La moitié du Texas sans eau potable alors que le gouvernement fédéral et celui de l’État ferment les yeux

Plus de 14,6 millions de Texans, soit environ la moitié de la population de l’État, sont toujours soumis à un avis d’ébullition de l’eau émis vendredi, selon la porte-parole de la Commission du Texas sur la qualité de l’environnement, Tiffany Young. Cela concerne plus de 1.225 systèmes d’approvisionnement en eau et 63 pour cent des comtés du Texas après la tempête hivernale record qui a frappé l’État le week-end dernier.

Les gens font la queue pour remplir des réservoirs de propane mercredi 17 février 2021 à Houston. (AP Photo/David J. Phillip)

Lors d’une conférence de presse, Greg Meszaros, directeur des services d’aqueduc d’Austin, a déclaré que «nous savons qu’il y a des dizaines de milliers de fuites». Le service des pompiers d’Austin a répondu à «des milliers et des milliers de cas où des tuyaux avaient éclaté». À Houston, le service d’incendie a reçu près de 5.000 rapports de tuyaux qui avaient éclaté.

Les responsables républicains du Texas sont actuellement en train d’essayer de se rejeter mutuellement la responsabilité de la catastrophe. Le gouverneur Greg Abbott a accusé le gestionnaire du réseau de l’État, le «Conseil de fiabilité électrique du Texas» (ERCOT), en affirmant qu’il avait dit aux fonctionnaires de l’État cinq jours avant les coupures que tout irait bien.

Les «pannes tournantes», qui, selon ERCOT, seraient temporaires, se sont transformées en pannes de plusieurs jours par des températures glaciales. Le gouvernement de l’État n’a pratiquement rien fait pour remédier au problème. Il n’y a eu aucune mobilisation systématique pour ramener les services publics et distribuer de la nourriture et de l’eau à des millions de Texans désespérés.

Tandis que les gens étaient laissés dans l’ignorance et que beaucoup manquaient d’eau et de chaleur, des images d’immeubles de bureaux vides mais éclairés du centre-ville pouvaient être vues sur les médias sociaux à Austin, Houston, Dallas et dans d’autres villes de l’État. Ce ne sont pas des zones très peuplées ou occupées pour les affaires, car la plupart des emplois de la classe moyenne supérieure qui se trouvaient dans les centres-villes travaillent chez eux en raison de la pandémie de COVID-19.

Les responsables d’«Austin Energy» ont affirmé que la fermeture des immeubles de bureaux inoccupés couperait l’électricité des infrastructures essentielles et des bâtiments gouvernementaux. Le maire démocrate de Houston, Sylvester Turner, s’est lavé les mains de toute responsabilité lundi, en tweetant: «ERCOT est le gestionnaire du trafic du réseau électrique qui relève de l’État. Ni la ville ni le comté ne peuvent contrôler ou réguler ERCOT ou les générateurs d’électricité. Cela relève uniquement de la responsabilité de l’État».

Avec des immeubles de bureaux vides qui restent bien éclairés et chauffés, des milliers de sans-abri ont été abandonnés dans un froid glacial. Certaines églises ont permis aux gens de s’abriter à l’intérieur, et le centre de convention Kay Bailey Hutchison de Dallas a accueilli 800 personnes, selon Wayne Walker, un pasteur et PDG de OurCalling. À Austin, les responsables ont déclaré que 1.000 personnes se trouvaient dans des abris à travers la ville, y compris au Palmer Event Center. Beaucoup d’autres sans-abri ne sont pas dans les refuges et se trouvent obligés de subir le froid, et ceux qui cherchent un abri dans les refuges pour sans-abri à but non lucratif fournis par la ville, qui étaient déjà surpeuplés, doivent courir le risque de contracter le coronavirus mortel.

Le gouvernement du Texas s’est fait un devoir de faire le moins possible pour aider les résidents. L’une des rares mesures prises par le gouvernement a été d’ouvrir des centres de «réchauffement», dont beaucoup ferment à 21 h, ce qui oblige les résidents à retourner dans des maisons et des appartements frigorifiques. De plus, les centres de réchauffement eux-mêmes serviront probablement de super-diffuseurs pour le COVID-19, car les mesures de distanciation sociale et de port du masque sont extrêmement difficiles à appliquer.

De nombreuses personnes forcées de chercher refuge auprès de parents et d’amis afin d’éviter le froid ou d’obtenir de l’eau propageront probablement aussi le virus. Le seul point positif est que l’on a fermé les écoles pendant la semaine, ce qui permet d’arrêter ce vecteur précis de la propagation du virus.

Une carte d’Austin fournie sur le site web du gouvernement de la ville vendredi matin montre que tous les quartiers de la ville sont sans eau, sauf deux qui ont une faible pression d’eau. La majorité des habitants de la ville sont contraints de faire fondre la neige pour pouvoir tirer la chasse d’eau de leurs toilettes, et les épiceries sont également à court d’eau pour la plupart.

Le service d’incendie d’Abilene (AFD) a signalé qu’un troisième patient est mort dans la ville après qu’une perte de pression d’eau ait empêché le personnel d’effectuer les traitements nécessaires. Il est mort avant qu’un transfert vers un autre hôpital ne soit possible, l’AFD affirmant que les conditions météorologiques n’ont pas retardé le transfert.

Bien que l’opérateur ERCOT ait déclaré la fin de l’urgence énergétique, environ 170.000 clients étaient toujours sans électricité vendredi après-midi, tandis que des températures sous le point de congélation étaient attendues pendant la nuit dans de nombreuses régions.

À San Antonio, les pompiers n’ont pas pu éteindre un incendie dans un complexe d’appartements en raison du gel des bouches d’incendie et ont été obligés d’attendre l’arrivée des camions d’eau sur les lieux. L’incendie, qui avait débuté à 13h jeudi, a duré jusque tard dans la nuit, engloutissant complètement le bâtiment, qui s’est ensuite effondré, faisant brûler des voitures dans un stationnement voisin.

Des camions de toute la région qui transportaient des milliers de litres d’eau ont été épuisés rapidement, ce qui a permis au feu de reprendre de la vigueur. Dans une interview avec le chef des pompiers volontaires de Bexar-Bulverde à WOAI, affilié à la NBC, Jerry Bialick a déclaré: «Notre problème est que nous prenons un peu d’avance, puis l’eau vient à manquer».

Un porte-parole de la Croix rouge a déclaré que 32 appartements avaient été touchés et on a déplacé 87 personnes. Les températures étaient inférieures au point de congélation, et la pénurie d’essence empêchait beaucoup de personnes de quitter l’État en voiture.

Mardi matin, Christian Pavon, 11 ans, qui avait immigré du Honduras et était excité de voir de la neige pour la première fois, a été retrouvé sans connaissance et est mort plus tard après que la caravane de sa famille a été privée d’électricité dimanche soir, ce qui a fait chuter la température dans la résidence. Sa tante a déclaré à ABC13 KTRK qu’il n’avait aucune maladie sous-jacente et que le froid avait contribué à sa mort. On n’a pas encore établi la cause officielle de son décès.

Illustrant le mépris absolu des démocrates et des républicains pour la population, le gouvernement Biden avait envoyé jeudi, uniquement 60 générateurs, 10.000 couvertures de laine et 50.000 de coton, 729.000 litres d’eau et 225.000 repas. Ceci dans un État où 14,6 millions de personnes sont sans eau, 170.000 clients sont toujours sans électricité et où les épiceries ont des rayons vides. La quantité d’eau livrée ne satisferait qu’environ 200.000 personnes pour une journée.

L’expression «trop peu, trop tard» ne commence même pas à effleurer la surface de la réponse essentiellement inexistante et franchement ridicule du gouvernement salué comme «progressiste» par les grands médias et la pseudo-gauche.

La réponse du gouvernement Biden est similaire à celle du gouvernement Bush lors de l’ouragan Katrina, qui a fait des ravages à La Nouvelle-Orléans et dans les environs en 2005. Au cours de cette catastrophe, le gouvernement républicain a ignoré les souffrances de centaines de milliers d’habitants de la Louisiane.

Biden n’a pratiquement rien dit, se contentant de déclarer vendredi qu’il signerait bientôt une déclaration de catastrophe «majeure» et qu’il se rendrait peut-être dans cet État au milieu de la semaine prochaine. Comme pour les efforts initiaux, le fait qu’il admette qu’il y a bel et bien catastrophe ne changera probablement rien pour les Texans.

En poursuivant la politique d’immunité collective du gouvernement Trump, qui a sacrifié des milliers de vies par jour afin de maintenir la bourse à flot et de continuer à produire des profits pour l’oligarchie financière, le gouvernement Biden, tout en s’affichant comme un ami des travailleurs, fera le moins possible pour répondre à la catastrophe au Texas. Cela serait perçu comme un détournement de milliards de dollars destinés à Wall Street et au Pentagone.

Au milieu de la catastrophe, Comstock Resources Inc, un foreur de schiste au Texas et en Louisiane profite de la crise en augmentant ses prix de plus de 75 fois pour chaque kWh de gaz naturel. Son actionnaire majoritaire est Jerry Jones, le propriétaire milliardaire de l’équipe de football américain des Cowboys de Dallas.

Comstock augmente déjà sa production et fait payer entre 15$ à 179$ pour un millier de pieds cubes, contre une moyenne de 2,40$ par millier de pieds cubes au dernier trimestre. Le président et directeur financier Roland Burns a déclaré mercredi que «de toute évidence, cette semaine est comme si nous avions touché le gros lot».

Amazon a également commencé la pratique de prix abusifs, en vendant des bouteilles d’eau en ligne pour 25 dollars, soit plus de cinq fois le prix normal.

(Article paru en anglais le 20 février 2021)

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