Le PDG de CP Rail parmi les mieux payés au Canada

Les cheminots du Canadien Pacifique ont créé le Comité des travailleurs de la base du CP pour lutter pour la sécurité au travail et mettre fin aux conditions d’exploitation brutales qui sont responsables d’accidents mortels comme le déraillement de Field. Écrivez-nous à cpworkersrfc@gmail.com pour vous joindre à eux.

Keith Creel, PDG de CP Rail (Photo: PressProgress)

Le PDG du Canadien Pacifique, Keith Creel, a reçu une compensation totale de 26,7 millions de dollars l’année dernière, multipliant par plus de 14 fois la compensation de 1,8 million reçue par le PDG du CP en 2007. Cela place Creel parmi les PDG les mieux payés de tout le pays. En 2020, six PDG ont reçu plus de 20 millions.

En comptant les primes, les options d’achat d’actions et les autres paiements, Creel a reçu 63,5 millions de dollars au cours de ses quatre premières années (2017-2020) en tant que PDG de CP Rail. C’est exponentiellement plus que ce qu’un travailleur du rail pourrait espérer gagner au cours d’une vie de service.

Tous les cadres supérieurs de CP Rail ont vu leurs revenus gonfler, augmentant en moyenne de 104 % au cours des 13 années allant de 2007 à 2020. Par exemple, les gains totaux du directeur financier Nadeem Velani pour 2021 étaient de 4,89 millions de dollars, tandis que le directeur des ventes John Brooks a empoché 4,83 millions de dollars.

Creel et les autres hauts dirigeants du Canadien Pacifique reçoivent des sommes colossales pour avoir supervisé l’exploitation brutale des travailleurs du CP et les rendements massifs de plus en plus élevés des investisseurs, que ce soit sous la forme d’une hausse de la valeur des actions ou de paiements de dividendes.

Le deuxième plus grand chemin de fer du Canada, CP Rail, a mis en œuvre deux mesures clés pour «réduire les coûts», c’est-à-dire générer des profits plus importants, au cours de cette période: la mise en œuvre de ce que l’on appelle l’exploitation ferroviaire à horaires de précision ou PSR, et la suppression de 4500 emplois (23 % de la main-d’œuvre) entre 2012 et 2016. Ces changements ont considérablement augmenté la charge de travail des travailleurs, ravagé leur vie familiale et créé un environnement de travail de plus en plus dangereux.

Pour justifier les sommes gargantuesques versées à Creel et à d’autres hauts dirigeants de l’entreprise, le président du comité de gestion des ressources et de la rémunération du conseil d’administration du Canadien Pacifique, Mathew Paull, s’est vanté des énormes profits que l’entreprise a arrachés aux cheminots grâce à ces changements. «Keith et son équipe de direction, ainsi que la culture unique qu’ils ont créée au CP, ont obtenu des résultats exceptionnels pour les actionnaires du CP au cours des cinq dernières années», a déclaré Mathew Paull. «Avec une croissance d’environ 150 % du [rendement total pour les actionnaires], dépassant constamment les indices S&P/TSX Composite et S&P 500.»

Les «résultats exceptionnels» célébrés par Paull ont une signification complètement différente pour les plus de 10.000 travailleurs de CP Rail, qui font face à des conditions de travail de plus en plus brutales, ou pour les milliers de retraités qui ont subi des ponctions répétées sur leurs pensions. Cela inclut un plafonnement permanent des prestations des retraités depuis 2012.

Pour les travailleurs du CP Rail, les énormes profits dont se vante l’entreprise sont synonymes d’accidents mortels, de déraillements, de fatigue excessive, d’atteinte à la santé physique et mentale, de relations personnelles et familiales détruites.

C’est pour lutter contre ces conditions intolérables que 3000 mécaniciens, chefs de train et agents de triage du CP ont voté à plus de 96 % en février pour la grève. Ils ont ainsi montré leur détermination à lutter contre les exigences impitoyables de la compagnie et de ses actionnaires.

Depuis au moins une décennie, ces exigences comprennent: des horaires de travail qui obligent les travailleurs à être disponibles jour et nuit pour travailler sans voir leur famille et leurs amis; des quarts de travail de plus de 10 heures après seulement quelques heures de sommeil, ce qui entraîne inévitablement de la fatigue et des situations dangereuses pour les travailleurs et le public; un système disciplinaire qui les menace de congédiement pour la moindre infraction; et un système de griefs gardé volontairement inefficace par l’entreprise qui rend impossible la résolution d’un conflit avant deux ans ou plus.

Les Teamsters, Unifor et tous les syndicats de cheminots ont été complices de cette dictature de l’entreprise. Rejetant toute lutte contre les reculs exigés par l’entreprise et concentrés sur la défense de leur propre position privilégiée et de leurs relations douillettes avec la direction, les syndicats ont étouffé les luttes des cheminots à maintes reprises et n’ont même pas levé le petit doigt pour défendre leurs revendications.

Les bureaucrates des Teamsters ont tenu les 3000 travailleurs du rail dans l’ignorance pendant des mois de la dernière série de «négociations» et ont refusé d’utiliser le puissant mandat de grève de la base, même lorsque la loi le leur permettait. Les Teamsters ayant laissé l’initiative entre ses mains, le CP Rail a pris l’offensive, imposant un lock-out et réclamant une loi gouvernementale de retour au travail.

Il fallait s’y attendre. Mais le syndicat s’est ensuite servi de la menace d’une loi anti-grève pour justifier le fait qu’il a cédé à la demande de la direction, soutenue en coulisses par le gouvernement libéral de Trudeau, qui souhaitait que le différend contractuel soit réglé par un processus d’arbitrage truqué en faveur de l’entreprise. Les travailleurs ont reçu l’ordre de retourner au travail sans même un vote, et il leur sera désormais interdit par la loi de faire la grève ou d’organiser toute action syndicale pour défendre leurs revendications jusqu’à l’expiration du contrat imposé par l’arbitre, dans plusieurs années.

Les processus interdépendants que sont la volonté impitoyable de l’entreprise d’exploiter davantage les travailleurs et le sabotage de la résistance des travailleurs par les syndicats ont permis à la haute direction et aux actionnaires de CP Rail de s’enrichir massivement au cours de la dernière décennie.

L’exploitation brutale à CP Rail est une manifestation de l’intensification de l’exploitation des travailleurs dans le monde entier et de l’augmentation des inégalités sociales à des niveaux stupéfiants. Ces processus se sont accélérés pendant la pandémie de COVID-19, en raison de la politique de la classe dirigeante qui consiste à donner la priorité aux profits sur les vies humaines.

Au Canada, six PDG ont reçu plus de 20 millions de dollars en 2020 et, depuis la pandémie, la richesse de ses 45 milliardaires a augmenté d’au moins 78 milliards de dollars. À la fin de 2021, les quelque 2600 milliardaires du monde disposaient d’une richesse combinée de 13.600 milliards de dollars américains, soit une augmentation de plus de 34 % par rapport aux 10.100 milliards de dollars que possédaient les milliardaires du monde à la fin de 2019.

Les travailleurs de CP Rail ne sont pas seulement confrontés à une entreprise particulièrement brutale, mais à une classe dirigeante entière, qui est déterminée à faire payer aux travailleurs l’immense crise du système capitaliste, quel que soit le pays où ils vivent ou l’industrie dans laquelle ils travaillent.

S’ils veulent faire avancer leurs luttes pour de meilleures conditions de travail, les travailleurs doivent rompre avec les syndicats pro-patronat, qui acceptent le «droit» des capitalistes d’exploiter la classe ouvrière, et se plient aux diktats des politiciens des grandes entreprises et de l’État capitaliste.

C’est pour cette raison que les travailleurs du CP Rail ont formé le Comité des travailleurs de la base du CP, qui est totalement indépendant des appareils syndicaux. Ce comité vise à populariser les revendications des travailleurs du CP Rail pour de meilleures conditions de travail et à mobiliser tous les travailleurs du rail et les travailleurs de toutes les industries au Canada, aux États-Unis et à l’international dans une lutte commune contre l’austérité capitaliste.

Tous les travailleurs du rail qui souhaitent se joindre à cette lutte doivent contacter le comité à l’adresse cpworkersrfc@gmail.com.

(Article paru en anglais le 14 avril 2022)

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