Une manifestation de masse célèbre le 2e anniversaire du Hirak en Algérie

Des milliers de manifestants se sont réunis le 22 février dans plusieurs villes d'Algérie afin de célébrer le second anniversaire du Hirak, mouvement s’opposant au régime du FLN et de l’armée. Cela a lieu dans le contexte de la pandémie mondiale et de l’éruption d’une vague de grèves des travailleurs et des jeunes à travers le monde contre la politique d’immunité collective et les inégalités sociales.

Une colère explosive couve dans les cités et villes ouvrières à travers le Maghreb et à travers le monde. En Tunisie, le régime a fait face à des grèves d’enseignants mobilisés contre l’ordre d’enseigner en présentiel malgré la diffusion rapide du virus dans les classes. Il a envoyé l’armée contre des manifestations dans des dizaines de villes contre les violences policières. En Inde les travailleurs du secteur public et des agriculteurs indiens ont fait grève et en Italie la fonction publique a été en grève, tout comme les travailleurs de l’automobile aux Etats-Unis.

Malgré la pluie fine sur Alger, les manifestants criaient, «Tebboune est une fraude», «Les généraux à la poubelle», «Le peuple réclame l’indépendance», ou encore «Nous ne sommes pas là pour célébrer mais pour que vous partiez». Des marches se sont également déroulées dans d'autres villes du pays: à Annaba, Oran, Béjaïa, Sétif, Bouira, Tizi-Ouzou ou encore Constantine, comme peuvent en témoigner les vidéos relayées sur les réseaux sociaux.

Ces manifestations interviennent au lendemain d'une série de décisions prises par Abdelmadjid Tebboune. Le 18 février dernier, à l'occasion d'un discours à la nation, le président algérien a gracié des détenus du Hirak et annoncé des élections législatives anticipées après la dissolution du Parlement. Craignant une situation sociale explosive, le régime a tenté de dissuader les travailleurs et les jeunes de manifester en déployant un important dispositif policier.

RT France rapporte les propos d’une femme qui toisait un policier: «Je ne savais pas qu’on allait être bombardés aujourd’hui». Alger a été quadrillée de toute part. Les accès par la route étaient difficiles et des files de fourgons de police longeaient les principales rues du centre-ville alors que, dans le ciel, un hélicoptère tournoyait. Les forces de l'ordre ont voulu empêcher les manifestants d'avancer vers la Grande Poste, lieu emblématique des protestations, procédant à des interpellations.

Le Hirak avait été impulsé par les conflits de classes internationaux dont la force motrice était la lutte contre les inégalités sociales. Quelques mois avant le soulèvement des travailleurs et des jeunes algériens, Macron faisait face à au mouvement des «gilets jaunes» tous les samedis. Pas un continent n’a été épargné par les grèves qui se faisaient les échos de grèves sur d’autres continents.

Le Hirak a eu raison de la candidature de Bouteflika, mais le régime du FLN dont l’armée joue un rôle politique centrale est resté inchangé. Aucune des revendications d’égalité sociale et de droits démocratiques qui ont provoqué ce soulèvement n’ont été satisfaites par Tebboune. Ces manifestations soulignent que la lutte politique initiée par le soulèvement des travailleurs et des jeunes Algériens contre un cinquième mandat de l’autocrate Bouteflika continue à ce jour.

La pandémie, qui a fait des millions de morts dans le monde, et la rivalité entre Etats-nation privant les masses d’accès à la vaccination exposent la faillite et la criminalité d’un ordre social corrompu.

La tâche essentielle est la construction d’une nouvelle direction révolutionnaire de la classe ouvrière en Algérie et internationalement. Il est essentiel de rompre avec des organisations de pseudo gauche, qui descendent d’organisations petite-bourgeoises ayant longtemps rompu avec le trotskysme, qui applaudissent cyniquement le Hirak tout en agissant pour stabiliser le régime. Ce n’est qu’à travers la lutte pour mobiliser les travailleurs contre les serviteurs de pseudo-gauche du régime algérien qu’il sera possible de bâtir une réelle avant-garde révolutionnaire.

Pour l’anniversaire du Hirak, le Parti des travailleurs (PT) de Louisa Hanoune qui servait sous Bouteflika de couverture au régime a déclaré: «le sauvetage du pays, la préservation de sa souveraineté et son intégrité exigent la satisfaction immédiate des besoins sociaux urgents de l’immense majorité (paiement des salaires, aide de l’Etat aux entreprises préservant les emplois,…), la préservation du secteur public, le rétablissement des conditions normales de vie dans le cadre d’un véritable plan de lutte contre la COVID». Le PT a appelé à «l’arrêt de la politique de démantèlement des réalisations et conquêtes de l’indépendance».

Cette déclaration du PT, malgré sa rhétorique d’apparence militante, vise à semer l’illusion qu’il est possible de continuer à travers le régime Tebboune une lutte anti-impérialiste. Or, en même temps Tebboune envoie des policiers lourdement armés contre les manifestants et fait la politique du capital financier international. En appelant à un plan de lutte contre le Covid permettant le rétablissement des conditions normales de vie, le PT s’aligne sur le régime qui met en place une politique d’immunité collective criminelle et lui donne une couverture politique.

Selon les pablistes algériens du PST, les travailleurs et les jeunes doivent lutter non pas pour le renversement du régime à travers une lutte internationale anti-impérialiste pour la prise du pouvoir par la classe ouvrière, mais pour l’établissement d’une Assemblée constituante à l’intérieur de la seule Algérie.

Le PST déclare que «la jonction avec les luttes sociales et l’auto-organisation à la base aideront à la cristallisation d’une large ‘Convergence Démocratique, Anti Libérale et Anti Impérialiste’ qui sera indispensable dans la construction du rapport de force en faveur des travailleurs, des jeunes, des femmes, des petits paysans et de tous les opprimés, dans la bataille de l’élection d’une Assemblée Constituante Souveraine et représentative réellement des intérêts des masses populaires.»

Toute l’expérience historique démontre que la bourgeoisie de pays ex-coloniaux comme l’Algérie, la Tunisie et l’Egypte sont incapables de répondre aux aspirations démocratiques des travailleurs. Hostile envers la force révolutionnaire de la classe ouvrière, elle engendre des régimes autoritaires comme celui de Sissi en Egypte. Une Assemblée Constituante en Algérie n’enfanterait rien d’autre qu’un autre régime capitaliste national, alors que la lutte pour le socialisme et contre l’impérialisme exige une mobilisation révolutionnaire internationale.

Les questions politiques auxquelles sont confrontés les travailleurs en Algérie et à travers le monde ne peuvent être résolu qu’internationalement par les travailleurs eux-mêmes. Les manifestations de masses en Algérie renforcent la nécessité de créer une avant-garde trotskyste internationale dans la classe ouvrière à travers l’Afrique du Nord et le Moyen Orient, luttant pour renverser le capitalisme en une révolution socialiste internationale.

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