Le Brésil dépasse 400.000 décès dus au COVID, le Parti des travailleurs poursuit sa politique d'immunité collective

Alors que le Brésil dépasse les 400.000 décès dus à la COVID-19, les gouverneurs d'État d’ «opposition», du Parti des travailleurs (PT) et du Parti communiste maoïste du Brésil (PCdoB ) mettent en œuvre des politiques fonctionnant en tandem avec la réouverture de l'économie et la défense des infections de masse, imposées par le président fascisant Jair Bolsonaro.

Des habitants placent des roses sur des matelas symbolisant les victimes de la COVID-19, lors d'une manifestation contre la gestion de la pandémie par le gouvernement. (Photo AP / Silvia Izquierdo )

Alors que les médias et les gouvernements des États font la promotion de taux d'occupation légèrement inférieurs des unités de soins intensifs (USI), résultant de fermetures partielles dans divers États, la réalité est que le taux d'infection dans tout le Brésil a atteint des niveaux sans précédent pendant plus d'un mois. Au plus fort de l’épidémie de Manaus en janvier, la moyenne glissante a culminé à 55 626 cas; elle a atteint 77 129 en mars et n'est pas encore tombée sous le niveau de janvier.

Il en a résulté l'un des bilans quotidiens de décès de coronavirus les plus élevés au monde, avec plus de 2000 personnes décédant chaque jour au cours des 40 derniers jours.

Le nombre de décès par le COVID-19 enregistrés en avril est le plus élevé depuis le début de la pandémie. Le bilan des morts avait atteint 200.000 dix mois après l'enregistrement du premier cas dans le pays. Mais seulement 76 jours plus tard, il atteignait 300.000 et il n'a fallu que 36 jours pour qu’il atteigne 400 000 décès.

La semaine dernière, le ministère des Finances a annoncé que les fonds sollicités par le ministère de la Santé pour l'effort de vaccination et pour l'achat de kits d'intubation – qui comprennent des sédatifs et des relaxants musculaires nécessaires à l'intubation – seraient débloqués en plus petites tranches, citant la «possibilité que la crise aiguë se calme au fur et à mesure du progrès de la vaccination ».

Ce refus effectif de ressources a réduit de moitié l'achat de kits d'intubation ; le stockage serait désormais suffisant pour durer 90 jours, alors que l'estimation initiale était de 180. L'annonce du ministère des Finances est intervenue deux jours après que le ministre de la Santé Marcelo Queiroga, ait reporté de mai à septembre la date de fin de vaccination du groupe prioritaire, qui ne correspond qu'à 37 pour cent de la population.

Alors que le gouvernement et les grands médias se concentrent publiquement sur les préparatifs d’une production de masse nationale de vaccins et sur de nouveaux achats – la plupart n’étant disponibles que dans quelques mois – le ministère de la Santé a révélé ses réelles préoccupations dans des lettres adressées au ministère des Finances.

Celles-ci indiquaient que la situation était grave. Il y avait «incertitude» quant aux sollicitations d’unités hospitalières et de fournitures médicales, faisant référence au début du mois d'avril où les unités de soins intensifs de 24 États étaient à 80 pourcent de capacité et que 11 étaient à plus de 95 pour cent, ce qui «caractérise une situation très grave».

Pendant ce temps, les retards dans les importations de vaccins compromettent leur distribution. Mercredi, un reportage de l'Estado de São Paulo a conclu que les villes d'au moins huit États ne seraient pas en mesure de donner les secondes doses à temps. Il n'y a actuellement aucune étude sur l'efficacité d’une seule dose, ce qui signifie que la vie de centaines de milliers de personnes pourrait être en danger. Plus de 100 000 personnes recevront leur deuxième injection après la période optimale de 28 jours pour le vaccin CoronaVac. Dans l'Etat méridional du Rio Grande do Sul, 223 000 risquent de se voir refuser la deuxième injection après un retard dans l'arrivée des vaccins.

Alors que la campagne de vaccination subit des retards répétés, la politique de réouverture de l'économie dans tout le pays, du gouvernement fédéral et de celui des Etats, oblige la grande majorité de la population à reprendre le travail et à risquer d'être infectée. Cette campagne mortifère est menée par toutes les sections de l'establishment politique, y compris les gouvernements des États qui se proclament de «gauche».

Les retards dans les déploiements nationaux et locaux de vaccination n'ont pas empêché les États de rouvrir leurs économies. La semaine dernière, le gouverneur Flávio Dino du PCdoB a annoncé le déploiement de vaccinations pour les enseignants dans l'État de Maranhão, dans le cadre d’efforts pour promouvoir le retour dans les écoles, ce qui entraînera inévitablement une augmentation des cas de COVID-19 parmi les lycéens. Le 9 avril, lors de la plus forte flambée du virus du pays à ce jour, Dino a annoncé la réouverture des églises avec une jauge de 25 pour cent de leur capacité, à la suite d'une décision du juge de la Cour suprême fédérale nommé par Bolsonaro, Nunes Marques.

Le 11 avril, le gouverneur Camilo Santana du PT a annoncé la réouverture de l'économie dans l'État du Ceará sur la base de fausses déclarations quant à une «baisse» des décès et des hospitalisations dans l'État, ce qui signifiait une stabilisation des chiffres à plus de 800 décès par semaine.

L’énorme danger représenté par cette politique est constaté par un reportage publié jeudi selon lequel 99,45 pour cent du territoire du Ceará (184 villes sur 185), sont soumis à un «risque extrêmement élevé» de transmission du COVID-19, le niveau le plus élevé rapporté au Ceará depuis janvier.

La politique mortifère du gouverneur du PT a été brutalement révélée par l' explosion d'une usine de distribution de bouteilles d'oxygène à Ceará samedi dernier, dans laquelle six travailleurs ont été blessés, dont trois ont été hospitalisés. Une vidéo montrait des maisons voisines avec des fenêtres soufflées et des blessés. White Martins, la société propriétaire, a signalé que 150 maisons avaient été endommagées.

Bien que les causes immédiates de l'explosion ne soient pas claires, la réponse criminelle des politiciens auto-proclamés de «gauche», alignés sur la volonté de Bolsonaro de laisser les gens tomber malades et mourir pour garantir les profits, a entraîné une augmentation de la demande de bouteilles d'oxygène.

En mars, Anvisa, l'agence brésilienne de réglementation de la santé, a annoncé que, grâce à l'assouplissement des règles et des protocoles, certaines entreprises avaient réussi à augmenter la production d'oxygène et le remplissage des bouteilles de 200 pour cent. Les données publiées par l'agence montrent que la vente de bouteilles d'oxygène a augmenté de 47 pour cent en mars, avant même la pire période de la pandémie.

White Martins a déclaré au cours du même mois que six États, dont le Ceará, avaient «fait preuve d’une consommation excessive d'oxygène» et annoncé que ses usines commençaient à produire 24 heures sur 24. C'était avant la flambée des décès dans tout le pays en avril. Un jour après l'explosion, la société a annoncé qu'elle transportait des bouteilles d'oxygène au Ceará pour desservir les hôpitaux de la capitale et d'autres villes.

Le Parti des travailleurs et le Parti communiste mènent ces politiques tout en déclarant que la défense contre les préparatifs de Bolsonaro pour une dictature est à chercher dans la même armée (article en anglais) qui a imposé un régime de répression de masse entre 1964 et 1985. La campagne d'immunité collective de Bolsonaro a été accompagnée d’appels répétés à l’utilisation de l’armée pour forcer la réouverture de l’économie, ce qui impliquerait la mise en place d’un régime ouvertement dictatorial.

Lors d'une visite dans l'État de Bahia, gouverné par le PT, lundi dernier, quelques jours à peine avant le début d'une commission d'enquête parlementaire (CEP) sur la gestion de la pandémie par le gouvernement fédéral et ceux des États, le président a déclaré «nous ne devons pas permettre certains pseudo-gouverneurs qui veulent imposer une dictature en utilisant le virus pour soumettre » la population. Il a ajouté que « ce n'est pas le gouvernement fédéral qui vous a obligé à rester chez vous ou à fermer des magasins, ce qui a détruit des millions d'emplois ».

Au milieu d’énormes inégalités sociales, d’informations faisant état de la faim et de la propagation des grèves et manifestations des livreurs, des travailleurs du pétrole, des métallurgistes et des travailleurs des transports, ces partis prétendument de «gauche» concentrent tous leurs efforts pour empêcher que l'opposition des travailleurs n’échappe pas à leur contrôle.

Dans l'État de Pernambuco, gouverné par une coalition PSB (Parti socialiste brésilien) / PCdoB, les enseignants qui avaient mené une grève courageuse contre la réouverture des écoles en septembre, sont à nouveau entrés en lutte et fait grève pendant deux semaines. La réponse du Sintepe (syndicat des enseignants de Pernambuco), contrôlé par le PT, est de revendiquer, dans tout le pays (article en anglais) «la vaccination de tous les travailleurs de l'éducation», tout en laissant les enfants transmettre et mourir du coronavirus dès que les cours en présentiel reprennent.

La nature bidon de la campagne du syndicat a été révélée par ses propres actions. En septembre, le président du syndicat, Fernando Melo, a déclaré que le mécontentement des travailleurs était causé par «la manière dont l'annonce du retour avait été faite», et non par les vies détruites par le virus. Les manœuvres du syndicat ont finalement conduit à l'échec de la grève.

Le Sintepe est affilié à la CUT contrôlée par le PT, qui a invité des personnalités de droite comme le gouverneur de São Paulo João Doria et Arthur Lira, élu président de la chambre basse du Congrès avec le soutien de Bolsonaro, à participer au rassemblement du1er mai de cette année.

Un an après le début de la pandémie, toutes les sections de l'establishment politique sont démasquées pour leur indifférence criminelle à la souffrance généralisée et mettent activement en œuvre la politique d'immunité collective. Dans le même temps, les travailleurs entrent dans la lutte pour se défendre contre les politiques qui tuent leurs proches et détruisent leur niveau de vie.

Les travailleurs doivent former des comités de base pour lutter de manière indépendante. Ils doivent le faire en opposition à tous les partis politiques et syndicats établis, y compris les groupes de pseudo-gauche qui lancent des phrases radicales contre l'establishment politique tout en essayant de supprimer l'opposition et de la canaliser derrière «l'opposition» dirigée par le PT.

Ils doivent exiger un confinement de toutes les activités non essentielles, avec garantie de plein revenu pendant qu'ils s'isolent à domicile. Les travailleurs des activités essentielles doivent avoir le droit de déterminer des protocoles de sécurité en consultation avec les professionnels de la santé et les spécialistes.

Le Comité international de la Quatrième Internationale (CIQI) a lancé, le 1er Mai, la formation de l’Alliance internationale des travailleurs des comités de base pour lutter contre les politiques des classes dirigeantes capitalistes à travers le monde. De tels comités de bases avaient déjà été formés aux États-Unis, en Europe, au Sri Lanka et en Australie. Le rassemblement du 1er mai a discuté de cette lutte pour la construction du leadership révolutionnaire dans la classe ouvrière, au Brésil comme dans le monde.

(Article paru en anglais le 1er mai 2021)

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