Discours du président chinois à l’occasion du centenaire du PCC: une litanie de mensonges

Le discours prononcé la semaine dernière par le président chinois Xi Jinping à l’occasion du centenaire officiel de la fondation du Parti communiste chinois (PCC) était une litanie de mensonges et de propagande. Il visait à consolider le régime du PCC et sa position de «noyau dur» en particulier.

Le point central du discours était le «rêve» de Xi du «rajeunissement de la nation chinoise» et sa feuille de route pour transformer la Chine en une puissance majeure sur la scène internationale. Il a déclaré que son «objectif de construire une société modérément prospère» pour le centenaire du PCC s’était déjà accompli et s’est vanté que le régime avait éliminé la «pauvreté absolue» en Chine.

Bien que l’expansion économique de la Chine, stimulée par l’afflux d’investissements étrangers au cours des trois dernières décennies, ait amélioré le niveau de vie, elle a aussi considérablement élargi le fossé entre les super-riches et la majorité des travailleurs. L’affirmation selon laquelle la Chine a aboli la «pauvreté absolue» repose sur un seuil de pauvreté très austère et des statistiques douteuses. Il est significatif que le Premier ministre Li Keqiang ait déclaré l’année dernière que la Chine comptait encore 600 millions de personnes dont le revenu mensuel atteignait à peine 1.000 yuans (54 dollars américains ou 45 euros) – pas assez pour louer une chambre dans une ville.

Le président chinois Xi Jinping, à l’arrière, gesticule en prononçant un discours lors d’une cérémonie qui marque le 100e anniversaire de la fondation du Parti communiste chinois au pouvoir, à la porte Tiananmen à Pékin, jeudi 1er juillet 2021. (AP Photo/Ng Han Guan)

Le deuxième objectif de Xi pour le centenaire est de faire de la Chine «un grand pays socialiste moderne à tous égards» d’ici 2049, soit 100 ans après la révolution de 1949 qui a porté le PCC au pouvoir. L’affirmation selon laquelle la Chine d’aujourd’hui est socialiste à tous égards est une absurdité qui est démentie par la domination du marché capitaliste dans tous les domaines de l’économie et de la société après le virage capitaliste du PCC en 1978.

Le fait que Xi soit obligé de répéter les mensonges éhontés selon lesquels il préside le «socialisme aux caractéristiques chinoises», et que le PCC reste un parti marxiste et socialiste, témoigne de l’attachement continu des masses chinoises aux acquis de la révolution de 1949. Ce bouleversement révolutionnaire dans toute la Chine a renversé le régime réactionnaire du Kuomintang de Chiang Kai-shek; il a mis fin à la domination impérialiste de la Chine et aboli une grande partie de ce qui était socialement et culturellement arriéré.

Toutefois, la révolution de 1949 – qui faisait partie de la poussée révolutionnaire internationale de l’après-guerre qui a été trahie et vaincue dans de nombreux pays par le stalinisme – est un phénomène hautement contradictoire. Le PCC stalinien de Mao Zedong s’est appuyé sur des armées de paysans et a délibérément limité les luttes généralisées de la classe ouvrière. Il a cherché à construire une Chine nouvelle qui maintenait les rapports de propriété capitalistes, mais a été contraint d’aller plus loin que prévu en nationalisant en 1955 les moyens de production et en mettant en œuvre une planification étatique bureaucratique. La classe ouvrière, cependant, n’avait aucune voix politique.

De manière significative, Xi a consacré très peu de temps dans son discours à l’histoire du parti, la présentant comme une avancée glorieuse et ininterrompue pour la «nation chinoise». Il n’a fait mention ni de la défaite dévastatrice de la deuxième révolution chinoise (1925-27) aux mains de Staline ni des luttes internes acharnées des années 1950 et 1960, alimentées par l’échec colossal du Grand Bond en avant de Mao et sa désastreuse Révolution culturelle, qui ont amené le pays au bord de l’effondrement.

Xi a déclaré: «Toutes les luttes, tous les sacrifices et toutes les créations par lesquels le Parti a uni et dirigé le peuple chinois au cours des cent dernières années ont été liés par un thème ultime – amener le grand rajeunissement de la nation chinoise». En réalité, l’abandon par le PCC de la perspective de l’internationalisme socialiste et son adhésion à la conception stalinienne réactionnaire du «socialisme dans un seul pays» ont conduit la Chine dans une impasse économique et stratégique dans les années 1970 et ont abouti au virage du PCC vers la restauration capitaliste.

Au début du 20e siècle, le nationalisme chinois qui sous-tendait les luttes contre l’impérialisme et pour l’unification de la nation avait un certain contenu progressiste. Toutefois, le PCC n’a pas été fondé sur le nationalisme, mais plutôt, en réponse à la révolution russe d’octobre 1917, sur la compréhension que les tâches démocratiques nationales ne pouvaient être accomplies que dans le cadre de la lutte de la classe ouvrière internationale pour le socialisme.

Aujourd’hui, le fait que Xi et le PCC attisent le nationalisme chinois est tout à fait réactionnaire. Non seulement il est dépourvu de tout contenu anti-impérialiste. Mais aussi, il représente plutôt les ambitions des élites riches, qui ont profité de décennies de restauration capitaliste aux dépens de la classe ouvrière, pour se tailler une place de choix dans l’ordre capitaliste mondial.

Le «rêve» de Xi est entré en collision avec la détermination de l’impérialisme américain à empêcher la Chine de devenir un défi pour le «système international fondé sur des règles» que les États-Unis dominent. Le président Biden, à la suite de Trump et d’Obama, accélère la confrontation agressive et le renforcement militaire des États-Unis dans toute l’Asie et à l’échelle internationale. Le premier objectif est de bloquer la poursuite de l’ascension de la Chine par tous les moyens, y compris la guerre.

Le PCC n’a pas de réponse progressiste à ces menaces croissantes. Bien qu’il n’ait pas fait référence aux États unis dans son discours, Xi a fait l’éloge de l’armée chinoise et a affirmé que la Chine n’était pas «intimidée par des menaces de force… nous ne permettrons jamais à une force étrangère de nous intimider, de nous opprimer ou de nous subjuguer. Quiconque tenterait de le faire se retrouverait sur une trajectoire de collision avec une grande muraille d’acier forgée par plus de 1,4 milliard de Chinois».

Tout en mettant en garde contre une guerre catastrophique entre des puissances dotées de l’arme nucléaire, Xi a plaidé pour une coexistence pacifique. Il a déclaré: «Sur le chemin à parcourir, nous resterons attachés à la promotion de la paix, du développement, de la coopération et des avantages mutuels, à une politique étrangère indépendante de paix et à la voie du développement pacifique». Le régime du PCC a cherché à plusieurs reprises à conclure un accord avec l’impérialisme américain, offrant une plus grande ouverture de l’économie chinoise et l’exploitation de la classe ouvrière.

Commentant le discours de Xi, le quotidien d’État China Daily a noté la réaction positive des chefs d’entreprise, tant en Chine qu’à l’étranger. Il a déclaré que «l’accent mis par Xi sur la poursuite du développement pacifique de la Chine, ainsi que sa détermination à promouvoir une croissance de haute qualité et à approfondir la réforme et l’ouverture ont renforcé la confiance dans la deuxième plus grande économie du monde».

Le virage vers la restauration capitaliste n’a fait qu’approfondir les contradictions auxquelles font face les dirigeants chinois, à l’extérieur comme à l’intérieur. Les sections rivales de la classe capitaliste trouvent leur expression à l’intérieur du PCC dans la lutte des fractions pour le pouvoir, les privilèges et l’influence. Plus fondamentalement, l’approfondissement du fossé social génère des tensions de classe extrêmes, pour lesquelles le PCC n’a qu’une seule réponse: des mesures policières contre toute forme d’opposition, même limitée.

Au milieu de cette crise historique qui s’aggrave, Xi s’est fait propulser au premier plan en tant que figure bonapartiste. Il tente de servir de médiateur et d’équilibrer les intérêts divergents. Il a mis fin à la limite habituelle de deux mandats de cinq ans pour le poste de secrétaire général du PCC, ce qui pourrait lui permettre de rester président indéfiniment. Dans son discours, il a répété ce qui est devenu obligatoire pour tous les fonctionnaires, à savoir que, «nous devons défendre la position centrale du secrétaire général [à savoir Xi] au sein du Comité central du Parti et du Parti dans son ensemble».

Xi a déclaré de manière menaçante: «Toute tentative de diviser le Parti du peuple chinois ou de monter le peuple contre le Parti est vouée à l’échec». L’apparence de force soigneusement cultivée qui entoure Xi et l’étouffement des divisions internes du parti sont en réalité le reflet de la faiblesse du PCC. De larges couches de la population considèrent que les prétentions du PCC à représenter le socialisme sont ridicules et sont dégoûtées par la corruption généralisée des responsables du parti, qui profitent de leur position de force pour favoriser leurs intérêts commerciaux.

Les efforts extraordinaires du PCC pour marquer le centenaire de sa fondation sont une tentative d’enterrer la véritable histoire du parti sous un déluge de falsifications historiques et de mensonges. Xi et les dirigeants du PCC reconnaissent que toute remise en question du rôle du parti au cours des 100 dernières années ne fera qu’alimenter davantage l’opposition politique.

Les travailleurs et les jeunes qui veulent lutter pour un socialisme authentique doivent développer une compréhension des leçons des expériences stratégiques de la classe ouvrière en Chine et dans le monde au cours du siècle dernier. Ces leçons politiques se trouvent dans la lutte prolongée du mouvement trotskyste mondial – aujourd’hui dirigé par le Comité international de la Quatrième Internationale – contre le stalinisme et le maoïsme. Nous invitons les jeunes, les intellectuels et les travailleurs de Chine à nous contacter.

(Article paru en anglais le 5 juillet 2021)

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