Les États-Unis bombardent la Syrie pour défendre leur occupation illégale

L’armée de l’air américaine a effectué une série de frappes contre des cibles dans la province orientale syrienne de Deir Ezzor jeudi soir: des actes d’agression illégale pour défendre l’occupation criminelle du pays par Washington au mépris de la souveraineté syrienne et du droit international.

Selon le Pentagone, le président américain, Joe Biden, a ordonné les raids de bombardement après qu’un drone a frappé une installation de maintenance de l’armée américaine à l’aéroport militaire de Kharab al-Jir près de la ville de Hasakah dans le nord-est de la Syrie, tuant un entrepreneur militaire et blessant cinq membres du personnel militaire américain ainsi qu’un autre entrepreneur.

Des soldats américains tirent un obusier M777 alors qu’ils sont déployés en Syrie sur le site de soutien à la mission Conoco, le 4 décembre 2022. [Photo: US Department of Defense/ Army Sgt. Julio Hernandez]

Des frappes américaines ont été dirigées contre le quartier Harabish de la ville densément peuplée de Deir Ezzor, ainsi que sur la ville d’al-Mayadin et une cible dans le désert d’al-Bukamal. Le Pentagone a affirmé que les frappes avaient touché «des installations utilisées par des groupes affiliés au Corps des gardiens de la révolution islamique d’Iran».

Des habitants de la région ont toutefois déclaré aux médias iraniens et libanais que les missiles américains avaient touchés un dépôt de céréales et un centre de développement rural. Les médias d’État iraniens ont souligné qu’aucun Iranien n’avait été tué dans les frappes américaines.

L’Observatoire syrien des droits de l’homme, basé à Londres, a affirmé que les bombardements américains avaient tué au moins 11 membres de la milice, dont deux citoyens syriens. La chaîne de télévision de la presse iranienne a cité des sources locales affirmant que les personnes tuées dans les attaques américaines étaient des soldats syriens.

Vendredi, la base militaire américaine située près de la ville de Hasakah, dans le nord-est de la Syrie, a fait l’objet d’une attaque à la roquette. Le porte-parole de la Maison-Blanche pour la sécurité nationale, John Kirby, a déclaré aux médias que le missile n’avait pas fait de victimes.

Vendredi en fin de journée, des informations ont fait état de la poursuite des attaques à la roquette contre trois bases américaines, où au moins un autre soldat américain a été blessé, et l’utilisation par l’armée américaine d’avions de chasse et d’hélicoptères d’attaque pour mener des frappes.

Les porte-parole de l’armée américaine ont clairement indiqué que d’autres attaques militaires américaines, plus sanglantes, pourraient avoir lieu. Le général, Erik Kurilla, chef du Commandement central américain qui supervise toutes les forces militaires américaines dans la région, a déclaré jeudi à la commission des forces armées américaines qu’elles «sont préparées à des options modulables» en représailles supposées à «d’autres attaques iraniennes». Pour sa part, le secrétaire à la défense, Lloyd Austin, a promis que Washington «répondra toujours au moment et à l’endroit de son choix».

Le gouvernement Biden, l’armée américaine et les médias américains ont tenté de présenter les frappes américaines en Syrie comme des «représailles» à «l’agression iranienne». Cela est tout simplement frauduleux et cynique.

Les forces américaines occupent illégalement le territoire syrien. Quelque 900 soldats américains, rejoints par un nombre encore plus important d’entrepreneurs militaires américains, sont engagés dans cette occupation, complétée par des forces spéciales qui entrent et sortent du pays par rotation. Ils sont déployés dans les champs pétroliers du nord-est de la Syrie, privant le pays ravagé par la guerre d’un accès à l’énergie dont il a tant besoin, et à al-Tanf, dans le sud, où ils entravent la circulation sur l’autoroute Bagdad-Damas, une autoroute d’une importance stratégique.

Le caractère criminel de cette occupation, ainsi que la tentative de Washington d’étrangler économiquement le pays par des sanctions, n’a fait que s’accentuer avec le catastrophique tremblement de terre turco-syrien du mois dernier qui a tué des milliers de Syriens et forcé des millions d’autres à quitter leur foyer.

Poursuivie sous le prétexte de combattre les restes d’ISIS (État islamique), l’occupation est en réalité dirigée contre le gouvernement syrien, les milices soutenues par l’Iran et l’armée russe, qui ont joué ensemble des rôles décisifs dans la défaite d’ISIS. ISIS était lui-même le produit de la guerre orchestrée par la CIA pour un changement de régime en Syrie dans laquelle Washington a déversé des milliards de dollars d’armes et d’argent dans les milices liées à Al-Qaïda, favorisant un conflit qui a tué des centaines de milliers de personnes et transformé des millions d’autres en réfugiés.

L’occupation américaine est la continuation de cette guerre sauvage. Dans ces conditions, les actions armées de ceux qui résistent à cette occupation et cherchent à chasser les États-Unis de Syrie et à restaurer la souveraineté du pays sont tout à fait légitimes.

L’occupation fait suite à trois décennies d’intervention militaire impérialiste américaine dans la région qui a décimé des sociétés entières, non seulement en Syrie, mais aussi en Irak, en Afghanistan, en Libye et au Yémen, et tué et mutilé des millions de personnes.

Elle vise également à soutenir la guerre par procuration menée par les États-Unis et l’OTAN en Ukraine en s’opposant à la Russie, dont l’armée est intervenue pour soutenir le gouvernement syrien à Damas et reste déployée dans ce pays. Le danger d’une confrontation militaire directe a été souligné cette semaine par des allégations du commandement militaire américain selon lesquelles la Russie a violé un accord antérieur en envoyant des jets armés au-dessus de la garnison américaine d’al-Tanf tous les jours pendant le mois de mars selon eux.

En même temps, Washington s’appuie de plus en plus sur sa présence militaire au Moyen-Orient pour s’opposer à l’influence économique et politique croissante de la Chine dans cette région.

La Chine est devenue le premier investisseur au Moyen-Orient, et le total de ses échanges commerciaux avec la région dépasse de loin celui des États-Unis. En 2021, les importations chinoises en provenance du Moyen-Orient – essentiellement du pétrole et du gaz – étaient quatre fois supérieures à celles des États-Unis (130 milliards de dollars contre 34 milliards de dollars), et les exportations chinoises étaient presque trois fois supérieures à celles des États-Unis (129 milliards de dollars contre 48 milliards de dollars). Rien qu’en 2021, les investissements chinois dans la région ont augmenté de 360 %.

Vingt ans après que les États-Unis ont lancé leur guerre criminelle contre l’Irak, le pays figure parmi les principaux partenaires de l’initiative chinoise de la Nouvelle route de la soie, dans le cadre d’un accord qui échange l’exportation de 100.000 barils de pétrole irakien par jour contre de grands projets de construction financés par la Chine.

Ce n’est guère une coïncidence si l’éruption soudaine de l’«activité cinétique» américaine en Syrie a eu lieu dans le sillage de Pékin négociant un rapprochement entre l’Arabie saoudite, qui était auparavant un allié clé de Washington et soutenait les milices liées à Al-Qaïda en Syrie, et l’Iran, qui a soutenu Damas contre elles.

L’escalade militaire américaine intervient également quelques jours après l’annonce d’un accord entre la Syrie et l’Arabie saoudite sur le rétablissement des relations diplomatiques, et après que le président syrien Bachar al-Assad a effectué des visites d’État aux Émirats arabes unis et à Oman, tous deux auparavant alignés sur Washington et sa campagne de changement de régime en Syrie. Les gouvernements arabes reprennent les uns après les autres leurs relations avec la Syrie, malgré les fortes pressions exercées par les États-Unis.

Le recours de Washington à la force militaire au Moyen-Orient pour tenter de compenser le déclin de la domination économique et politique de l’impérialisme américain dans la région met à nue l’hypocrisie flagrante de toute sa propagande sur la défense des «droits de l’homme» et de la «souveraineté nationale» en Ukraine.

La guerre par procuration menée par les États-Unis et l’OTAN contre la Russie représente la poursuite et la dangereuse escalade des décennies d’agression militaire américaine contre les populations de Syrie, d’Irak et du reste de la région, dont la souveraineté et les droits de l’homme ont été anéantis par des bombardements de «choc et d’effroi», une occupation de type colonial, des massacres et la torture.

La Cour pénale internationale (CPI), qui a inculpé le président Vladimir Poutine en tant que criminel de guerre pour l’évacuation par la Russie d’enfants des zones de guerre en Ukraine n’a rien dit en ce qui concerne les violations flagrantes du droit international commises par Washington en continuant d’occuper et de bombarder la Syrie, sans parler des plus de 30 ans de crimes impérialistes américains qui l’ont précédée.

Tous les présidents américains des trois dernières décennies méritent d’être jugés dans le cadre d’un procès pour crimes de guerre pour les guerres contre l’Irak, l’Afghanistan, la Libye, la Syrie et le Yémen, ainsi que pour les régimes de sanctions unilatérales qui ont coûté la vie à des millions de personnes, et pour les programmes criminels d’assassinat et de torture de la CIA.

Washington, qui ne reconnaît pas la compétence de la CPI, est allé jusqu’à adopter une législation qui menace d’utiliser la force militaire contre La Haye si la Cour tentait de juger des personnalités militaires ou politiques américaines, tout en imposant aux juristes de la CPI des sanctions semblables à celles utilisées contre les terroristes et les trafiquants de drogue pour avoir même osé enquêter sur les accusations de crimes de guerre américains en Afghanistan.

Alors que le Pentagone s’est détourné des décennies de guerres d’agression au Moyen-Orient pour se concentrer sur la préparation de nouvelles guerres nucléaires potentiellement catastrophiques pour le monde contre la Russie et la Chine, il a toujours la capacité de déchaîner une violence massive contre les populations de Syrie, d’Iran, d’Irak et du reste de la région.

(Article paru en anglais le 25 mars 2023)

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