«Entre Le Pen et Macron, c’est le suicide et la mort»

Une mère de famille des cités dénonce les violences policières

Hier, des journalistes du WSWS ont interviewé des travailleurs à Saint-Denis, en banlieue parisienne, sur l’élection présidentielle entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Farida, une mère de famille, voulu alerter sur l’étendue des violences policières dans les cités des grandes villes de France.

Farida a expliqué, «Moi j’habite la cité à Franc-moisin, et tous les soirs il y a les policiers qui rentrent comme ça, à moto, à pied. Ils jettent des bombes lacrymogènes sur des parents avec des bébés. Moi j’étais en train de faire mes courses, et j’ai vu les policiers qui rentraient comme des sauvages, tirer des bombes lacrymogènes sur nous, et j’avais deux bébés en bas âge au marché. Quand j’ai dit aux policiers qu’il faut nous respecter, ils m’ont dit, ‘On n’en a rien à foutre.’»

Farida (source: wsws)

Elle a souligné en particulier la violence et le manque de respect envers les habitants des interventions policières dans les cités.

Elle a dit, «La police rentrent comme des gorilles dans la cité, ils sont chauds. Celui qu’ils attrapent, ils le fracassent. Ils attrapent un gamin de 12 ans, ils sont 60 sur lui. Vous trouvez ça normal? Vous l’avez pris, c’est bon, pourquoi vous le traînez par les cheveux, par les vêtements? Après nous les parents, on est en colère quand on voit les policiers traîner par terre un gamin de 12 ans, 15 ans qu’on connaît. Ensuite ils nous disent, ‘Dégage, dégage sinon je tire.’ Je dis, ‘Vas-y, tire.’ On est là à couvrir nos enfants!»

Farida a écouté avec intérêt les journalistes du WSWS sur l’appel du Parti de l’égalité socialiste (PES) à un boycott actif des élections, pour mobiliser les travailleurs, rejeter les deux candidats, et préparer les travailleurs à une lutte contre le prochain président, que ce soit Macron ou Le Pen.

Elle a réagi: «Entre Le Pen et Macron, c’est la mort et le suicide, la peste et le choléra.» Si elle a dit pencher plutôt à un vote Macron, Farida a fait part de son hostilité au ministère de l’Intérieur de Macron, Gérald Darmanin: «Le Pen, c’est carré, net, on sait ce qu’elle veut. Lui c’est pareil, quoi, ou presque. Il faut faire le ménage.»

Elle a appelé à l’unité internationale des travailleurs en France: «Le Pen, on sait qu’elle ne nous aime pas, elle n’aime que les Français de souche. Mais la France, elle est montée avec qui? C’est avec les étrangers. Les Portugais, les Arabes, les Blacks, c’est qui qui travaille avec un salaire de misère? C’est les étrangers. Alors si elle fait le ménage, elle va faire comment pour vivre? C’est elle et sa famille qui va faire le travail des autres?»

Alors que les journalistes des WSWS critiquaient l’alignement des deux candidats sur la politique de l’Otan qui fait la guerre à la Russie en Ukraine, Farida a fait part de son inquiétude: «Le président russe il peut se retourner contre nous, c’est sûr. Et il y aura plein de victimes. La France n’a pas les moyens, et si elle met le nez dans un truc où elle n’est pas de taille, c’est mieux qu’elle se retire plutôt que de faire des dégâts.»

Elle a poursuivi sur le rôle de la police face aux travailleurs des cités: «J’ai des enfants grands, j’ai deux filles grandes et deux garçons, un de 22 ans et un de 21 ans. Hier, j’envoie mon fils à acheter du pain. Eux, quand ils rentrent, celui qui est dehors est embarqué. Moi je leur ai crié, je leur ai dit que je l’ai envoyé acheter du pain, il m’a dit, et désolé du mot, ‘Ferme ta gueule.’ «Je lui ai demandé, ‘Est-ce que je vous ai manqué de respect?’ Et il m’a répondu, ‘Non, mais j’ai tout le droit.’ Mais pourquoi il a tout le droit? C’est parce qu’il est armé.

«Il m’a dit ‘Pourquoi vous ne les gardez pas, vos enfants?’, moi je lui ai dit, ‘Il a 22 ans, il n’a pas le droit d’aller acheter des baguettes? Je trouve aberrant ce qu’ils font, insulter les gens et leur dire, ‘Sale arabe’, ‘Sale noir.’ Ce n’est pas juste. Est-ce que nous on leur dit, ‘Sale policier français’? On n’a pas le droit de s’insulter les uns les autres.»

Farida a souligné qu’elle dit à ses enfants de ne pas chercher la bagarre ou se laisser provoquer par les policiers, mais que le comportement outrancier de la police crée beaucoup de colère: «Mon fils il me dit, ‘Maman, quand on marche dans la rue, ils te plaquent dans la rue pour te fouiller dans le slip.’ Arrêtez de tripoter les gens comme ça! La police peut parler avec la bouche comme ça, mais pas tripoter les gens.»

Elle a ajouté, «La police municipale, avant, elle n’était pas armée. Mais maintenant ils se prennent pour de vrais policiers. Ils parlent mal avec les gens, s’il y a quoi que ce soit ils traitent les gens de racaille. Mais les jeunes et les enfants qui marchent dans la rue ne sont pas tous de la racaille, ce sont des familles. Ils ont une mère, un père, ils ont le droit de parler comme ils veulent. On ne peut pas les insulter comme ça, les traiter de ‘sale Arabe.’»

Les journalistes du WSWS ont remarqué que les travailleurs sont face au défi de s’unir contre un État capitaliste qui, depuis l’état d’urgence de 2015-2017, va de plus en plus vers l’usage en France métropolitaine des méthodes qu’elle a utilisées pendant la guerre d’Algérie.

Farida a répondu: «Moi je suis Africaine, je suis Arabe, oui, je suis originaire d’Alger. J’ai vécu ici, j’ai mes parents qui sont décédés qui ont vécu en Algérie. Mon père était de l’année quand on avait la guerre, il a fait la guerre de France. Si on vit ici, c’est qu’on est Français. Mon mari est né avant 1955, il est Français. Mais nous on respecte tous les gens, Africains, Arabes, Japonais, toutes sortes, c’est comme ça normalement que marche la France, chacun respecte l’autre. Si ne se respecte pas, on va vivre comme dans la jungle».

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