 ‘patriotes’ armés visant à encercler le Capitole et empêcher tout Démocrate d'y entrer. Ils ont publié des règles d'engagement, c'est-à-dire quand ils tireront ou non. C'est donc un groupe organisé qui a un projet arrêté.»

Selon le Huffington Post, les agents ont également déclaré qu'il «faut faire passer un détecteur de métal à chaque membre du Congrès avant l'inauguration». Un député a dit au Huffington Post que cela avait «ouvert les yeux» aux législateurs Démocrates. Selon lui, le renseignement estime que «tous les législateurs de mèche avec les insurgés qui aiment porter leurs armes» constituent une menace pour Biden, la vice-présidente élue Kamala Harris et les législateurs démocrates.

Néanmoins, le FBI et le ministère de la Justice ont donné une conférence de presse hier pour minimiser leur connaissances antérieures du projet de coup d’État du 6 janvier. Selon eux, c’était le produit de «perceptions erronées». Les principaux dirigeants du FBI et du ministère de la Justice ont snobé la conférence de presse, accordée par des subalternes. Le directeur du FBI, Christopher Wray, n'est pas apparu en public depuis l'émeute mercredi dernier.

Selon un article paru hier dans le Washington Post, le FBI était au courant des plans fascistes visant le Capitole, mais il a refusé d'agir. L'article est intitulé «Le rapport du FBI a mis en garde contre une ‘guerre’ au Capitole, mettant à mal l’idée qu’il n'y avait aucune indication de violence imminente». Il cite un rapport du bureau du FBI à Norfolk, en Virginie, qui pointait des «appels spécifiques à la violence».

Selon NBC News, 50 membres armés des forces de l’ordre rôdaient à quelques centaines de mètres du Capitole alors que la bande fasciste envahissait le bâtiment, mais ils ne sont pas intervenus. Le directeur par intérim du Département de Sécurité Intérieure, Chad Wolf, a démissionné lundi sans préavis. On l’a remplacé par le chef inconnu de l’Agence fédérale de gestion des désastres naturels (FEMA), Pete Gaynor.

Hier, Donald Trump a proféré ce qui sont clairement des menaces de violence contre ses opposants politiques. Avant de partir pour un rassemblement au Texas, il a qualifié son discours de mercredi, qui a lancé la tentative de coup d'État, de «tout à fait approprié». Il a averti que le vote de destitution prévu mercredi «causait un énorme danger pour notre pays et une énorme colère». Comme un mafieux s'adressant à sa victime, il a ajouté: «Je ne veux pas de violence.»

Au Texas, Trump s'est exprimé à côté du mur qu’il a fait construire le long de la frontière militarisée américano-mexicaine. Il a déclaré qu’un vote de destitution selon «le 25e amendement ne présente aucun risque pour moi, mais qu'il reviendra hanter Joe Biden et l'administration Biden. Faites attention à ce que vous souhaitez.»

Conscient de la possibilité que Biden prenne le pouvoir, Trump s’est fait écho aux appels d'autres Républicains à la «guérison». Il a dénoncé les tentatives du Congrès de le mettre en accusation: «Il est temps pour notre nation de guérir.»

Cet appel à la «guérison» imite les déclarations des responsables Démocrates, Biden d’abord. Biden a demandé au Congrès de remettre toute procédure de destitution, et donc toute enquête sur le coup du 6 janvier, pour qu’il puisse nommer ses chefs militaires et du renseignement et redresser le cours de la politique étrangère impérialiste américaine.

Le New York Times a rapporté hier que «l'équipe de transition espère persuader les Républicains au Sénat de l'aider à confirmer rapidement ses principaux responsables de sécurité nationale afin de les faire confirmer le jour de l'inauguration, mercredi prochain.»

Citant la nouvelle secrétaire de presse de Biden, Jan Psaki, le Washington Post a écrit que «Biden et ses conseillers sont convaincus que la contestation finira par se calmer. Selon son entourage, il n'est toujours pas préoccupé par le fait qu'une majorité des députes républicains a tenté de renverser les résultats des élections la semaine dernière, même après la prise du Capitole.»

Le Post a aussi cité Hilary Rosen, chef d'une société de conseil proche de Biden, qui a déclaré que Biden nomme aux hautes responsabilités des fonctionnaires qui «prennent bien plus au sérieux l'engagement de Biden à guérir le pays.»

Biden s'oppose à toute enquête plus large sur les meneurs du coup d'État du 6 janvier, y compris les Républicains qui ont fourni une couverture politique à Trump en légitimant le mensonge selon lequel l'élection aurait été volée. La semaine dernière, il a dit que l’Amérique a besoin d’un Parti républicain «fort» et a rejeté les appels à la démission des partisans de Trump, dont les sénateurs Ted Cruz et Josh Hawley.

Il faut lancer un avertissement: les fractions rivales de l’élite dirigeante veulent élaborer un compromis qui intégrera encore davantage l'extrême-droite à l'establishment politique américain.

Les forces qui se sont mobilisées pour kidnapper et tuer la gouverneure du Michigan, Gretchen Whitmer, ont le soutien de forces puissantes au sein de l’aristocratie financière, hostiles à toute restriction sur les profits des entreprises liée à la pandémie de Covid-19. L’ordre de «reprise du travail» en pleine pandémie a bénéficié d'un soutien bipartite.

Si un accord est conclu, il fera l'unanimité au sein de l'establishment politico-médiatique bourgeois, dont l'objectif est de maintenir des profits records et de forcer les travailleurs à travailler malgré la pandémie. Cette dynamique montre que c'est la classe ouvrière qui est la cible de ce processus.

En l'absence d'une intervention indépendante de la classe ouvrière sur un programme socialiste, ceci ne peut que préparer des crimes encore plus graves. Dans sa déclaration du 12 janvier, «Mobilisons la classe ouvrière contre la conspiration de Trump! Préparons une grève générale politique!", le Parti de l'égalité socialiste a écrit:

«La classe ouvrière doit réagir par une grève générale aux tentatives de l'extrême droite, incitées par le criminel politique Donald Trump et ses complices parmi les sénateurs Républicains du Congrès, de menacer la vie des élus et de saisir des bâtiments gouvernementaux et d’autres sites stratégiques à Washington D.C. ou dans les capitales des États de tout le pays.»

Les événements ont confirmé l'urgente nécessité de cet appel. L'intervention indépendante des travailleurs doit être combinée avec la demande d'une enquête complète et ouverte sur le coup d'État du 6 janvier 2021 et sur l'incitation permanente à la violence fasciste.

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