Lutte des travailleurs du secteur public au Québec:

Combattre la pandémie de COVID-19 doit devenir un enjeu central

Depuis plus de deux semaines, les urgences du Québec connaissent un taux d’occupation record. Le 8 janvier, le taux moyen pour la province a monté à 137%, le plus haut depuis janvier 2020 alors qu’il avait atteint 130%. Au moment d’écrire ces lignes, le taux est de 133%.

C’est donc dire que les urgences sont actuellement plus débordées qu’à n’importe quel moment depuis le début de la pandémie de COVID-19, y compris pendant la vague Omicron de décembre 2021 et janvier 2022, alors que plus de 2 millions de Québécois ont été infectés par le coronavirus.

Suivant la politique du silence imposée par la classe dirigeante pour tenir la population dans l’ignorance des conséquences de sa politique meurtrière du «vivre avec le virus», ni le gouvernement droitier de la Coalition avenir Québec (CAQ), ni les médias capitalistes n’ont tenté d’expliquer cet engorgement, si ce n’est que d’évoquer vaguement «les virus respiratoires» comme une cause.

Des enseignants de l’école secondaire Westmount à Montréal ont organisé une action en janvier 2021 pour protester contre la décision insouciante du gouvernement du Québec de rouvrir les écoles en pleine deuxième vague de la pandémie [Photo: Robert Green]

La capacité de l’élite dirigeante à cacher les immenses dangers posés par la pandémie à des masses de gens, ainsi que son indifférence totale face à ces dangers, dépend avant tout de la complicité des appareils syndicaux – en particulier, des syndicats du secteur public censés représenter les travailleurs de première ligne, notamment en santé et en éducation, qui sont les plus exposés au virus mortel.

La recrudescence des cas de COVID en novembre et en décembre dernier a coïncidé avec le cœur des négociations d’une nouvelle convention collective entre le gouvernement de la CAQ et les syndicats représentant quelque 600.000 travailleurs du secteur public, dont les enseignants, les infirmières et d’autres travailleurs du système de santé.

Tout juste avant Noël, malgré l’immense appui du public pour les travailleurs, les syndicats du Front commun et la Fédération autonome de l’Enseignement (FAE) ont conclu des ententes à rabais qui trahissent les demandes essentielles de leurs membres, notamment quant au rattrapage salarial et à l’amélioration des conditions de travail. De plus, les syndicats n’ont jamais évoqué la COVID-19 pendant le processus bidon de «négociations», alors qu’il s’agit d’une question cruciale qui aurait dû être un enjeu central.

En effet, les travailleurs scolaires et du réseau de la santé ont été particulièrement impactés par le virus. Des centaines de milliers d’entre eux ont été infectés dans leur milieu de travail, souvent à plusieurs reprises, depuis quatre ans, forçant des milliers de jours d’absence dans des réseaux déjà à court de personnel.

Au plus fort de la vague Omicron en janvier 2022, jusqu’à 1.400 enseignants étaient absents chaque jour en raison de la COVID-19. Du côté des infirmières, près de 20% des effectifs ont dû s’isoler par moment. Selon une étude de l’INSPQ, 10% des travailleurs de la santé souffrent ou ont souffert de la «COVID longue», soit près de 40.000 personnes.

Ces milliers d’absences ont contribué de façon importante à la pénurie de personnel dans les écoles et dans le réseau de la santé. Cette situation et les autres répercussions de la COVID-19, dont l’afflux de milliers de malades additionnels dans les hôpitaux, ont accentué la crise des systèmes publics de santé et d’éducation. Après des décennies de coupes budgétaires et d’austérité capitaliste, la COVID-19 a poussé les services publics au bord du gouffre, une situation qui se perpétue comme le montre la situation actuelle dans les urgences.

La responsabilité des syndicats dans la mise à l’écart de la pandémie de COVID-19 en tant qu’enjeu majeur de la lutte des employés du secteur public s’explique par leur soutien total, dès le début, à la politique meurtrière d’infections de masse adoptée par le gouvernement Legault avec la bénédiction du gouvernement libéral fédéral de Justin Trudeau.

Mené par le multimillionnaire ancien PDG d’Air Transat François Legault, le gouvernement de la CAQ a imposé des mesures limitées, dont un confinement temporaire, au début de la pandémie pour éviter une rébellion ouverte des travailleurs, particulièrement dans le milieu de la construction.

Dès la fin du printemps 2020, le gouvernement Legault a procédé à la réouverture hâtive des écoles. Et après la mise au point des vaccins dans les premiers mois de 2021, il a ouvertement adopté une politique «d’immunité collective» et de réouverture totale de l’économie afin de préserver les profits de la classe capitaliste.

Avec l’arrivée du variant Omicron supposément plus bénin, le gouvernement Legault a ouvertement adopté une politique d’infection de masse et éliminé toutes les mesures pour mitiger les effets du virus. Depuis le mois de mai 2022, la vaccination contre la COVID est la seule mesure sanitaire encore existante, une mesure nettement insuffisante à elle seule. Le port du masque n’est plus exigé dans les établissements de santé qui posent, avec les résidences pour aînés, le plus gros risque pour les usagers.

Tout au long de la pandémie, les syndicats pro-capitalistes ont collaboré avec le gouvernement du Québec pour imposer sa politique criminelle d’infections de masse. Les premiers mois de la COVID coïncidaient avec la fin des conventions collectives dans le secteur public. Les syndicats ont accepté d’exclure largement du processus de renouvellement la question cruciale des conditions de travail (qui sont en recul constant depuis des décennies) avant d’imposer au bout du compte des contrats remplis de concessions.

Les syndicats de l’éducation ont par ailleurs joué un rôle clé pour étouffer l’opposition des travailleurs à la réouverture des écoles et forcer ceux-ci à retourner au travail sans protection adéquate contre le virus potentiellement mortel et débilitant.

Autant en éducation qu’en santé, les syndicats ont également accepté sans broncher les décrets ministériels anti-démocratiques qu’a utilisés le gouvernement Legault pour refuser à des employés épuisés des vacances nécessaires ou en forcer d’autres à travailler dans des conditions non sécuritaires – le tout sous le prétexte de «l’urgence sanitaire».

Depuis le démantèlement des dernières mesures sanitaires, les syndicats maintiennent un silence radio sur la pandémie, un silence qui s’est poursuivi pendant la dernière ronde de «négociations» du secteur public.

En s’opposant aux ententes de trahison conclues par la FAE et le Front commun, les travailleurs du secteur public doivent exiger des contrats qui incluent de pleines mesures de protection contre la COVID, dans le cadre d’une lutte pour une politique scientifique d’élimination du virus dans toute la société et à travers le monde.

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