L’armée américaine prépare de nouvelles offensives en Irak et en Syrie

Alors que les tensions augmentent avec la Russie en Europe de l’Est et avec la Chine en Asie, les États-Unis ont lancé une nouvelle guerre en Lybie et préparent des opérations militaires accrues au Moyen-Orient censées viser le groupe État islamique (ÉI) en Iraq et en Syrie.

Lors d’une entrevue avec USA Today, le lieutenant-général Jeffrey Harrigan de l’aviation américaine a confirmé que la coalition dirigée par la États-Unis planifiait des offensives coordonnées contre les deux villes qui sont sous le contrôle de l’ÉI: Mosul dans le nord de l’Irak et Raqqa en Syrie. «Si nous parvenions à mener des opérations simultanées et synchroniser l’affaire Mosul avec l’affaire Raqqa, imaginez le problème que ça poserait à [l’ÉI]», a-t-il déclaré.

Harrigan, qui a récemment pris le commandement des opérations aériennes au Moyen-Orient, a dit que durant les derniers mois, des avions de guerre de la coalition visaient des cibles dans les deux villes. «L’équipe se concentre à rassembler la force de frappe nécessaire pour réaliser cette opération simultanée, parce que nous y voyons d’énormes bénéfices», a-t-il déclaré, faisant référence à la préparation de troupes anti-ÉI en Iraq et en Syrie.

USA Today rapportait que des troupes américaines étaient déjà en opération en Syrie: « Les forces d’opérations spéciales aident à identifier et organiser les groupes rebelles syriens pour en faire une force capable de combattre l’État-Islamique [ÉI]. La force est à présent composée d’environ 30.000 combattants et a déjà remporté de surprenantes victoires, particulièrement autour de la ville de Manbij dans le Nord.»

En Irak, les préparatifs des États-Unis pour reprendre Mosul sont en cours depuis des mois. Mosul est la deuxième ville du pays et contient encore une population de près d’un million d’habitants, malgré un exode de masse. Des forces gouvernementales irakiennes ont pris la base aérienne de Qyyarah le mois dernier, qui se situe 60 kilomètres au sud de Mosul, et qui est en train d’être transformée en centre majeur des opérations pour l’offensive.

Les États-Unis ont amené près de 400 soldats pour effectuer des réparations et fournir des conseils militaires, de la logistique, des communications et des renseignements aux forces terrestres irakiennes, qui ont déjà commencé à prendre des villages et villes au sud de Mosul. Les pistes d’atterrissage sont en train d’être réparées et étendues afin de pouvoir accueillir de plus gros avions de transport de troupes, ainsi que des avions-chasseurs américains et irakiens et des hélicoptères de combat.

Les forces anti-ÉI qui se préparent pour l’offensive de Mosul forment une coalition instable composée de milices kurdes (les peshmergas), de troupes régulières de l’armée irakienne, et des Forces de mobilisation populaire dominées par des chiites et connues pour leurs atrocités contre des civils sunnites durant la bataille de Fallujah. Des inquiétudes concernant la possibilité des combats sectaires et d’abus des droits de l’homme après la reprise de Mosul ont déjà été soulevées.

Le lieutenant-général Sean MacFarland, le commandant en chef américain en Syrie et en Irak, a déclaré cette semaine: «Nous tenterons de reprendre Mosul aussi rapidement que possible. Il s’agit d’un million de personnes qui vivent sous un régime oppresseur et des conditions terribles… Les forces de sécurité irakiennes autour de Qayyarah sont maintenant en position d’entamer ce processus et nous tenterons de l’accélérer autant que possible mais je ne préfère pas donner un échéancier précis.»

MacFarland, qui doit être remplacé, a déclaré que les États-Unis étaient en train de gagner la guerre contre l’ÉI, ayant réduit son territoire de plus de la moitié. «Bien qu’il ne s’agisse pas d’une mesure de succès et qu’il est difficile de le confirmer, nous estimons que dans les 11 derniers mois, nous avons tué environ 25.000 ennemis combattants.» Il n’a pas offert d’estimation du nombre de civils tués lors des combats ou des bombardements aériens des États-Unis.

Le général a également minimisé le rôle des forces militaires américaines, déclarant qu’elles ne jouaient qu’un rôle de « conseil et assistance » à distance et dans des endroits spécifiques. Il est toutefois évident que des troupes américaines sont de plus en plus impliquées sur le front.

Dans un article publié le mois dernier, le Washington Post écrivait: «Si les Forces spéciales américaines agissent déjà à titre de conseil, au plus bas niveau, auprès des troupes d’élite de contre-terrorisme et des peshmergas kurdes, la mission à Qayyarah marque la première fois depuis 2014 que des forces américaines conseillent des bataillons de l’armée irakienne sur le champ de bataille.

Une petite équipe d’ingénieurs de combat américains a accompagné des forces irakiennes le 20 juillet pour encadrer la construction d’un pont temporaire sur le Tigre au sud-ouest de la ville de Qayyarah. D’après le Post, les troupes américaines ont passé quelques heures sur place dans une «mission aux objectifs précis et peu exposée au champ de bataille» – un modèle pour «le rôle restreint que les commandants américains envisagent pour les troupes terrestres dans l’opération à Mosul».

Les généraux américains sont clairement inquiets que la mort de soldats américains n’attise le sentiment anti-guerre aux États-Unis, mais ils n’ont pas exclu d’envoyer des troupes au front. «En privé, d’autres officiers de haut rang sont encore plus francs et font référence aux hommes qu’ils ont perdus lors de déploiements précédents en Irak. Cette fois-ci, ils n’enverront des Américains au front que si la mission plus large est en péril», a fait savoir le journal.

Le lancement de nouvelles offensives en Iraq et en Syrie est également motivé par des calculs politiques. Hillary Clinton et le Parti démocrate attaquent de plus en plus le nominé républicain Donald Trump comme étant inepte pour être le commandant en chef des forces américaines. Une victoire militaire substantielle au Moyen-Orient, peu importe le coût en vies syriennes ou irakiennes, a le potentiel de renforcer Clinton.

Cette question est ouvertement discutée dans des cercles de Washington. Un article sur le site Politico en date du premier août, intitulé «Préparez-vous à une "surprise d’octobre" d’Obama en Iraq», suggère qu’ «une victoire militaire majeure en Irak sous la direction des États-Unis pourrait être servie au public américain cet automne, lorsque les électeurs décident qui sera le prochain président de la nation».

L’article cite des officiers américains anonymes de haut rang qui insistaient pour dire que la date de lancement d’une offensive à Mosul n’était pas liée à la politique, sans toutefois en exclure la possibilité. «Si Mosul est reprise», note l’article «ce serait un triomphe politique pour Barack Obama et profiterait à la nominée de son parti, Hillary Clinton, en réfutant les accusations des républicains que l’administration Obama n’aurait pas été assez ferme contre l’État islamique».

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