La phase silencieuse de la pandémie de COVID-19: Le gouvernement Biden ne fait rien alors que les cas aux États-Unis commencent à augmenter

Un avion de Southwest Airlines, le 24 mai 2020 (AP Photo/Charlie Riedel, dossier)

Pour tenter de caractériser la réaction officielle à la troisième année de pandémie aux États-Unis, il serait peut-être utile de consulter un manuel de psychiatrie pour trouver un diagnostic approprié. Peut-être un manuel de justice pénale serait-il plus indiqué.

Face à une nouvelle marée du très contagieux sous-variant BA.2 d’Omicron, la réaction du gouvernement Biden est de ne rien voir, ne rien dire et ne rien faire. Comme l’écrivait récemment Politico, «La Maison-Blanche soutient publiquement que le pays est enfin arrivé à une nouvelle étape prometteuse dans la lutte contre la pandémie: une étape qu’un récent pic de cas de COVID ne gâchera pas». Cela va totalement à l’encontre de tout conseil de santé publique sain et, comme l’ont noté certains experts, est fait ouvertement sur la base de calculs politiques.

Le Dr Anthony Fauci, conseiller du président en matière de santé, et la Dre Rochelle Walensky, directrice des Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC), ont ouvertement approuvé le point de vue de la Maison-Blanche qui consiste à permettre à la population de faire face à une nouvelle vague d’infections, en suggérant que les gens peuvent faire des choix individuels sur la quantité de risque qu’ils veulent prendre. Fauci a récemment déclaré sur ABC: «Ce qui va se passer, c’est que nous allons voir que chaque individu va devoir faire son propre calcul de l’ampleur du risque qu’il est prêt à tolérer».

De tels commentaires, cependant, ne peuvent être qualifiés de conseils médicaux avisés pour un agent pathogène aéroporté hautement contagieux et évoluant rapidement dans une société mondiale très mobile et interconnectée. En dernière analyse, la motivation politique de la déclaration de Fauci montre qu’elle constitue une menace pour la classe ouvrière, qui a toujours assumé le plus gros fardeau de la pandémie.

La Dre Maureen Miller, professeur d’épidémiologie à la Mailman School of Public Health de l’Université de Columbia, a déclaré à ABC News: «Nous sommes à un moment où les autorités de santé publique américaines déclarent en substance: “Vous devez vous débrouiller seuls pour déterminer comment coexister avec la COVID-19”. Malheureusement, les outils sur lesquels nous nous sommes appuyés pour déterminer les niveaux de risque sont, au mieux, ignorés et, au pire, abandonnés».

Une porte tournante existe entre les exigences de la Maison-Blanche et les conseils fournis par les CDC qui ont, de manière progressive, pratiquement éliminé la capacité du public à véritablement suivre la propagation de la COVID.

Les commentaires récents du Dr Ashish Jha, expert en santé publique et nouveau coordinateur de la réponse à la COVID-19 de la Maison-Blanche, sont peut-être encore plus stupides. Pour commémorer sa récente nomination en donnant le coup d’envoi de sa tournée des programmes d’information la semaine dernière, il a déclaré à NPR: «Considérant la situation de notre pays, nous sommes à un très bon moment».

Par «un très bon moment», Jha ne fait pas référence à la récente accalmie des cas après la dernière vague d’infections qui a tué près de 180.000 personnes depuis la mi-décembre, dont 41 pour cent étaient vaccinées selon les données recueillies par les CDC.

Ni le fait qu’un million de personnes sont mortes à cause des politiques criminelles qui ont bénéficié d’un soutien bipartisan. Ils ne parlent pas des 200.000 enfants qui ont perdu un parent ou un proche aidant, ni des millions de personnes débilitées par la COVID longue qui font face à une sombre perspective pour leurs revenus et traitements futurs.

Ses commentaires ne parlent pas non plus des millions de personnes non assurées qui peuvent s’attendre à devoir payer de leur poche les tests, les vaccins et les traitements liés à la COVID-19, car tous les fonds publics destinés à ces programmes ont été abandonnés.

Au lieu de cela, Jha, qui personnifie la soumission totale de la science et de la santé publique aux diktats de Wall Street, fait référence à l’abandon de toute mesure significative pour le suivi de la COVID-19, et donc la suppression de son impact sur l’activité économique. La décimation de l’ensemble de l’infrastructure de santé publique y compris sa reconfiguration en un appareil de la politique des profits avant les vies est le «très bon moment» que les républicains et les démocrates attendaient en salivant.

En effet, ce qui caractérise objectivement la troisième année de la pandémie est l’obscurcissement. La pandémie est devenue une pandémie politiquement silencieuse.

Le reportage de Politicoest crucial, car il montre qu’en coulisses, des employés du gouvernement proches de la Maison-Blanche reconnaissent que les nouveaux cas de COVID-19 sont largement sous-comptés. Alors, pourquoi le public n’est-il pas averti?

À ce sujet, une personne proche du gouvernement Biden a déclaré à Politico: «Ils disent: “Nous ne savons pas si l’on doit s’en inquiéter ou non”. Mais on ne peut pas dire cela au public». Il serait difficile de trouver un aveu plus accablant lorsque dans la balance se trouvent la santé et le bien-être de millions de personnes qui ont déjà subi des vagues désastreuses répétées du virus.

Selon toutes les indications officielles, la vague de BA.2 prend visiblement de l’ampleur après plusieurs semaines de faible nombre de cas quotidiens signalés.

Selon l’outil de suivi COVID du New York Times, 32 États et Washington DC signalent une évolution positive du nombre de nouveaux cas sur 14 jours. C’est dans le Nord-Est que l’impact initial se fait sentir, le Vermont, le Rhode Island et Washington DC enregistrant les taux de cas les plus élevés.

Le système de suivi COVID de Johns Hopkins indique que la moyenne sur sept jours des cas de COVID-19 aux États-Unis, qui avait stagné pendant la majeure partie du mois de mars, a commencé à augmenter en début d’avril. Les cas signalés quotidiennement dans tout le pays sont au nombre de 35.272, soit une augmentation de 25 pour cent au cours des deux dernières semaines. Cependant, ces chiffres sont en contradiction avec ce que le taux de mortalité quotidien de COVID-19 suggère. La moyenne sur sept jours a repris un virage à la hausse après une baisse constante de la mi-février jusqu’à récemment, avec un peu plus de 500 décès en moyenne chaque jour à cause de leur infection. Les décès étant un indicateur décalé de quelques semaines, cette remontée implique une augmentation significative des infections non déclarées au cours des dernières semaines.

Pour replacer ces chiffres dans leur contexte, la semaine dernière, l’ancien commissaire américain de la Food and Drug Administration, le Dr Scott Gottlieb, a déclaré à Margaret Brennan, l’animatrice de l’émission «Face the Nation» sur CBS: «Il ne fait aucun doute que nous faisons face à une épidémie dans le nord-est, ainsi que dans le centre du littoral atlantique [et] dans certaines parties de la Floride également… Elle est largement due au BA.2, et je pense que nous sous-estimons considérablement le nombre de cas. Nous ne relevons probablement qu’une infection sur sept ou huit. Donc, quand nous disons qu’il y a 30.000 infections par jour, il s’agit probablement d’un quart de million d’infections par jour».

L’observation de Gottlieb est appuyée par l’analyse des données sur les eaux usées qui a vu une divergence avec les concentrations de SRAS-CoV-2 observées dans les eaux d’égout et les cas confirmés de COVID-19. Le 9 mars 2022, les concentrations virales étaient d’environ 104 copies par millilitre, et la moyenne des cas avait baissé à 37.590 par jour. Tandis que les concentrations dans les eaux usées ont presque triplé, les cas confirmés de COVID-19 sont restés largement inchangés. Les concentrations les plus élevées se trouvent dans le Nord-Est avec 472 copies, bien que toutes les régions du pays connaissent une augmentation.

Le sous-variant BA.2 d’Omicron représente désormais plus de 85 pour cent de toutes les infections séquencées. Lorsque cette version du virus a commencé à dominer en France, en Allemagne et au Royaume-Uni, le nombre d’hospitalisations et de décès a grimpé à nouveau malgré les garanties offertes par leurs dirigeants politiques que la pandémie était terminée.

Le 13 avril 2022, le Royaume-Uni a fait état de 658 décès, la moyenne sur sept jours atteignant près de 400 par jour et augmentant encore. À titre de comparaison, le nombre de décès pendant la vague de BA.1 a culminé à environ 270 décès par jour. En Allemagne, le nombre de décès dus à BA.2 a égalé celui de BA.1, et en France, le nombre de décès augmente à nouveau. Ces expériences sont pertinentes pour les États-Unis, d’autant plus que les taux de vaccination de la population sont plus faibles que dans ces pays.

Le Dr John Brownstein, épidémiologiste à l’hôpital pour enfants de Boston, a déclaré à ABC News: «Une réaction efficace en matière de santé publique dépend de données de haute qualité et en temps réel. La réduction des déclarations, motivée par les changements de comportement en matière de dépistage, le manque d’intérêt du public et le sous-financement des départements de santé publique locaux, crée la tempête parfaite de dénombrement trompeur de cas et d’hospitalisations.»

Jeffrey Duchin, un responsable de la santé pour Seattle et King County, à Washington, a déclaré sur les nouvelles mesures COVID-19 des CDC, «Le seuil d’hospitalisation fixé par les CDC est trop élevé. Attendre ce niveau élevé pour mettre en œuvre une mesure… va à l’encontre de l’objectif d’une action précoce».

Ces mises en garde interviennent à un moment où de nouveaux variants d’Omicron sont signalés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Plus précisément, deux souches, BA.4 et BA.5, représentent une proportion croissante des nouveaux cas en Afrique du Sud. Elles ont également été détectées au Danemark, en Écosse et en Angleterre.

Elles abritent deux nouvelles mutations, L452R et F486V, identifiées dans de précédents variants préoccupants, qui pourraient rendre le virus plus apte à contourner l’immunité. Jeremy Kamil, professeur associé de microbiologie et d’immunologie à la Louisiana State University Health Shreveport, a déclaré à Newsweek: «Ce sont de nouvelles lignées intéressantes. Ce qui est le plus intéressant et le plus préoccupant pour moi, c’est la mutation en pointe F486V. Cette substitution d’acides aminés échappe à de nombreux anticorps largement neutralisants que les gens possèdent et qui peuvent protéger contre plusieurs variants».

Pour l’instant, il n’existe pas suffisamment de données ou d’expérience avec ces versions pour savoir comment elles se comporteront lors d’une propagation communautaire généralisée. Mais l’émergence constante de variants de COVID-19 souligne l’indifférence totale des élites dirigeantes face aux dangers que représente le fait de laisser le virus continuer à s’attaquer à la population mondiale.

(Article paru en anglais le 16 avril 2022)

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