Perspectives

Le mensonge de Washington sur le laboratoire de Wuhan

Face au consensus scientifique universel sur les origines naturelles de COVID-19, le gouvernement Biden et les médias américains ont redoublé la campagne de mensonge affirmant que la maladie a été mise en circulation par un laboratoire chinois.

Il n’y a pas une once de vérité dans cette affirmation. La réfutation la plus récente, et la plus accablante, est venue de l’équipe de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui a fait des recherches sur les origines de la pandémie et a annoncé que l’OMS abandonnerait toute enquête sur une origine humaine de la maladie parce qu’il n’en existait aucune preuve.

Une vue du laboratoire P4 de l’Institut de virologie de Wuhan suite à une visite de l’équipe de l’Organisation mondiale de la santé à Wuhan, dans la province chinoise du Hubei, le mercredi 3 février 2021. (AP Photo/Ng Han Guan)

Le professeur Liang Wannian de l’université de Tsinghua, s’exprimant lors de la conférence de presse de l’OMS, a clairement indiqué que «l’ensemble de la communauté scientifique dans le monde» a «déjà réfuté» la théorie selon laquelle «le virus avait été conçu par l’homme».

Quant à l’affirmation que le virus s’est échappé d’un laboratoire par accident, Liang a ajouté: «dans tous les laboratoires de Wuhan, le virus du SRAS-CoV-2 n’existe pas. Si ce virus n’existe pas, il n’y aucun moyen de relier» à la pandémie.

Peter Ben Embarek, expert de l’OMS en matière de sécurité alimentaire, a ajouté que «nulle part auparavant on n’avait recherché sur ce virus particulier, on l’avait identifié ou connu».

Les conclusions catégoriques des scientifiques de l’OMS ont provoqué une réaction furieuse de la Maison-Blanche de Biden. «Nous sommes profondément inquiets de la manière dont les premiers résultats de l’enquête COVID-19 ont été communiqués et des questions concernant le processus utilisé pour les obtenir», a écrit la Maison-Blanche dans une déclaration le 13 février.

Cela représentait une adhésion ouverte du gouvernement Biden à ce qui était largement considéré comme la plus absurde et la plus farfelue des théories du complot de Trump, que le COVID-19 était un virus «militarisé» sorti d’un laboratoire chinois. Elle fut promue par des idéologues d’extrême droite comme le conseiller commercial de la Maison-Blanche Peter Navarro et le stratège en chef Steve Bannon.

En mai, lorsqu’on lui a demandé si le COVID-19 «provenait de ce laboratoire de Wuhan», l’ancien secrétaire d’État Mike Pompeo avait répondu: «Il y a d’énormes preuves que c’est là que tout a commencé». En juin, Navarro avait déclaré que le «Parti communiste chinois… a engendré le virus» et a appelé la maladie un «virus armé».

Le Wall Street Journal, qui a servi de porte-voix à la propagande anti-vaccination, s’est emparé de la déclaration de la Maison-Blanche critiquant l’OMS et est passé à l’offensive. Il a attaqué personnellement les scientifiques de la délégation de l’OMS, se plaignait de ce que «le récent voyage de l’OMS s’est terminé par un coup de propagande pour Pékin».

Il a condamné le zoologiste de l’OMS Peter Daszak, l’un des membres les plus directs de l’équipe. Celui-ci avait récemment condamné le New York Times pour avoir faussement allégué d’une dissimulation par les autorités chinoises et souligné à juste titre que le mouvement d’extrême droite Falun Gong et sa publication Epoch Times encourageaient fortement la théorie de la conspiration du «labo de Wuhan».

Pourquoi, au milieu de ce consensus scientifique universel, le gouvernement et les médias américains promeuvent-ils cette absurde théorie complotiste?

Dans la période récente, les États-Unis ont lancé une campagne de propagande après l’autre pour tenter de faire haïr la Chine, et par extension le peuple chinois, à la population américaine. Avant la théorie complotiste du laboratoire de Wuhan, on avait prétendu que la Chine menait un «génocide» contre sa population musulmane. Avant cela, c’était le Tibet et avant le Tibet, Taïwan.

Lorsque le COVID-19 est apparu en Chine, les scènes de mort et de maladie de masse ont suscité des manifestations de solidarité en Amérique et dans le monde. Les Américains ont volontairement envoyé des fournitures en Chine. Des orchestres symphoniques ont dédié des concerts à ses travailleurs médicaux.

Cette impulsion humaine à aider ceux qui souffrent va à l’encontre des objectifs du gouvernement américain, qui considère la Chine comme le plus grand obstacle à sa domination du monde.

C’est ainsi qu’est né le grand mensonge du gouvernement Trump, à savoir que COVID-19 était le «virus chinois», délibérément infligé au monde par le Parti communiste chinois. Cette affirmation explosive visait à avilir la conscience publique et à déshumaniser la Chine pour en faire l’«ennemi».

Des millions de personnes ont voté pour Biden dans l’espoir que le nouveau président rejetterait le racisme, la xénophobie et le militarisme de son prédécesseur. Ces espoirs étaient mal placés. Biden, comme Trump, parle au nom d’une oligarchie financière américaine déterminée à empêcher toute remise en cause de son hégémonie mondiale, pour laquelle elle a mené d’innombrables guerres — et tué des millions de personnes — et à la garantir.

Après des décennies de guerres pour le contrôle du Moyen-Orient, les États-Unis se sont tournés vers ce que le gouvernement Trump a appelé le «conflit entre grandes puissances» et en particulier la préparation d’une guerre avec la Chine.

«Le plus vieux truc des propagandistes est de diaboliser et de déshumaniser l’autre ou les autres personnes détestées et de faire de l’ennemi un objet sans visage», a écrit un auteur au sujet des techniques de propagande. «Faire cela rend plus facile de blesser l’adversaire.»

Une guerre entre les États-Unis et la Chine entraînerait la mort de millions de personnes. Un bain de sang d’une telle ampleur nécessite des années de préparation — des mensonges empilés les uns sur les autres — jusqu’à ce que la population soit conditionnée à haïr «l’ennemi».

L’absurdité et la fausseté du mensonge sont finalement sans importance. Ce qui importe, c’est que certains, voire beaucoup, y croient. On empoisonne l’opinion publique et ce qui s’appelle en temps normal un meurtre de masse, peut être présenté comme de la légitime défense.

Les États-Unis ont ainsi envahi l’Irak suite à une campagne de bombardement «choc et effroi». On a vendu cela au public comme de la légitime défense, contre la menace imminente d’armes nucléaires. On a répété cette technique à maintes reprises, pays après pays, en Yougoslavie, en Afghanistan, en Libye et en Syrie.

Mais plus la guerre est importante, plus le mensonge nécessaire pour la justifier est grand, et une guerre avec la Chine serait la plus grande de toutes. D’où l’affirmation du Département d’État américain que «près de deux millions de personnes sont mortes» parce que «le Parti communiste chinois (PCC) avait empêché systématiquement une enquête transparente et approfondie sur l’origine de la pandémie de COVID-19».

L’effort visant à empoisonner l’opinion publique contre la Chine est intimement lié à la volonté de détourner l’attention des échecs intérieurs. Plus de 500.000 personnes sont mortes en Amérique parce que son gouvernement a refusé d’alerter le public sur la pandémie, saboté les tests, puis rouvert prématurément entreprises et écoles pour relancer la bourse.

En revanche, la Chine a injecté des ressources publiques considérables dans la fourniture de soins de santé et a maintenu les écoles et les entreprises fermées jusqu’à ce que la pandémie puisse être contenue. C’est pourquoi, pendant toute la durée de la pandémie, autant de personnes sont mortes en Chine qu’en un seul jour aux États-Unis.

La logique de la campagne visant à diaboliser la Chine est explicitée par le chroniqueur du Financial Times, Janan Ganesh, dans un article intitulé «Le meilleur espoir de l’Amérique de rester unifiée est la Chine». Sa conclusion: «Sans un ennemi extérieur contre lequel s’élever, la nation se retourne sur elle-même» ; il ajoute «seul un ennemi extérieur» peut mettre fin à «l’ère de la discorde».

Mais si Ganesh présente la quête de l’«unité nationale» en termes élogieux, toute l’histoire des XIXe et XXe siècles montre que la promotion des guerres, en particulier contre les pays historiquement opprimés, s’accompagne toujours des formes les plus virulentes de racisme. Le mythe raciste du «péril jaune» avait été utilisé pour justifier le découpage et l’assujettissement de la Chine à la fin du XIXe siècle.

Avec Trump, la campagne contre la Chine a pris une forme ouvertement raciste, il a parlé de « Kung flu » [grippe Kung] et de «virus chinois». Mais les alliés politiques de Biden eux aussi ont utilisé un langage et des images racistes. En 2019, le Washington Post a fait la promotion d’un rapport de la Hoover Institution qualifiant les Sino-Américains de «fils et filles de l’empereur jaune», laissant entendre que «l’ensemble de la diaspora chinoise mondiale» devait son allégeance à Pékin sur la base de la race.

Est-il surprenant qu’avec ce type de saleté émanant des deux partis, le racisme anti-asiatique soit en hausse? Rien qu’à New York, le nombre de victimes de crimes haineux contre des asiatiques a augmenté de 867 pour cent par rapport à l’année précédente. Depuis 2006, selon le Pew Research Center, les opinions négatives sur la Chine ont plus que doublé dans la population américaine.

L’«unité nationale» que recherche Ganesh s’accompagnerait d’une sale campagne de racisme dans un pays dont l’histoire porte les stigmates de la discrimination, des préjugés et de l’oppression anti-asiatiques, y compris l’internement des Américains d’origine japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale.

Le capitalisme allemand, lui aussi, voulait un ennemi pour unifier le «Volk». Sous les nazis, il a trouvé un tel ennemi chez les Juifs, avec des conséquences terribles non seulement pour les six millions de Juifs qui ont péri dans l’Holocauste, mais aussi pour la classe ouvrière d’Allemagne et de toute l’Europe.

Les leçons du passé ne peuvent être oubliées. Les plus grandes catastrophes de l’histoire de l’humanité ont été préparées par la xénophobie et la diabolisation de nationalités et de groupes ethniques.

Ce type de diabolisation est le dernier refuge de classes dirigeantes désespérées déjà condamnées par l’histoire. Le capitalisme américain doit répondre de ses crimes. Les responsables de la mort d’un demi-million de personnes en Amérique ne sont pas les travailleurs de la Chine, mais les capitalistes d’Amérique!

(Article paru d’abord en anglais le 17 février 2021)

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