Bernie Sanders soutient le cabinet de sécurité nationale de Biden

Ce n'est pas un secret pour les lecteurs du World Socialist Web Site que le sénateur Bernie Sanders est un fervent défenseur de l'impérialisme américain. Malgré ses prétentions à être un «socialiste démocrate», les positions de politique étrangère du sénateur du Vermont n'ont rien à voir avec un véritable socialisme, qui est fondé sur l'internationalisme et la lutte pour unir la classe ouvrière mondiale contre le système capitaliste.

Dans ses campagnes pour l'investiture présidentielle démocrate, Sanders a généralement limité ses critiques de ses rivaux à la politique intérieure, tout en souscrivant au consensus de politique étrangère de l'establishment démocrate.

Lors de sa première campagne présidentielle, en 2015-2016, lorsqu'on lui a demandé si les politiques antiterroristes d'une administration Sanders incluraient l'utilisation de forces spéciales et de missiles de drones (c'est-à-dire l'enlèvement et l'assassinat), il a répondu: «Tout cela et plus encore.»

Dans sa campagne de 2020, il a salué les forces armées américaines comme «la meilleure armée du monde», a critiqué Trump pour des discussions trop amicales avec la Corée du Nord – mais pas pour ses menaces militaristes contre le Venezuela et l'Iran – et a approuvé les représailles militaires américaines si la Chine attaquait Taïwan, une réponse qui pourrait conduire à une guerre nucléaire.

Après que les deux campagnes aient échoué à la nomination présidentielle du Parti démocrate, il a plié sa tente et s’est rallié aux défenseurs plus conventionnellement de droite du militarisme américain: l'ancienne secrétaire d'État Hillary Clinton en 2016 et l'ancien vice-président Joe Biden, autrefois président de la commission sénatoriale des Affaires étrangères, en 2020.

Tout au long de sa carrière de trois décennies au Congrès, Sanders a été un partisan fiable de la politique étrangère impérialiste, soutenant le bombardement de la Serbie par les États-Unis et l’OTAN, l'invasion américaine de l'Afghanistan et le financement des opérations militaires américaines dans le monde entier. Malgré son «indépendance» nominale, il a soutenu toutes les manoeuvres de l'administration démocrate d’Obama au Moyen-Orient et en Afghanistan, a appelé aux poursuites du lanceur d'alerte Edward Snowden, qui avait dénoncé l'espionnage mondial mené par les États-Unis, et a approuvé le putsch fasciste soutenu par la CIA en Ukraine, ce qui a entraîné la mise en place d’un régime anti-russe de droite.

Sous l'administration Trump, Sanders a intégré la campagne anti-Russie menée par l'establishment du Parti démocrate, des sections de l'appareil de renseignement, de l’armée et une grande partie des grands médias, qui cherchaient à canaliser l'opposition populaire à Trump dans une direction réactionnaire, en soutien à une politique américaine plus agressive envers Moscou.

Tout en se présentant dans la campagne primaire 2020 comme l'adversaire le plus constant de la guerre américaine en Irak, Sanders a néanmoins indiqué son soutien aux frappes militaires préventives contre l'Iran et la Corée du Nord.

Ce bilan infâme est généralement dissimulé par les apologistes de la pseudo-gauche de Sanders, comme Socialist Alternative et les Socialistes démocrates d’Amérique. Mais sous la nouvelle administration du Parti démocrate de Joe Biden et Kamala Harris, l'alignement de Sanders sur la politique étrangère impérialiste américaine devient de plus en plus difficile à dissimuler.

Il convient de noter les votes que Sanders a exprimés au cours de la semaine dernière pour confirmer les nominés de Biden aux postes clés de l'appareil de sécurité nationale. Mardi, Sanders a rejoint les 50 démocrates pour confirmer Antony Blinken en tant que secrétaire d'État. Une majorité de républicains a également soutenu Blinken, à 78 voix contre 22.

Anthony Blinken lors d’une conférence de presse le 27 janvier

La semaine dernière, Sanders était l'un des 50 démocrates qui ont rejoint 43 républicains pour approuver le général à la retraite Lloyd Austin en tant que secrétaire à la Défense. Il y a eu également un vote démocrate à l'unanimité pour confirmer Avril Haines en tant que directrice du renseignement national, le plus haut poste de l’appareil d'espionnage. Seulement 10 républicains se sont opposés à cette nomination.

En fait, Sanders s’est positionné à la droite de bon nombre de ses collègues démocrates lors d'un vote par appel nominal qui a précédé la confirmation d'Austin. Il s'agissait d'une résolution visant à renoncer à l'obligation légale selon laquelle un officier militaire devrait être à la retraite pendant au moins sept ans avant d'assumer le poste civil le plus élevé au Pentagone. Quatorze démocrates se sont opposés à la dérogation, mais pas Sanders.

Cette stipulation a été adoptée il y a 70 ans pour renforcer le contrôle civil sur l'armée. Elle a été violée pour la première fois par Donald Trump, qui a demandé une dérogation pour nommer le général à la retraite James (Mad Dog) Mattis au poste de secrétaire à la Défense en 2017. Un certain nombre de démocrates ont alors accepté la dérogation, en citant deux justifications: que Mattis serait «l’adulte dans la pièce» (en présence de Trump) capable d’exercer une retenue sur les décisions de politique étrangère de Trump; et qu'il s'agissait d'une exemption unique qu'ils ne répéteraient jamais.

Aucun argument de ce genre ne peut être avancé cette fois-ci. Biden n'est clairement pas un novice en politique étrangère, et rien n’indique que le général Austin, à la retraite depuis seulement quatre ans, soit une figure indispensable de ce point de vue. Au lieu de cela, l'argument était basé sur la politique d’identité et sur l'importance du premier chef militaire afro-américain, ainsi que l'urgence supplémentaire de placer un loyaliste de Biden dans le Pentagone à la suite de la tentative de coup d'État fasciste du 6 janvier, qui a été aidée par la réticence des laquais de Trump au Pentagone à envoyer des troupes de la garde nationale en réponse aux appels urgents de la police du Capitole.

Sanders a voté contre la dérogation pour Mattis, mais pour la dérogation pour Austin. En d'autres termes, il favorise le contrôle civil de l'armée sous une administration républicaine, mais est prêt à s'en passer lorsque le commandant en chef est un démocrate. Voilà pour son «indépendance» du système bipartite capitaliste.

Mercredi après-midi, Blinkin, suite à sa confirmation au poste de secrétaire d'État, a donné son premier point de presse au département d'État. Ses propos ont démontré le degré élevé de continuité entre la politique étrangère du gouvernement Trump et celui de Biden. Blinken a salué les «Accords d'Abraham» (la reconnaissance d'Israël par plusieurs monarchies arabes, négociée par Trump) et a déclaré que la nouvelle administration espérait s'appuyer sur eux. Ces accords impliquaient la corruption par les États-Unis de régimes tachés de sang comme le Maroc, dont l’annexion de l'ancien Sahara espagnol a été reconnue en échange de son rapprochement avec Israël.

Blinken a annoncé que l'administration Biden conservait l'ambassadeur Zalmay Khalilzad comme représentant des États-Unis dans les pourparlers avec le gouvernement afghan et les talibans, afin qu'il puisse «poursuivre le travail vital qu'il accomplit». Khalilzad est l'un des architectes néoconservateurs des guerres américaines en Afghanistan et en Irak et a été proconsul américain en Afghanistan pendant une grande partie des deux dernières décennies.

En réponse à une question d'Andrea Mitchell de NBC, Blinken a souligné une position plus conflictuelle envers la Russie, impliquant des provocations telles que les affirmations selon lesquelles Moscou avait empoisonné la figure de l'opposition de droite Alexei Navalny, et les accusations fabriquées de toutes pièces de «primes» russes payées aux combattants talibans pour l’assassinat de soldats américains en Afghanistan.

Un jour après que Sanders ait voté pour l’assermentation de Blinken, le nouveau secrétaire d'État a présenté l'approche Biden en politique étrangère: une présentation discrète de mesures hautement belligérantes et incendiaires, y compris la promotion de l'accusation de l'administration Trump sortante selon laquelle la Chine est engagée dans un «génocide» contre la population ouïghoure du Xinjiang. Il n'a pas fait une telle accusation en ce qui concerne le Yémen, où l'Arabie saoudite affame systématiquement la population pour soutenir son invasion du pays, suggérant simplement que l'administration Biden ne voulait pas «entraver l'aide humanitaire».

(Article paru en anglais le 28 janvier 2021)

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