Le WSWS fait campagne auprès des travailleurs canadiens de Volvo pour briser l'isolement de la grève de Volvo Truck à Dublin, en Virginie

Des reporters du World Socialist Web Site ont fait campagne à l’usine de Novabus détenue par Volvo, en banlieue de Montréal, afin de porter à l’attention des travailleurs canadiens la grève combative organisée par les 3.000 travailleurs de Volvo de Dublin en Virginie. Cela fait partie d’une campagne mondiale pour mobiliser la classe ouvrière internationale, en particulier les dizaines de milliers de travailleurs de la transnationale Volvo, derrière les grévistes de Volvo Truck et briser l’isolement de la grève.

L’usine d’autobus électriques, détenue par Volvo, sur la Rive-Nord de Montréal, là où l’équipe du WSWS a fait campagne.

Le syndicat pro-patronal des Travailleurs unis de l’automobile (United Auto Workers – UAW) cherche à étrangler la lutte des travailleurs de Volvo Truck. Il a même refusé d'informer ses propres 390.000 membres de la grève, qui dure depuis un mois, et encore moins de lever le petit doigt pour mobiliser un soutien à leur lutte.

Les travailleurs de l'usine de camions de New River Valley (NRV) ont rejeté à deux reprises, par une écrasante majorité, les accords de principe conclus entre le patronat et l'UAW. Après le premier rejet massif, les travailleurs se sont mis en grève à la mi-avril. Mais le syndicat a brusquement mis fin à cette action le 30 avril, affirmant avoir négocié un meilleur accord. Toutefois, l'UAW a refusé de communiquer l'accord complet aux travailleurs de Volvo.

En réponse à la collaboration de l'UAW avec la direction pour imposer des concessions, un groupe de travailleurs a formé un comité de la base indépendant du syndicat pour mener la lutte des travailleurs de Volvo. Le comité de la base des travailleurs de Volvo (Workers Rank-and-File Committee, VWRFC) a réussi à forcer le syndicat à publier les détails de l'accord, qui s'est avéré être un accord rempli de concessions, pas meilleur que le premier. Il comprenait des augmentations de salaire inférieures à l'inflation, une grille salariale à plusieurs niveaux, des quarts de travail de dix heures et des attaques contre les soins de santé des travailleurs et des retraités. Le VWRFC a fait connaître le contenu de l'accord aux autres travailleurs et a fait campagne pour un rejet. Cela a joué un rôle décisif dans le rejet massif de l'accord par les travailleurs (91 %), qui a conduit à la grève actuelle.

À travers leur comité de la base, les travailleurs de Volvo font maintenant appel aux autres travailleurs de Volvo et à tous les travailleurs, aux États-Unis et internationalement, afin qu’ils viennent à leur défense et que la grève sorte de son isolement imposé par l’UAW. Ils exigent également que l'UAW augmente leur misérable indemnité de grève, qui est actuellement de 275 dollars par semaine, et que la grève se poursuive jusqu'à l'obtention d'un contrat qui augmente fortement les salaires après des années de concessions, qui garantisse les soins de santé et les prestations de retraite et qui abolisse le système à plusieurs niveaux tant détesté.

Les conditions objectives sont mûres pour une lutte internationale unifiée et coordonnée entre les travailleurs, la seule façon de battre les transnationales comme Volvo, qui opère des chaînes de production intégrées dans 18 pays différents.

La campagne pour sortir la grève de Volvo de son isolement a reçu énormément d’appui, incluant des travailleurs de l’automobile en Inde et aux États-Unis, des enseignants et d’autres sections de travailleurs aux États-Unis ainsi que de nombreux autres travailleurs de plusieurs pays, tels le Sri Lanka, la Turquie, l’Allemagne et la Grande-Bretagne. Comme le déclare le VWRFC dans une déclaration publiée hier sur le WSWS appelant à rejeter le dernier contrat rempli de concessions négocié par l'UAW : «La victoire passe par l'unité: L'unité des travailleurs de NRV, l'unité de tous les travailleurs de Volvo, et l'unité des travailleurs de ce pays et de par le monde. C'est la voie à suivre !»

Les reporters du World Socialist Web Site se sont rendus à une usine de Novabus, une division de Volvo, située à Saint-Eustache, sur la Rive-Nord de Montréal. L’usine, qui fabrique des autobus électriques, est située à quelques kilomètres de l’ancienne usine d’assemblage de GM de Boisbriand, qui avait fermé ses portes en 2002, supprimant 1200 emplois. L’usine de Saint-Eustache était d’abord la propriété de General Motors, avant d’être vendu à Volvo et Henlys Group en 1998. Volvo est l’unique propriétaire de Novabus depuis 2004.

En plus de l’usine Novabus de Saint-Eustache, deux autres usines de camions et d’autobus sont présentes dans la banlieue nord de Montréal, employant en tout environ 2500 travailleurs, dont près de 500 à Novabus, qui opère deux autres usines: l’une sur la Rive-Sud de Montréal et l’autre à Plattsburgh, dans l’État de New York.

En raison de la gestion désastreuse de la campagne de vaccination COVID-19 par le gouvernement canadien et de la menace que représente le variant Delta, les reporters ont limité leur interaction avec les travailleurs. Ils ont déposé des centaines de tracts sur les voitures des employés, des tracts qui appelaient à une lutte commune entre tous les travailleurs de Volvo, au-delà des frontières nationales. On pouvait y lire ceci: «Les travailleurs au Canada, et en fait sur toute la planète, font face aux mêmes défis. Depuis des décennies, la classe dirigeante, peu importe que ce soit les libéraux, les conservateurs, les nationalistes québécois du PQ ou la CAQ au pouvoir, attaque les conditions de travail et les droits démocratiques les plus élémentaires, comme le droit de grève. Les syndicats, menés par une bureaucratie très bien nantie qui défend ardemment le système de profit capitaliste, ont depuis longtemps abandonné les travailleurs à leur sort.»

La tract appelait à faire «revivre la riche tradition de solidarité entre les travailleurs canadiens et américains».

L’une des deux faces du tract distribué à Novabus, appelant les travailleurs canadiens à appuyer leurs frères et sœurs de classe américains.

Des quelques échanges possibles dans les circonstances, les reporters du WSWS ont appris que les travailleurs de Nova Bus n’étaient pas du tout au courant de la lutte que leurs frères et sœurs de classe en Virginie mènent contre leurs exploiteurs transnationaux communs. Ce n'est pas surprenant, puisque la section locale 1004 d'Unifor à Saint-Eustache, et toute la bureaucratie syndicale au Canada et aux États-Unis, sont délibérément restés silencieux sur la grève en Virginie de peur qu'elle n'inspire d'autres travailleurs à suivre le mouvement. Pendant des décennies, la bureaucratie syndicale de tous les pays, y compris Unifor au Canada, a travaillé en partenariat avec la direction des entreprises pour supprimer des emplois, les salaires et les conditions de travail, et a systématiquement isolé et supprimé toutes les luttes de la classe ouvrière contre ces attaques.

Un jeune travailleur de Novabus a dit qu’il les appuyait. Cependant, il pensait que ce qui se passait en Virginie ne concernait pas les travailleurs de Novabus au Canada. Le reporter a répondu qu’à l’ère de la mondialisation de l’économie et des transnationales comme Volvo, qui opère une vaste chaîne de production intégrée au niveau mondial et qui parcoure le monde à la recherche des plus hauts profits, toute lutte qui demeure isolée est vouée à l’échec. Il a ajouté que pour battre le géant Volvo, les travailleurs doivent être unis au-delà des frontières et que les concessions massives demandées par Volvo en Virginie au nom de la «compétivité mondiale» établiront de nouveaux standards pour le coût de la main-d’œuvre partout, incluant pour ses opérations canadiennes. Le jeune travailleur était d’accord que les conditions sociales «peuvent vite changer».

En fait, au Canada, comme partout dans le monde, il y a une rébellion croissante des travailleurs contre les décennies d’austérité et de concessions. La colère des travailleurs est aussi propulsée par la réponse désastreuse de la classe dirigeante devant la pandémie, qui a causé plus de 26.000 morts, et les inégalités sociales sans précédents, qui ont été fortement exacerbées en pleine pandémie par la classe dirigeante, à travers sa politique meurtrière des «profits avant les vies».

Ces derniers mois, une série de grèves militantes ont eu lieu. 2.450 mineurs de Sudbury, en Ontario, sont en grève depuis le 1er juin pour protester contre les demandes de concessions importantes de la multinationale Vale. 2.500 travailleurs d'ArcelorMittal dans le nord-est du Québec ont fait grève pendant quatre semaines à partir du début du mois de mai. Deux grandes usines de transformation alimentaire près de Québec, qui comptent plus de 1.500 travailleurs, ont été secouées par des grèves. Les 1.150 débardeurs du port de Montréal ont fait grève pendant une semaine à la fin du mois d'avril, jusqu'à ce que le gouvernement libéral de Trudeau criminalise leur action en adoptant une loi de retour au travail. Tous ces travailleurs sont confrontés à des entreprises géantes, dont certaines opèrent dans plusieurs pays différents, et dont les profits annuels se chiffrent en centaines de millions et en milliards de dollars.

Ils sont également confrontés aux lois anti-démocratiques et pro-entreprises des gouvernements fédéral et provinciaux canadiens. Des centaines de milliers de travailleurs du secteur public et de la construction au Québec ont été menacés par une loi de retour au travail «d'urgence» par le gouvernement de droite de la CAQ.

Les travailleurs se rebellent non seulement contre les exigences sans fin des employeurs et des gouvernements en matière de concessions et de coupes, mais aussi contre les syndicats. Ces organisations sont de plus en plus perçues par les travailleurs pour ce qu'elles sont réellement: des appareils corrompus, pro-capitalistes et nationalistes qui collaborent avec le patronat pour imposer ses demandes socialement rétrogrades.

Dans plusieurs des conflits mentionnés ci-dessus, les travailleurs ont rejeté des accords de principe de capitulation qui avaient été approuvés par leur syndicat. Le comité de négociation du syndicat des Métallos a recommandé à l'unanimité l'offre pourrie de Vale, remplie de concessions, aux mineurs de Sudbury. Ceux-ci ont répondu en rejetant l'accord proposé à 70 % et en lançant leur grève, qui en est maintenant à son deuxième mois.

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