Les États-Unis ont lancé dans la nuit de vendredi à samedi ce que les autorités ont présenté comme une campagne de plusieurs semaines ou mois au Moyen-Orient, qui vise l’Iran.
Le président américain Joe Biden a envoyé des bombardiers B-1B à capacité nucléaire depuis la base aérienne de Dyess, au Texas, pour larguer plus de 125 bombes sur 85 cibles réparties sur sept sites en Irak et en Syrie. Les États-Unis ont affirmé avoir visé des installations militaires utilisées par «la Force Qods du Corps des gardiens de la révolution islamique (CGRI) de l’Iran et des milices affiliées».
Ces frappes étaient illégales: elles ont eu lieu au mépris des gouvernements de la Syrie et de l’Irak et ont été menées sans autorisation du Congrès et sans tentative aucune d’obtenir le consentement ou l’approbation de la population américaine.
Un responsable irakien a condamné le bombardement en Irak, le qualifiant d’«inacceptable» et de «violation de la souveraineté irakienne». C’était là «une menace qui entraînera l’Irak et la région dans des conséquences imprévues». Les médias d’État syriens eux, ont condamné un acte d’«agression américaine».
L'Observatoire syrien des droits de l’homme, un organisme pro-impérialiste, a indiqué à l’AFP qu’au moins 18 personnes avaient été tuées dans l’est de la Syrie, sur une vaste portion du pays s’étendant sur plus de 62 miles [100 kilomètres].
Les États-Unis ont affirmé que ces frappes étaient une réponse à l’assassinat de trois militaires américains en Jordanie la semaine dernière. Biden s’est rendu à la base aérienne de Dover, dans son État natal du Delaware, pour assister au transfert des dépouilles des soldats. Alors qu’il prononçait une déclaration laconique de trois paragraphes, les bombardiers étaient déjà en route vers leur destination.
En réalité, la mort de ces soldats est le résultat de l’occupation militaire en cours de la région et de l’escalade militaire massive entreprise au cours des trois derniers mois.
Tout en fournissant des fonds, des armes, un soutien logistique et une couverture politique à Israël pour mener une campagne de génocide à Gaza, les États-Unis ont rempli la région de navires de guerre, d’avions et de soldats, dans le but délibéré de provoquer un conflit plus large.
En annonçant les attaques de vendredi, Biden a déclaré: «Les États-Unis ne recherchent pas le conflit au Moyen-Orient ou ailleurs dans le monde».
De telles déclarations, répétées ad nauseam jour après jour, n’ont aucun sens. Que l’impérialisme américain «recherche» ou non une guerre totale au Moyen-Orient, il ne cesse depuis des décennies de bombarder, d’affamer et d’envahir des pays dans toute la région, comme l’Irak en 2003, où il a entraîné la mort de plus d’un million de personnes.
Il est clair que les États-Unis «recherchent» l’issue de cette guerre en train de dégénérer, à savoir la réorganisation du Moyen-Orient comme partie des efforts faits par l’impérialisme américain pour soumettre la Russie et la Chine.
À cette fin, Biden a clairement indiqué que la nouvelle offensive militaire du Moyen-Orient se poursuivrait sur une longue période. Les bombardements, a-t-il déclaré, «se poursuivront au moment et à l’endroit de notre choix». Puis il a ajouté une autre menace: «Que tous ceux qui cherchent à nous faire du mal le sachent: Si vous faites du mal à un Américain, nous répondrons».
«Il s’agit d’une première série de réponses», a déclaré John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison-Blanche, ajoutant qu’il y aurait «d'autres réponses».
Autrement dit, ces frappes sont la poursuite et l’escalade de la «guerre perpétuelle» de l’impérialisme américain au Moyen-Orient.
La couverture médiatique américaine des attaques s’est faite sans aucune critique, répétant la justification fallacieuse qu’il s’agissait de «représailles» et d’une «défense». Dans la mesure où l’establishment politique a fait des critiques, c’était pour dénoncer le fait que Biden n'en a pas fait plus.
Dans un éditorial intitulé «Biden va-t-il enfin dissuader l’Iran»? le Wall Street Journal a accusé le président de montrer trop de «retenue» et appelé la Maison-Blanche à utiliser «suffisamment de force contre les bonnes cibles afin que les troupes américaines ne servent plus d’exercices de tir pour l’ennemi».
Des membres éminents de l’establishment politique américain ont rapidement approuvé les attaques. Le sénateur Jack Reed, président démocrate de la Commission des forces armées du Sénat, les a soutenues publiquement.
Ces bombardements massifs à longue portée ont clairement démontré le type de frappes que les États-Unis pourraient utiliser contre des cibles à l’intérieur de l’Iran. «Ce qu’il y a de bien avec le bombardier américain c’est que nous pouvons frapper n’importe où dans le monde au moment de notre choix», a déclaré le porte-parole du Pentagone, le général Douglas A. Sims, à la presse dans la nuit de vendredi à samedi. Ce qui est crucial c’est que ces bombardiers sont capables d’effectuer exactement le même type de frappes, mais avec des charges nucléaires.
Si les frappes n’ont pas directement visé le territoire iranien, elles ont été précédées d’une nouvelle série de sanctions et d’inculpations pénales imposées par la Maison-Blanche contre des officiers et des responsables du Corps des gardiens de la révolution islamique.
La Maison Blanche a indiqué que des avions jordaniens devaient se joindre aux prochaines frappes, ce qui montre à quel point le Moyen-Orient est entraîné dans le maelström d'une guerre régionale de plus en plus étendue.
Les attaques américaines lancées contre la Syrie et l’Irak ont eu lieu alors que le secrétaire d’État américain Antony Blinken poursuit sa tournée dans la région ; celle-ci comprend la semaine prochaine des escales en Arabie saoudite, en Égypte, au Qatar, en Israël et en Cisjordanie.
Blinken a affirmé que son objectif était la négociation d’une «pause humanitaire qui permettra une livraison soutenue et accrue de l’aide humanitaire aux civils de Gaza».
En réalité, le voyage de Blinken vise à faciliter l’extension de la guerre régionale provoquée par les impérialistes et à renforcer le soutien à Israël, qui mène une guerre d’extermination contre la population de Gaza avec le soutien des États-Unis.
Le 1er février, le directeur général de l'Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a déclaré lors d'une réunion d'information que «plus de 100.000 habitants de Gaza sont soit morts, soit blessés, soit portés disparus et présumés morts».
Tedros faisait référence à un rapport publié le 13 janvier par l’observatoire Euro-Med, qui indiquait que 92 pour cent des personnes tuées étaient des civils. Selon les chiffres d’Euro-Med, 32.246 habitants de Gaza étaient soit morts, soit portés disparus depuis plus de deux semaines et présumés morts. Parmi eux, 12.660 étaient des enfants et 6.860 des femmes.
Israël a partiellement ou entièrement détruit plus de 190.000 maisons à Gaza, ce qui représente plus de 60 pour cent du parc immobilier. Jeudi, le New York Times a publié un article faisant état de la démolition systématique de bâtiments à Gaza, notant qu’«au moins 33 démolitions contrôlées ont détruit des centaines de bâtiments — y compris des mosquées, des écoles et des sections entières de quartiers habités — depuis novembre».
Le Times note que «pour effectuer ces démolitions, les soldats pénètrent dans les structures ciblées pour y placer des mines ou d’autres explosifs, puis quittent les lieux pour appuyer sur la gâchette à distance en sécurité».
La semaine dernière, la Cour internationale de justice a estimé que le gouvernement israélien pouvait vraisemblablement commettre un génocide et lui a ordonné d’empêcher de nouveaux actes et déclarations génocidaires. Mais au cours de la semaine qui a suivi, l’armée israélienne a tué au moins 874 Palestiniens.
D’autres preuves d’exécutions sommaires massives sont venues s’y ajouter, notamment la découverte cette semaine d’un charnier de 30 personnes menottées et aux yeux bandés qui semblent avoir été sommairement exécutées.
La poursuite et l’escalade du génocide à Gaza et la nouvelle opération massive de bombardement des États-Unis dans tout le Moyen-Orient montrent clairement que ni la Cour internationale de justice ni les Nations unies ne sont en mesure de mettre fin au bain de sang perpétré au Moyen-Orient par les puissances impérialistes.
Pour s’opposer à cette explosion de barbarie impérialiste, il faut mobiliser les travailleurs et les jeunes du monde entier sur la base d’un programme socialiste.
(Article paru en anglais le 3 février 2024)