Comment le parti démocrate a préparé la guerre en Ukraine: Première partie

De la dissolution de l’URSS à la «révolution de Maïdan»

Ceci est la première partie d’une série en deux parties.

La confrontation croissante entre les forces de l’OTAN et la Russie est décrite par l’administration Biden et les médias bourgeois américains comme étant entièrement due à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Celle-ci est à son tour attribuée aux intentions démoniaques d’un seul homme: le président russe Vladimir Poutine.

La guerre Russie-Ukraine est ainsi sortie de son contexte historique. Plus important encore, elle dissimule le rôle de l’impérialisme américain dans la préparation et l’instigation délibérée du conflit. La guerre réactionnaire a été utilisée pour générer un vernis de soutien populaire à la campagne des États-Unis et de l’OTAN préparée de longue date pour renverser le régime de Poutine, démembrer la Russie et la réduire à un statut semi-colonial.

Le Parti démocrate a joué le rôle central dans une campagne anti-Russie qui remonte à plus d’une décennie. Cet article passe en revue le rôle des démocrates, en particulier depuis l’entrée en fonction de l’administration Obama-Biden en 2009. Ce compte-rendu n’est pas une évaluation après coup. Il s’appuie largement sur l’analyse contemporaine fournie par le World Socialist Web Siteau moment où le processus se déroulait, documentant à la fois le rôle des démocrates dans la mise en œuvre de la politique de la classe dirigeante américaine et de ses stratèges en matière de sécurité nationale, et la prise de contrôle effective du parti par des agents directs de l’appareil de renseignement militaire.

La dissolution de l’URSS et la guerre civile en Yougoslavie

Au cours des premières étapes de l’effondrement et de la désintégration de l’Union soviétique, les deux principaux partis capitalistes des États-Unis étaient d’accord sur la politique à mener dans cette vaste région du monde. La dissolution de l’URSS a été poursuivie, bien qu’avec une certaine prudence, afin de créer les meilleures conditions pour les sociétés et les banques américaines et de cimenter la domination mondiale des États-Unis dans ce qui a été décrit comme le «moment unipolaire» et «la fin de l’histoire».

Le bombardement de Belgrade par les forces de l’OTAN (Source: Wikipédia)

Ainsi, George H. W. Bush a ordonné la mobilisation militaire massive qui a abouti à la destruction rapide de l’armée irakienne lors de la guerre du Golfe persique de 1991, mais il n’a pas insisté sur cet avantage, rejetant le conseil de certains assistants d’envahir l’Irak et de renverser Saddam Hussein, parce qu’il ne voulait pas provoquer une réponse de Moscou qui aurait pu retarder l’effondrement du régime.

De même, Bush ne s’est pas montré initialement favorable à la sécession immédiate des différentes républiques composant l’URSS. Il a cherché à limiter la dispersion du stock d’armes nucléaires soviétiques, qui était physiquement réparti entre quatre républiques: la Russie, l’Ukraine, le Kazakhstan et la Biélorussie. L’Ukraine et le Kazakhstan possédaient les troisième et quatrième plus grands arsenaux nucléaires du monde, plus que la Chine, la France ou la Grande-Bretagne, bien que Moscou contrôlât les codes de lancement. En vertu du protocole de Lisbonne de 1992 au traité START, signé dans un bar d’hôtel sous les auspices du secrétaire d’État américain James Baker, les trois autres républiques ont accepté de transférer leurs armes nucléaires à la Russie.

Après ratification par leurs gouvernements respectifs, des accords distincts ont été signés en 1994 (connus collectivement sous le nom de Mémorandum de Budapest), dans lesquels la Biélorussie, le Kazakhstan et l’Ukraine ont formellement accepté de transférer leurs armes nucléaires à la Russie en échange d’une aide financière et de certaines garanties de sécurité, destinées à la fois aux puissances occidentales et à la Russie. La Grande-Bretagne était un signataire supplémentaire de l’accord, aux côtés des États-Unis. Le processus de transfert qui s’ensuivit prit du temps et ne fut achevé qu’en 1996.

Tout au long de cette période, la politique étrangère américaine à l’égard de la Russie s’est déroulée dans le cadre fixé par les orientations de la politique de défense de 1992 qui déclaraient: «Notre premier objectif est d’empêcher la réémergence d’un nouveau rival, soit sur le territoire de l’ancienne Union soviétique, soit ailleurs, qui représente une menace de l’ordre de celle que représentait autrefois l’Union soviétique. Il s’agit d’une considération dominante qui sous-tend la nouvelle stratégie de défense régionale et qui exige que nous nous efforcions d’empêcher toute puissance hostile de dominer une région dont les ressources seraient, sous un contrôle consolidé, suffisantes pour générer une puissance mondiale.»

Les premières divisions importantes sur la politique russe – les démocrates adoptant la position la plus agressive – sont apparues en relation avec la guerre civile en Yougoslavie, qui avait commencé en 1991, déclenchée par la reconnaissance par l’Allemagne de régimes dissidents dans les républiques constitutives de la fédération yougoslave, d’abord la Slovénie, puis la Croatie. Ces déclarations d’indépendance ont laissé de larges portions de la population serbe, le plus grand groupe ethnique, soudainement minoritaires dans les nouveaux États qui étaient définis par l’ethnicité.

Des guerres s’ensuivirent, entre la Slovénie et le gouvernement fédéral de Belgrade, en Croatie, puis en Bosnie-Herzégovine, où aucun groupe ethnique n’est majoritaire, même si les Bosniaques musulmans constituent le groupe le plus important, suivi des Serbes et des Croates. Les perspectives nationalistes de toutes les factions bourgeoises fondées sur l’ethnie étaient complètement désastreuses et réactionnaires, étant donné le mélange dans la population par les mariages mixtes et l’intégration de la vie économique et sociale dans le grand État yougoslave.

Les États-Unis et l’OTAN sont intervenus en faveur des factions anti-serbes, soutenant le gouvernement croate dans une guerre fasciste contre sa minorité serbe, ainsi qu’aux côtés du gouvernement dominé par les musulmans en Bosnie. Cette situation a culminé avec le bombardement par saturation de la Serbie en 1999, après le soulèvement du Kosovo soutenu par la CIA, mené par l’Armée de libération du Kosovo, un groupe nationaliste albanais lié au trafic de drogue et au gangstérisme pur et simple.

La Russie était alliée au régime serbe de Slobodan Milosevic. La guerre aérienne de l’OTAN contre la Serbie, qui comprenait le bombardement de l’ambassade de Chine à Belgrade, a culminé par une confrontation entre les forces américaines et russes à l’aéroport de Pristina, au Kosovo, qui menaçait de devenir un véritable affrontement militaire, qui n’a été évité qu’au dernier moment.

L’administration Clinton a poursuivi sa politique agressive, notamment en ce qui concerne le Kosovo, sans grand soutien du Parti républicain, en dehors de la faction faucon dirigée par le sénateur John McCain. Clinton n’est pas parvenu à faire adopter par le Congrès une résolution approuvant l’action militaire américaine, qui doit être menée dans le cadre de l’OTAN. Il n’a obtenu que de justesse le soutien d’un déploiement militaire américain d’après-guerre dans le cadre d’une force de «maintien de la paix».

L’Afghanistan, l’Irak et la Révolution orange

La politique étrangère officielle des États-Unis à l’égard de la Russie n’a pas connu de changement significatif avant l’administration de George W. Bush, le fils de George H. W. Bush. Utilisant les attaques terroristes du 11 septembre 2001 comme prétexte, Bush a ordonné l’invasion et l’occupation de l’Afghanistan par les États-Unis. Il a ensuite exposé dans son premier discours sur l’état de l’Union une doctrine de guerre préventive (illégale en vertu des précédents établis par les tribunaux de Nuremberg après la Seconde Guerre mondiale), qui justifiait les attaques unilatérales des États-Unis contre des pays considérés comme des menaces «potentielles».

Les premières cibles, identifiées par Bush comme «l’axe du mal», étaient l’Irak, l’Iran et la Corée du Nord, auxquels se sont ajoutées ultérieurement la Syrie et la Libye. Tous ces gouvernements, et ce n’est pas un hasard, entretenaient des relations étroites, et dans certains cas des alliances directes, avec la Russie.

Une nouvelle stratégie de sécurité nationale américaine, publiée le 17 septembre 2002, a codifié cette nouvelle doctrine, qui est devenue la base de l’autorisation de recours à la force militaire (AUMF) adoptée par le Congrès à l’automne 2002. Les démocrates du Congrès étaient divisés sur l’AUMF, mais les principaux leaders de la politique étrangère, dont Joe Biden, le président de la Commission des Affaires étrangères du Sénat, et le leader de la minorité de la Chambre des représentants, Richard Gephardt, ont obtenu suffisamment de voix démocrates pour garantir l’adoption de la résolution, qui fournissait le cadre juridique de l’invasion américaine imminente de l’Irak.

Une fois la conquête de l’Irak réalisée, les divisions au sein du Parti démocrate ont été rapidement effacées. Les démocrates ont mené leur campagne présidentielle de 2004 comme un parti de la guerre, en désignant comme candidat le sénateur John Kerry, partisan d’un effort plus efficace pour réprimer la résistance irakienne à l’occupation américaine, et en rejetant les candidats nominalement anti-guerre comme Howard Dean.

Lorsque la «révolution orange» a eu lieu en Ukraine en décembre 2004 – annulant l’élection du candidat présidentiel pro-russe Viktor Ianoukovitch et donnant la victoire au candidat pro-UE et pro-États-Unis Viktor Iouchtchenko lors du troisième tour des élections de cette année-là – le résultat a été salué par l’establishment politique américain comme un triomphe de la démocratie.

Mais le nouveau régime a rapidement sombré dans un bourbier de corruption et de luttes intestines entre groupes rivaux d’oligarques capitalistes, chacun cherchant à profiter de la privatisation des actifs légués par l’ancienne Union soviétique. L’Ukraine avait été la deuxième plus grande république constitutive de l’URSS, dotée de riches ressources agricoles et d’importantes infrastructures industrielles et publiques, et il y avait beaucoup à piller.

L’administration Bush était préoccupée par la débâcle en Irak et la guerre d’occupation en cours en Afghanistan. Elle n’a pas su tirer parti de l’avantage que représentait l’installation du gouvernement Iouchtchenko. Des sections du Parti républicain, dont l’ancien candidat à la présidence Bob Dole et l’ancien président du parti Paul Manafort (qui deviendra plus tard le président de la campagne de Donald Trump), sont même devenues des lobbyistes et des conseillers politiques pour Ianoukovitch ou pour les milliardaires qui ont financé et soutenu son Parti des régions, basé en grande partie dans la moitié orientale du pays, majoritairement russophone.

L’administration Bush a tenté de profiter de la guerre russo-géorgienne de 2008 pour lancer une grande campagne anti-russe, dont la secrétaire d’État Condoleezza Rice devait être le fer de lance, comme l’expliquait une analyse du WSWS en août 2008. Mais ce projet a été soudainement éclipsé et finalement mis de côté par l’éruption de la crise financière mondiale avec l’effondrement de Lehman Brothers le 15 septembre 2008.

Pendant les années qui ont suivi, la nouvelle administration Obama-Biden s’est occupée de la gestion de la crise financière, de la fin de la guerre en Irak et de l’intervention dans l’éruption soudaine des révoltes du «printemps arabe» en 2011, qui ont culminé avec le bombardement de la Libye par les États-Unis et l’OTAN et la guerre civile en Syrie. Tout aussi importante a été l’escalade massive de la guerre américaine en Afghanistan, dans laquelle Obama a engagé plus de 100.000 soldats. Cette force énorme nécessitait un soutien logistique tout aussi important, de nombreuses fournitures étant acheminées vers ce pays enclavé par les chemins de fer russes, avec l’accord du gouvernement Poutine.

L’administration Obama a lancé la «route du Nord» en janvier 2009 et, pendant un certain temps, elle a dépassé en volume la route beaucoup plus courte et plus directe passant par le Pakistan. Cet aspect est devenu particulièrement important en 2011 et 2012, lorsque le Pakistan a interrompu les expéditions vers l’Afghanistan pendant des mois en réaction à l’assassinat de citoyens pakistanais par des frappes de drones américains.

Moscou a même autorisé le transit de soldats et d’armes américains vers l’Afghanistan à travers l’espace aérien russe. En mars 2012, des plans ont été annoncés pour un centre de transit de l’OTAN sur une base aérienne à Ulyanovsk, sur la Volga. Le 25 juin 2012, le gouvernement russe a publié un décret officiel autorisant l’OTAN à utiliser la base aérienne, suscitant des protestations parce que la ville est le lieu de naissance de Vladimir Lénine, le leader de la révolution russe. La ville a été renommée en l’honneur de Lénine sous l’Union soviétique (il était né Vladimir Ilyich Ulyanov en 1870 à Simbirsk, un centre provincial de l’empire tsariste).

Afin de maintenir cette alliance de facto avec Moscou, l’administration Obama a accepté la victoire d’Ianoukovitch aux élections présidentielles de 2010. Au premier tour, le président sortant Viktor Iouchtchenko a été éliminé, recevant un humiliant cinq pour cent des voix, expression d’une vaste désillusion populaire à l’égard des politiques de libre marché de la «révolution orange». Au second tour, Ianoukovitch a battu la candidate des nationalistes ukrainiens, Ioulia Timochenko, par une avance de trois points de pourcentage, dans une élection certifiée équitable par les observateurs internationaux. Le nouveau gouvernement a rapidement retiré la demande d’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN et a signé un accord avec la Russie prolongeant de 25 ans son bail sur la base navale de Sébastopol, siège de la flotte de la mer Noire.

Ce sont les circonstances qui ont prévalu lorsqu’Obama a fait sa réplique moqueuse au candidat républicain à la présidence Mitt Romney lors d’un débat en 2012, après que Romney ait déclaré que la Russie, et non le terrorisme d’Al-Qaïda, était la principale menace pour les États-Unis. «Les années 1980 appellent maintenant pour demander le retour de leur politique étrangère», a ricané Obama, «parce que, vous savez, la guerre froide est terminée depuis 20 ans.»

En vérité, Romney ne faisait que dire publiquement ce que la CIA et le Pentagone avaient déjà conclu après la débâcle stratégique de la politique américaine en Ukraine. Obama souscrivait pleinement à cette compréhension, mais il a cherché à la dissimuler au public américain pendant que Washington préparait une contre-offensive.

La «révolution» de Maïdan: un coup d’État de droite

L’occasion d’un changement radical de politique a été fournie par l’intervention russe dans la guerre civile syrienne. Moscou était depuis longtemps alliée au régime d’Assad, qui avait offert à la Russie sa seule base militaire en dehors de l’ancienne Union soviétique, une installation navale à Tartous. La Russie a fourni à la Syrie une aide militaire importante, mais pas de personnel, tandis que la rébellion soutenue par les États-Unis s’intensifiait, mobilisant des forces liées à Al-Qaïda, y compris des militants islamistes expédiés dans le pays par la CIA depuis la Libye, où ils avaient servi de troupes terrestres à l’impérialisme lors du renversement du régime de Kadhafi en 2011.

Obama avait déclaré que l’utilisation d’armes chimiques en Syrie constituait une «ligne rouge» qui justifierait une intervention militaire américaine contre Assad, et un incident en août 2013, vraisemblablement fabriqué par la CIA, a fourni le prétexte nécessaire. Mais Obama n’avait pas sécurisé le front intérieur. Ses opposants de faction au sein du Parti républicain, qui dirigeaient la Chambre des représentants, ont bloqué le vote d’une autorisation de recours à la force militaire, semblable à celles qui ont précédé les guerres d’Afghanistan et d’Irak, et les menaces d’Obama sont restées lettre morte. Poutine est intervenu, offrant une échappatoire diplomatique, et Obama a accepté l’offre russe de prendre en charge toutes les armes chimiques en Syrie et de les retirer du pays.

Ce recul public humiliant a donné un nouvel élan à l’effort américain de sape et d’affaiblissement de la Russie, qui ne s’est pas fait attendre. En novembre 2013, le président ukrainien Ianoukovitch a annoncé que son gouvernement ne soutiendrait plus un effort visant à obtenir l’adhésion à l’Union européenne et s’alignerait plutôt sur l’union douanière établie par la Russie. Des protestations immédiates ont eu lieu à Kiev de la part d’éléments pro-UE de la classe moyenne, qui ont été renforcées et finalement prises en charge par des forces ouvertement fascistes telles que le parti Svoboda et le Secteur droit.

Ces groupes bénéficiaient d’un faible soutien populaire, mais ils avaient reçu des subventions financières massives des États-Unis et d’autres puissances impérialistes. Dans un appel téléphonique intercepté début février par la Russie et rendu public, on pouvait entendre Victoria Nuland, fonctionnaire du département d’État américain, se vanter que l’administration Obama dépensait un milliard de dollars par an pour des opérations de changement de régime en Ukraine.

Les manifestations de protestation sur la place centrale de Kiev (Maïdan) ont gagné en ampleur et en hostilité à l’égard du régime de Ianoukovitch. Lorsque le régime a réprimé les manifestants, les États-Unis et l’Union européenne ont répondu par des menaces de sanctions économiques.

Ligne de manifestants à Dynamivska Str. Manifestations de l’Euromaïdan. Événements du 20 janvier 2014 (Source: Wikimedia Commons)

Le 22 février, l’opposition de droite a pris le pouvoir et Ianoukovitch a fui Kiev pour s’exiler en Russie, dans ce que le WSWS a décrit comme un «putsch dirigé par des fascistes», bien que les médias occidentaux l’aient salué comme une révolution démocratique. Pour donner une idée de son caractère réel, le nouveau régime a immédiatement déclaré l’ukrainien comme seule langue nationale, bien que 20 % de la population parle principalement le russe. Le grand rabbin de Kiev a exhorté les Juifs à quitter la ville, étant donné la prédominance des néonazis dans le soulèvement de Maïdan.

La réponse au coup d’État en Russie a été de mobiliser les forces militaires, notamment aux frontières de l’Ukraine orientale et de la péninsule de Crimée, toutes deux peuplées d’une majorité de russophones. Le 28 février, les forces de la milice pro-russe ont pris le contrôle de la Crimée, bientôt rejointes par des troupes russes. (La péninsule, où se trouve la principale base navale de la mer Noire, avait été transférée à la République socialiste soviétique d’Ukraine par Nikita Khrouchtchev en 1954; jusqu’alors, elle faisait partie de la SFSR russe. La Russie et l’Ukraine étaient alors toutes deux des républiques constitutives de l’Union soviétique).

Le 3 mars, le Comité international de la Quatrième Internationale a publié une déclarationsur le coup d’État en Ukraine et la confrontation croissante entre les puissances de l’OTAN dirigées par les États-Unis et la Russie, en se concentrant initialement sur les actions russes en Crimée. La déclaration avertissait qu’alors que les puissances impérialistes menaçaient directement la Russie, la réponse du régime Poutine, produit et agent de la restauration capitaliste en Russie, conduisait politiquement à l’impasse. Le CIQI a déclaré:

Dans les événements d’Ukraine, le monde est témoin des conséquences catastrophiques, tant en Russie qu’au niveau international, de la dissolution de l’URSS en 1991. Ces conséquences sont le résultat ultime des politiques nationalistes poursuivies par le régime stalinien qui a usurpé le pouvoir politique de la classe ouvrière soviétique et répudié le programme de révolution socialiste mondiale sur lequel la Révolution d’Octobre était basée.

Il convient de rappeler les avertissements de Trotsky selon lesquels la dissolution de l’Union soviétique entraînerait la descente de la Russie vers un statut semi-colonial. Dans les années 1930, dans le contexte du régime stalinien et de son règne de terreur contre tous les éléments socialistes du pays, Trotsky a lancé le slogan d’une Ukraine soviétique indépendante, insistant sur le fait que l’indépendance sur une base bourgeoise ne pouvait avoir que les implications les plus réactionnaires. Une Ukraine bourgeoise, en outre, ne pouvait être rien d’autre que le jouet des diverses puissances impérialistes. Il en était ainsi à l’époque, et il en est toujours ainsi aujourd’hui.

Le régime issu du coup d’État à Kiev a commencé à appliquer un programme de plus en plus à droite, en mettant en œuvre des mesures d’austérité draconiennes visant la classe ouvrière ukrainienne, et en proférant des menaces de massacre lorsque ces mesures ont déclenché des protestations dans l’est de l’Ukraine, une région ayant des liens économiques étroits avec la Russie et largement peuplée de russophones.

Au milieu de ces événements, l’oligarque milliardaire qui contrôle la société gazière ukrainienne Burisma, un ancien fonctionnaire du régime Ianoukovitch, a pris une police d’assurance en engageant le fils du vice-président américain, Hunter Biden, pour un poste lucratif au conseil d’administration de la société. La ruée vers l’argent du jeune Biden s’inscrit dans le cadre d’une «ruée vers l’or» vers Kiev, alors que les routiers, les trafiquants d’armes et les charlatans politiques de toutes sortes affluaient en Ukraine dans l’espoir de profiter du nouveau régime soutenu par les États-Unis.

Après avoir obtenu le feu vert de Washington, le gouvernement ukrainien a lancé un assaut militaire dans l’est de l’Ukraine, avec pour fer de lance des éléments fascistes tels que le Secteur droit et la Brigade Azov. Le WSWS a condamné la multiplication des frappes aériennes et des bombardements d’artillerie sur Donetsk, la capitale de la région séparatiste, en déclarant: «Pour la première fois depuis le bombardement de Belgrade par l’OTAN il y a quinze ans, une autre ville européenne d’un million d’habitants – Donetsk – subit des tirs à l’arme lourde.» Les médias américains, qui se lamentent aujourd’hui sur les souffrances de la population de Kiev, Kharkiv et Marioupol, n’ont rien dit des ravages infligés à Donetsk.

Une fois de plus, des développements imprévus ont détourné l’attention de l’impérialisme américain des développements dans l’ancienne Union soviétique. En juillet 2014, la ramification d’Al-Qaïda financée par l’Arabie saoudite, l’État islamique en Irak et en Syrie (ISIS), qui était devenu un facteur important dans la guerre civile soutenue par les États-Unis contre le régime d’Assad, a brusquement changé la direction de ses opérations militaires, franchissant la frontière avec l’Irak, mettant en déroute les forces militaires de Bagdad, prenant le contrôle de tout le tiers occidental de l’Irak, largement peuplé de sunnites, et s’emparant de la deuxième plus grande ville d’Irak, Mossoul. L’effondrement imminent du projet de création d’un régime fantoche américain en Irak, qui durait depuis des décennies, a forcé l’administration Obama à se recentrer sur le Moyen-Orient, en envoyant en urgence des troupes et du matériel en Irak et en armant les milices chiites, alliées à l’Iran, pour combattre ISIS. L’Ukraine a été reléguée au second plan.

À suivre

(Article paru en anglais le 28 mars 2022)

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