Tandis que la Russie lance une offensive dans l’est de l’Ukraine

Chris Coons, sénateur démocrate et allié de Biden, appelle à une discussion sur l’envoi de troupes américaines pour combattre les forces russes

Alors que la guerre en Ukraine de huit semaines entre dans une nouvelle phase plus explosive, le gouvernement Biden a annoncé qu’il prévoyait d’accorder une nouvelle aide en matière d’armement au gouvernement Zelenksy. Le sénateur du Delaware Chris Coons, un proche allié de Biden, a appelé à des discussions sur le passage à la «prochaine étape» d’un conflit militaire direct entre les États-Unis et la Russie.

S’exprimant jeudi dernier lors d’un événement à la Ford School of Public Policy de l’Université du Michigan, Coons a déclaré: «Nous sommes dans un moment très dangereux où il est important que, de manière bipartisane et mesurée, le Congrès et le gouvernement parviennent à une position commune sur le moment où nous serons prêts à passer à la prochaine étape et à envoyer non seulement des armes, mais des troupes pour défendre l’Ukraine. Si la réponse est jamais, alors nous invitons un autre niveau d’escalade dans la brutalité de Poutine».

Coons a ajouté que le gouvernement Biden devrait envisager d’envoyer des troupes américaines si la Russie utilisait des armes chimiques ou si une sorte d’«accident» entraînait la mort de membres des services américains dans la région. «Presque certainement, on aura un incident au cours duquel Poutine ira trop loin», a déclaré Coons, faisant référence à une utilisation présumée d’armes chimiques ou à des attaques contre les chaînes d’approvisionnement d’armes occidentales destinées aux forces loyales à Kiev.

Le sénateur du Delaware, qui occupe le siège autrefois occupé pendant 36 ans par Biden, est apparu dimanche dans l’émission «Face à la nation» de CBS News. L’animatrice, Margaret Brennan, lui a demandé s’il exhortait le président Biden à «fixer une ligne rouge». Il a répondu en disant: «Si on laisse Vladimir Poutine… continuer à massacrer des civils et commettre des crimes de guerre dans toute l’Ukraine, sans que ni l’OTAN ni l’Occident ne vienne plus vigoureusement au secours de l’Ukraine, je crains fort que nous voyions l’Ukraine se transformer en Syrie.» Il a ajouté: «Poutine ne s’arrêtera que lorsque nous l’arrêterons».

Coons, membre de la commission des Affaires étrangères du Sénat, est le premier sénateur à demander publiquement au Congrès et au président d’envisager l’envoi de troupes américaines en Ukraine. Compte tenu du rôle de Coons en tant que quasi mandataire de Biden au Sénat – il est intervenu au nom de la Maison-Blanche pour mettre fin au procès du Sénat dans le cadre de la deuxième destitution de Trump sans appeler un seul témoin – son intervention doit être considérée comme un ballon d’essai pour une nouvelle escalade jusqu’au point de conflit militaire direct avec la Russie, entraînant la terrible menace d’une guerre mondiale nucléaire.

Lundi, la secrétaire de presse de la Maison-Blanche, Jen Psaki, a officiellement distancé le gouvernement Biden de l’idée de Coons d’envoyer des troupes de combat américaines en Ukraine. «Le sénateur Coons est un ami proche du président et du gouvernement, et nous devons respectueusement exprimer notre désaccord avec sa proposition», a-t-elle déclaré. «Le président n’a pas l’intention d’envoyer des troupes pour faire la guerre à la Russie. Il ne pense pas que ce soit dans l’intérêt de notre sécurité nationale».

Coons, pour sa part, a «clarifié» ses propos dans un tweet. «Je n’appelle pas à l’envoi de troupes américaines dans la guerre en Ukraine», a-t-il écrit, avant de laisser entendre qu’il fallait se préparer à faire précisément cela, en disant que les États-Unis doivent être «prêts à réagir si [Poutine] intensifie encore ses crimes de guerre contre l’Ukraine».

Le lendemain, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, interviewé par la chaîne de télévision «India Today» a annoncé une nouvelle phase dans la guerre en Ukraine. Le ministère russe de la Défense a indiqué que des «missiles aériens de haute précision» avaient touché 13 positions ukrainiennes. Il a signalé que d’autres raids aériens avaient «touché 60 cibles militaires» dans des villes de la région orientale du pays.

Le gouvernement ukrainien a fait état d’une intensification de l’activité militaire dans la région orientale, de la ville de Kharkiv au nord à Marioupol au sud. Le président Zelensky a déclaré dans un message vidéo: «Les forces russes ont commencé la bataille pour le Donbass qu’elles préparent depuis longtemps».

Attisant davantage la guerre, le président Biden a confirmé mardi qu’un nouveau plan d’aide militaire pour l’Ukraine était en préparation, y compris davantage d’artillerie. Lors d’un point de presse, le secrétaire de presse du Pentagone, John Kirby, a refusé de donner des détails sur ce programme, qui correspondrait à l’aide de 800 millions de dollars fournis la semaine dernière.

Le programme d’aide américain annoncé le 13 avril comprenait 18 systèmes d’obusiers, les premières plates-formes d’artillerie de ce calibre à être fournies à l’Ukraine. Le Pentagone a également fourni 40.000 cartouches d’artillerie provenant des stocks de l’armée et des Marines. Kirby a indiqué que le personnel militaire américain formerait les soldats ukrainiens en dehors du pays à l’utilisation des obusiers.

Les commentaires du sénateur Coons donnent raison aux avertissements du WSWS que les déclarations de Biden accusant la Russie et Vladimir Poutine de crimes de guerre, voire de génocide, étaient délibérément calculées pour conditionner l’opinion publique à une transformation de l’opération militaire des États-Unis et de l’OTAN en un conflit direct et ouvert avec la Russie, risquant ainsi une guerre nucléaire qui pourrait tuer des dizaines, voire des centaines de millions de personnes.

Les demandes d’augmentation de l’aide militaire américaine à l’Ukraine sont constantes. Un reportage de CNN Politics note que le Pentagone a peu de moyens de suivre les armes antichars, antiaériennes et autres une fois qu’elles ont franchi la frontière. Le reportage indique qu’il s’agit d’un «risque conscient que le gouvernement Biden est prêt à prendre».

Avec ce nouveau cycle d’assistance qui porte l’aide militaire américaine à l’Ukraine à près de 3 milliards de dollars depuis le début de la guerre, CNN cite un responsable de la défense anonyme qui a déclaré que «le gouvernement Biden a pris en compte le risque que certains des envois puissent finalement se retrouver dans des endroits inattendus».

Dans les précédentes guerres par procuration, les «endroits inattendus» où le matériel militaire américain a fini par aboutir comprenaient des milices réactionnaires et criminelles et des marchands d’armes internationaux illégaux. Selon le représentant du Pentagone, comme «à court terme, les besoins des forces ukrainiennes pour davantage d’armes et de munitions sont presque insatiables, le risque, à long terme, que des armes finissent sur le marché noir ou dans de mauvaises mains est jugé acceptable».

Cet aspect de la guerre met en évidence l’extrême insouciance à la fois du régime oligarchique désespéré et en faillite de la Russie – le résultat de la dissolution stalinienne de l’Union soviétique – et de l’alliance impérialiste de l’OTAN dirigée par les États-Unis. Cette dernière a délibérément provoqué l’invasion russe dans le but d’infliger une défaite stratégique et de détruire la Russie qu’elle juge être un obstacle à l’hégémonie mondiale des États-Unis.

(Article paru en anglais le 20 avril 2022)

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