Lundi, le gouvernement Biden a annoncé par le biais de l’Agence de sécurité des transports (TSA), qu’il mettait fin à l’obligation de porter un masque dans les transports publics, notamment dans bus, les trains et les avions.
Suite à l’annonce de la TSA, United Airlines, Alaska Airlines, American Airlines, Southwest Airlines, Delta Air Lines, JetBlue Airways, la compagnie ferroviaire nationale Amtrak et de nombreux services de trains et de bus ont supprimé l’obligation de porter un masque.
Comme des dizaines de millions d’Américains, dont un nombre disproportionné de travailleurs à bas salaire, empruntent chaque jour les transports en commun pour se rendre au travail, cette annonce entraînera pour de larges pans de la population une aggravation spectaculaire du risque d’infection par la COVID-19.
Delta Air Lines, un lobbyiste clé pour l’élimination de toutes les restrictions encore en place à la propagation de la COVID-19, a salué l’annonce: «Nous sommes soulagés de voir le port du masque obligatoire aux États-Unis levé pour faciliter les voyages dans le monde entier, la COVID-19 étant devenu un virus saisonnier ordinaire».
La déclaration de Delta visait à minimiser faussement la menace représentée par la COVID-19, mais elle révélait ce qu’est la politique des grandes entreprises américaines et du gouvernement Biden: l’infection et la réinfection massive, en permanence, de la population, chaque voyage en avion ou trajet en bus pour aller travailler devenant un jeu de roulette russe.
L’annonce du gouvernement Biden intervient au moment où la propagation du variant BA.2 entraîne une multiplication des cas. Les États-Unis sont sur le point de passer le million de décès dus à la COVID-19, selon le suivi des Centres de contrôle et prévention des maladies (CDC).
La fin du port du masque obligatoire dans les transports en commun marque une nouvelle étape du démantèlement systématique de toutes les mesures sanitaires visant à stopper la propagation de la COVID-19.
Cela signifie que tous ceux se déplaçant pour le travail ou pour voir leur famille seront désormais plus susceptibles de contracter le virus ; ils risquent non seulement la perte de salaire, la maladie grave et la mort ou l’invalidité permanente, mais doivent vivre avec l’angoisse de contaminer un proche vulnérable.
La définition stricte d’un système immunitaire affaibli s’applique à environ 10 millions d’Américains. Cette partie du public, pour qui la vaccination n’est pas aussi efficace que pour le reste de la société, est confrontée à la perspective de travailler et de vivre dans une société sans aucune mesure pour se protéger. Ils affronteront le choix angoissant de l’isolement total ou de risquer leur vie. Pour beaucoup d’entre eux, contraints par les circonstances économiques à travailler en dehors de chez eux, ce sera une condamnation à mort.
Pour abandonner le port obligatoire de masques dans les transports, le gouvernement Biden a utilisé comme prétexte une décision semi-analphabète de la juge de Floride Kathryn Kimball Mizelle.
Mizelle a été nommée par Donald Trump, bien que jugée «non-qualifiée» par l’American Bar Association, principalement parce qu’elle était une acolyte de l’idéologue fasciste et insurrectionnel Stephen Miller.
Son arrêt affirme que les masques ne sont pas une mesure sanitaire parce que de telles mesures «se réfèrent à des mesures qui nettoient quelque chose, et non pas à des mesures qui maintiennent quelque chose propre. Le port d’un masque ne nettoie rien. Il piège tout au plus des gouttelettes de virus. Mais il n’‘assainissait’ ni la personne portant le masque ni le moyen de transport».
Cet argument est totalement débile. C’est comme si l’on disait que le filtre à huile d’une voiture ne nettoie pas l’huile, ou encore qu’un filtre à eau ne nettoie pas l’eau, ou qu’un filtre de fourneau ne nettoie pas l’air. Il est évident que l’air d’un wagon où les passagers sont masqués contient moins de virus exhalés dangereux que l’air d’un wagon où les passagers ne sont pas masqués. C’est donc plus sain, ce qui fait des masques une mesure sanitaire évidente.
Cette décision serait immédiatement annulée en cas de contestation juridique sérieuse. Si le gouvernement Biden n’avait pas été d’accord avec le jugement, il aurait fait appel en urgence et exigé un sursis d’exécution jusqu’à ce qu’une autre décision l’annule.
Une suspension aurait pu être obtenue en quelques heures, empêchant son entrée en vigueur. Au lieu de quoi la TSA a immédiatement annoncé: «En raison de la décision de justice d’aujourd’hui, à partir de maintenant, la TSA n’appliquera plus ses Directives de sécurité ni son Amendement d’urgence exigeant l’utilisation de masques dans les transports publics et les centres de transport».
Mardi, 24 heures après s’être emparée du jugement pour mettre fin au port du masque, la Maison-Blanche a annoncé qu’elle pourrait faire appel de la décision du tribunal, mais seulement «si le CDC conclut qu’une ordonnance d’obligation reste nécessaire».
Interrogé pour savoir si les gens devraient porter un masque dans les avions, Biden n’a même pas encouragé les individus à le faire. Il a dit aux journalistes que le port d’un masque était «leur décision».
Le chroniqueur de Bloomberg, Matthew Yglesias, a présenté la question sans détour dans un article intitulé «La levée du port du masque obligatoire est un cadeau aux démocrates». Il a écrit: «Ainsi, la juge – une personne nommée par Trump qui n’est certainement pas un fan de Biden, Pelosi ou de leur parti – a peut-être réussi à retirer un sujet gênant de l’ordre du jour. Pour cela, les démocrates devraient être reconnaissants».
Yglesias a fait remarquer que les deux partis de l’oligarchie américaine soutenaient une suppression de l’obligation de port du masque dans les transports. «Le Sénat américain a voté le mois dernier pour annuler l’obligation et c’est passé à 57 voix contre 40, un certain nombre de démocrates rompant les rangs pour rejoindre un caucus républicain unanime». Il a ajouté: «S’il était soumis au vote de la Chambre, ce serait probablement supprimé là aussi».
Au début de l’année, le gouvernement Biden a profité de la vague du variant Omicron pour démanteler toutes les mesures sanitaires restantes, arguant que «tout le monde» serait infecté par le virus et que par conséquent il ne fallait prendre aucune mesure pour stopper sa propagation.
La stratégie du gouvernement Biden a été décrite en détail dans un article de Politicoparu en février, «Adieu, Omicron: la Maison Blanche envisage la prochaine phase de la pandémie».
«Le gouvernement Biden prépare une nouvelle phase de la pandémie» visant à «conditionner les Américains à vivre avec» la COVID-19, écrivait Politico. Le gouvernement prévoyait un «changement délibéré de message, destiné à mettre les gens à l’aise avec un scénario où le virus reste largement répandu».
Afin de «conditionner» l’opinion publique et de faire en sorte que le public «se sente autrement» face à la pandémie, le gouvernement Biden avait déterminé que «la meilleure stratégie politique n’[était] pas de la laisser dominer l’actualité tous les jours», écrit Politico.
À cette fin, le gouvernement Biden a procédé à un arrêt systématique des reportages quotidiens sur la COVID-19. En février, il a mis fin au signalement des décès dus au virus survenus dans les hôpitaux, puis a encouragé les États à mettre fin au signalement quotidien. Seuls sept États rapportent toujours quotidiennement les cas de COVID-19.
Par conséquent, il n’y a aucun moyen sérieux de suivre les infections par la COVID-19 aux États-Unis.
Comme Politicol'a écrit dans un autre article mardi,
certains experts travaillant sur la réaction estiment que le sous-dénombrement est plus grave que ce qu’on a admis publiquement, un responsable du gouvernement estimant que le gouvernement n’enregistre qu’un nouveau cas sur six. Le manque de données a alimenté les inquiétudes internes sur la façon dont le gouvernement devait faire connaître publiquement la gravité de la situation. «Ils se disent: “Nous ne savons pas si c’est quelque chose qui doit nous inquiéter ou non”», a déclaré une personne proche de la Maison-Blanche. «Mais vous ne pouvez pas dire cela au public».
Si la confusion règne dans la population quant au danger représenté par la pandémie, c’est parce que le gouvernement Biden et les médias américains ont systématiquement menti et dissimulé des cas dans le but de faire croire que la pandémie est terminée.
En luttant contre toutes les mesures visant à stopper la propagation du virus, le gouvernement Biden a encouragé toutes les formes d’arriération et d’individualisme toxique. L’année dernière, Biden a déclaré que les États-Unis «déclaraient leur indépendance vis-à-vis d’un virus mortel» en mettant fin au port du masque, la directrice du CDC Rochelle Walensky, elle, l’a qualifié de « Lettre écarlate de cette pandémie».
Les célébrations grotesques de l’establishment politique à propos de la suppression du port obligatoire de masques sont une des manifestations de l’arriération systématiquement cultivée aux États-Unis: l’individualisme américain a atteint son point le plus bas et le plus toxique
Contre la réaction meurtrière du gouvernement Trump à la pandémie, des millions de gens ont voté pour Biden à l’élection présidentielle de 2020, en raison de sa promesse de «suivre la science» et de «mettre fin à la pandémie». Mais celui-ci a été encore plus agressif dans la mise en œuvre du programme de Trump que Trump lui-même.
Cette réalité confirme l’évaluationfaite par le World Socialist Web Site, que l’élimination et l’éradication finale de la COVID-19 nécessitent «le développement d’un puissant mouvement de masse international et unifié de la classe ouvrière. Seul un mouvement de masse qui n’a pas à sa base le mobile du profit et n’est pas entravé par la poursuite obsessionnelle de la richesse personnelle peut développer la force sociale requise pour imposer un changement de politique».
Si les mesures nécessaires pour sauver des vies sont dans l’intérêt de la grande masse de la population, elles sont fondamentalement en conflit avec les intérêts de l’oligarchie financière capitaliste et de la société qu’elle domine.
Le 1er mai, le Comité international de la Quatrième Internationale organise un rassemblement international en ligne du 1er Mai, qui luttera pour une stratégie socialiste de mobilisation de la classe ouvrière contre la mort en masse par la pandémie, contre la guerre et l’inégalité sociale.
(Article paru d’abord en anglais le 20 avril 2022)