Deuxième partie: stalinisme, communisme et antisémitisme

Un spectre hante l'Europe: le mythe du judéo-bolchevisme, de Paul Hanebrink

Paul Hanebrink: Un spectre hante l'Europe. Le mythe du judéo-bolchevisme, Harvard University Press 2018.

Hanebrink présente son livre comme une tentative de comprendre pourquoi, même si « le communisme a disparu... l'idée du judéo-bolchevisme refuse de disparaître ». Cette présentation, fondée sur la fausse équation entre stalinisme et communisme, conduit à une omission significative et trompeuse dans sa discussion sur la réémergence de l'antisémitisme en Europe de l'Est après la Seconde Guerre mondiale et dans le monde aujourd'hui.

Faisant écho aux travaux de gens tels que le sociologue polonais-américain anticommuniste Jan Tomasz Gross, la réponse de Hanebrink à la question de la persistance de l'antisémitisme se résume en grande partie aux préjugés populaires présumés insurmontables contre les Juifs d'Europe orientale et centrale que les staliniens ont dû prendre en compte. Les données historiques, cependant, contredisent complètement ce cadre. Le mouvement socialiste européen avait une longue et fière tradition d'opposition de principe à l'antisémitisme, qui a culminé dans la lutte des bolcheviks contre les pogroms anti-juifs de 1917 à 1922, une lutte que Hanebrink ignore complètement.

Les révolutions russes de 1917 ont accordé pour la première fois aux Juifs de l'ancien empire russe les droits démocratiques complets, mettant fin à des décennies de discrimination soutenue par l'État. Les révolutionnaires marxistes avaient depuis longtemps compris la lutte contre l'antisémitisme comme une composante cruciale de la lutte pour une conscience socialiste et internationaliste dans la classe ouvrière. Lénine, en particulier, a écrit de nombreux articles sur ce sujet et insisté sur une ligne bolchévique intransigeante dans la lutte contre l'antisémitisme. (Voir aussi : Anti-Semitism and the Russian Revolution)

Conscients des préjugés antisémites, en particulier au sein de la population rurale, qui se prêtaient à la manipulation et à la mobilisation des forces contre-révolutionnaires qui s'opposaient à l'Armée rouge, les dirigeants militaires soviétiques ont vivement poursuivi tous ceux qui avaient commis des crimes contre les Juifs. Le premier gouvernement soviétique a également déployé des efforts considérables pour distribuer de la documentation éducative sur le sujet, y compris parmi la population rurale. Tout au long des années 1920, l'Union soviétique a été le seul État au monde à parrainer des écoles en yiddish, ainsi que des établissements d'enseignement spécialement consacrés à l'étude de l'histoire, de la culture et de la langue juives.

Sur cette base, les bolcheviks et l'Union soviétique ont établi leur immense autorité et leur prestige parmi les masses juives au plan international. C'est aussi la raison pour laquelle la politique antisémite menée par les gouvernements staliniens après la guerre ont produit tant d'incrédulité et d'horreur.

Un changement aussi profond ne peut s'expliquer sans une discussion sur l'émergence du stalinisme. Les germes d'un renouveau de l'antisémitisme ont été semés avec l'orientation de plus en plus nationaliste de la politique soviétique, intérieure et étrangère, sur la base du programme stalinien du "socialisme dans un seul pays". Bien qu'avec hésitation et lentement, les staliniens ont déployé l'antisémitisme dans leur lutte contre l'Opposition de gauche sous la direction de Léon Trotsky, qui s'opposait à la trahison nationaliste de la révolution et insistait pour une orientation vers une révolution socialiste mondiale.

L'association entre l'Opposition de gauche "juive" et son programme d'internationalisme révolutionnaire a été la base politique de la résurgence du vieux trope nationaliste russe et antisémite du "juif cosmopolite et sans racines". C'est précisément parce que le stalinisme représentait, non pas une extension, mais une réaction contre la révolution communiste de 1917, que le mythe judéo-bolchevique a trouvé une base fertile dans les partis et les bureaucraties staliniens.

Expliquant cette évolution en 1937, Trotsky souligna la longue tradition du chauvinisme russe, historiquement associé à l'antisémitisme, au sein de la paysannerie russe, de sections de l'intelligentsia et de la petite bourgeoisie urbaine, ainsi que dans les couches les plus arriérées de la classe ouvrière. Ce sont ces couches que la bureaucratie a délibérément ameutées et mobilisées contre l'opposition de gauche. Trotsky écrit :

Afin de démontrer plus clairement aux travailleurs les différences entre le cours « nouveau » et l’« ancien », on élimina les Juifs des postes de responsabilité dans le parti et dans les soviets, y compris ceux qui étaient dévoués à la ligne de la majorité. Non seulement dans les campagnes, mais aussi dans les usines de Moscou, le harcèlement de l’Opposition prit souvent, dès 1926, un caractère tout à fait ouvertement antisémite. Nombre d’agitateurs affirmaient effrontément que « les Juifs s’ameutaient ». Je reçus des centaines de lettres qui déploraient les méthodes antisémites utilisées dans la lutte contre l’Opposition. Lors d’une réunion du bureau politique, je fis passer un mot à Boukharine : « Vous n’êtes pas sans savoir que, même à Moscou, on utilise dans la lutte contre l’Opposition les méthodes démagogiques des Cent-Noirs, l’antisémitisme, etc.»

J’écrivais encore: «Il ne s’agit pas de cas individuels, mais d’une agitation systématique parmi les secrétaires du parti dans les grandes entreprises de Moscou. Acceptez-vous d’aller enquêter avec moi sur un cas de ce genre à l’usine Skorokhod ? J’ai connaissance d’une multitude d’autres exemples de ce genre. » Boukharine répondit : « D’accord, allons-y. » C’est en vain que j’essayai de lui faire tenir sa promesse. Staline le lui interdit formellement.

Au cours des mois où se préparait l’exclusion de l’Opposition de gauche des rangs du parti, les arrestations, les déportations (dans la seconde moitié de 1927), l’agitation antisémite prirent un rythme effréné. Le mot d’ordre « Il faut écraser l’Opposition » avait souvent la résonance de l’ancien mot d’ordre : « Il faut écraser les Juifs pour sauver la Russie. » L’affaire alla si loin que Staline fut obligé de prendre position dans une déclaration écrite et qui fut publiée, dans laquelle il disait : « Nous nous battons contre Trotsky, Zinoviev et Kamenev non parce qu’ils sont juifs, mais parce qu’ils sont dans l’opposition, etc. » Pour tout individu qui raisonnait politiquement, il était absolument clair que cette déclaration volontairement ambiguë dirigée contre les excès de l’antisémitisme était délibérément destinée à l’entretenir. « N’oubliez pas que les dirigeants de l’Opposition sont des Juifs » : tel était le sens de la déclaration de Staline publiée dans tous les journaux soviétiques. (Thermidor et l'antisémitisme - Marxists Internet Archive)

La question de l'antisémitisme a refait surface lors de la Grande Terreur des années 1930, ce que Hanebrink omet complètement. La terreur a liquidé la quasi-totalité des cadres et des dirigeants du Parti bolchevique de 1917 : quelque 30 000 Opposants de gauche et des centaines de milliers de révolutionnaires, d'intellectuels et d'ouvriers marxistes de toute l'Europe, notamment d'Allemagne, de Pologne, de Yougoslavie et des États baltes.

Les procès de Moscou de 1936 et 1937 contre les dirigeants les plus éminents de la Révolution d'octobre avaient des connotations antisémites, comme le soulignait Trotsky à l'époque : sur les 16 accusés du premier Procès de Moscou, pas moins de 10 étaient Juifs ; dans le second, 8 des 17 accusés étaient d'origine juive. De plus, dans les dénonciations de Lev Sedov, fils et proche collaborateur de Trotsky, assassiné à Paris par un agent stalinien, la presse soviétique a soudain commencé à utiliser le nom " Bronstein ", un nom que Lev Sedov n'avait jamais utilisé, mais qui était devenu un mot code pour des insultes antisémites contre Trotsky et le trotskysme.

Les développements ultérieurs confirmeraient pleinement l'analyse de Trotsky. Un transfuge révéla plus tard qu'en 1939, un décret confidentiel du Comité central du parti avait rétabli des quotas pour l'admission des Juifs dans les établissements scolaires. (Ces quotas deviendront finalement une politique officielle de l'État soviétique). Les Juifs ont également été retirés des principaux organes représentatifs du gouvernement soviétique et de son corps diplomatique.

Ces tendances ont été exacerbées par la guerre. Alors que les journalistes de l'Armée rouge ont été les premiers à documenter et à rendre compte du génocide de la population juive d'Europe de l'Est par les nazis, nombre de leurs articles n'ont été publiés que sous une forme censurée. Le "Livre noir" des juifs d'Europe de l'Est, compilé par les écrivains et journalistes Vasily Grossman et Ilya Ehrenburg, a été la première documentation complète de l'Holocauste en Europe de l'Est. Pourtant, presque dès son impression en URSS en 1946, il a été interdit et les exemplaires imprimés détruits.

Grossman en 1945

Toutefois, bien que la discrimination antisémite soit de plus en plus intégrée dans la politique de l'État, il n'y avait toujours pas d'agitation ouverte à caractère antisémite. De plus, comme le reconnaît Hanebrink, pour des masses de travailleurs et d'intellectuels, y compris les survivants de l'Holocauste, le fait que l'Armée rouge ait libéré du fascisme les camps de la mort nazis et l'Europe de l'Est dans son ensemble a énormément renforcé le prestige de l'URSS.

En Pologne, le gouvernement stalinien a d'abord suivi une voie qui différait nettement de sa politique ouvertement antisémite ultérieure. Non seulement les Juifs jouissaient de droits démocratiques égaux, mais jusqu'en 1948, le gouvernement a accordé une importante autonomie culturelle, parrainé divers programmes culturels en yiddish et soutenu le travail du Comité central des Juifs de Pologne qui, entre autres, a découvert les archives cachées des travaux clandestins d'Emanuel Ringelblum dans le Ghetto de Varsovie.

Ce n'est qu'avec le déclenchement de la guerre froide en 1947-1948 que l'antisémitisme s'est ouvertement répandu en URSS et en Europe de l'Est. En Union soviétique, Staline a lancé une nouvelle série de purges, cette fois de caractère ouvertement antisémite, visant surtout l'intelligentsia.

Les vestiges de la vie yiddish en URSS ont été détruits, avec la dissolution par l'État du Comité antifasciste juif et le meurtre de son chef, l'acteur Solomon Mikhoels, en 1948 ; et le meurtre subséquent des principaux auteurs yiddish de l'URSS. Les Juifs étaient dépeints comme des "cosmopolites" et des "sionistes". Des développements similaires ont eu lieu en Tchécoslovaquie, en Roumanie, en Yougoslavie, en Hongrie et dans d'autres pays. (En même temps, l'Union soviétique soutenait la création de l'État d'Israël, montrant par là qu'il ne s'agissait pas d'antisionisme mais d'antisémitisme). Les purges n'ont pris fin qu’après la mort de Staline en mars 1953.

Les purges ont eu lieu dans des conditions de crise sociale et politique grave. Pendant des années après la guerre, la grande majorité de la population soviétique et est-européenne a continué à vivre dans la famine ou au bord de la famine, tandis que la bureaucratie jouissait de vastes privilèges sociaux. La cause sous-jacente des purges était la crainte profonde dans la bureaucratie que ces conditions ne conduisent à une réémergence de tendances de gauche au sein de l'intelligentsia et de la classe ouvrière, qui serait dirigée contre la bureaucratie stalinienne. Comme George Kennan, l'architecte de la politique impérialiste américaine pendant la guerre froide, l'a très bien reconnu, « Trotsky, et tout ce que Trotsky représentait, était la vraie peur de Staline ».

Et, en effet, à la fin des années 1940 et au début des années 1950, une suite de groupes de jeunes de gauche est apparue en URSS. Plusieurs de ces groupes ont proclamé comme partie de leur programme et revendications le retour de l'URSS et du parti au "vrai léninisme" qu'ils estimaient avoir été trahi par le parti. Sur le plan politique, le plus important d'entre eux était l'Union pour la lutte pour la cause de la révolution, qui cherchait à aligner son programme sur les perspectives de Léon Trotsky, même si presque aucun de ses écrits n'était disponible pour eux.

Fondé en 1950 par un groupe de jeunes de 16/17 ans, il lisait Marx, Engels, l’Etat et Révolution de Lénine et Dix jours qui ébranlèrent le monde de John Reed. Leur chef, Boris Slutsky, était le fils d'un partisan de Trotsky, qui était tombé pendant la Seconde Guerre mondiale. Grâce à la bibliothèque de son père, Slutsky avait obtenu le Testament de Lénine, ainsi que des écrits de Trotsky qu'il considérait, selon l'un des membres survivants du groupe, comme la « plus grande figure historique ».

Dirigeants de l’Union de lutte pour la cause de la révolution

Slutsky était déterminé à consacrer sa vie à la « lutte contre la strate étatique soviétique existante et pour la résurrection de la vérité historique sur Trotsky » qui avait « souffert pour la cause de la 'révolution mondiale' ». L'objectif du groupe était de « préparer le cadre pour la révolution mondiale imminente ». [2]

Le groupe fut violemment réprimé et ses dirigeants exécutés en 1952. Plusieurs de leurs membres étaient juifs, et les registres d'interrogatoire montrent que pour le NKVD, les accusations de "trotskysme" et de "cosmopolitisme" étaient étroitement liées.

Des motivations et une dynamique politiques similaires sous-tendaient les campagnes antisémites des bureaucraties de toute l'Europe de l'Est. La promotion d'un antisémitisme virulent, surtout en Pologne, a toujours coïncidé avec une résurgence des luttes ouvrières, que ce soit en 1956, année de la Révolution hongroise et d'un soulèvement en Pologne, ou en 1968, année où une vague de luttes ouvrières à l'échelle internationale a secoué tant l'impérialisme que les bureaucraties staliniennes.

La composition sociale de la bureaucratie et des partis staliniens contribua aussi de plus en plus à l'épanouissement des conceptions antisémites. Leurs directions d'après-guerre étaient constituées de ceux qui avaient contribué à la mise en œuvre de la Grande Terreur, et les partis eux-mêmes recrutaient, dans une large mesure, des éléments de l'intelligentsia nationaliste et de la population rurale qui avaient une longue tradition antisémite.

En d'autres termes, ce n'est pas malgré l'effondrement du "communisme" que le "mythe judéo-bolchevique" est resté bien vivant. Au contraire, c'est précisément parce que, sous forme du stalinisme, une contre-révolution nationaliste a eu lieu, dirigée contre le programme marxiste et internationaliste de la révolution de 1917, que les forces antisémites et nationalistes ont pu persister et prospérer dans les pays sous régime stalinien. Et c'est parce que c’est le stalinisme et non le "communisme" qui s'est effondré, que le spectre de la révolution socialiste a recommencé à hanter la bourgeoisie, l'incitant, une fois de plus, à recourir à la promotion du mélange toxique du fascisme, de l'anticommunisme et de l'antisémitisme.

Ce processus a débuté dans les années 1980. La seconde moitié des années 1980 a été marquée non seulement par la crise terminale des régimes staliniens d’Europe de l'Est et d’Union soviétique, que la bureaucratie a résolue en détruisant les derniers vestiges des États ouvriers déformés et dégénérés et en restaurant le capitalisme. Parallèlement à ce processus, des changements idéologiques fondamentaux ont eu lieu au sein de la bourgeoisie et de l'intelligentsia universitaire. Hanebrink y fait allusion, avec sa très brève discussion du "Historikerstreit" (La querelle des historiens) en Allemagne et le débat sur le livre d'Arno Mayer Why did the Heavens Not Darken (Pourquoi les cieux ne se sont pas assombris) (1988), mais son récit reste fondamentalement insuffisant.

Dans l'Historikerstreit des années 1980, l'historien allemand Ernst Nolte a délibérément utilisé les mêmes arguments que les nazis pour justifier leurs propres crimes : c'est à dire que leur politique constituait une réponse nécessaire et légitime à la menace du bolchevisme "asiatique". Les crimes des nazis, écrivait Nolte, constituaient une « réaction de peur aux actes d'anéantissement qui ont eu lieu pendant la Révolution russe ». Bien que Nolte et ses partisans aient perdu l'Historikerstreit dans les années 1980, comme le souligne Hanebrink, ses arguments révisionnistes sont devenus, depuis les années 1990, la base idéologique de tendances puissantes au sein des bourgeoisies et des gouvernements nationaux de toute l'Europe centrale et orientale[3]. Ils sont au cœur des perspectives et de la propagande d'extrême droite des gouvernements nationalistes d'extrême droite comme celui d'Orbán en Hongrie ou du Parti droit et justice (PiS) en Pologne.

Aujourd'hui, en Allemagne même, une personnalité comme Jörg Baberowski, de l'Université Humboldt de Berlin, peut proclamer que « historiquement parlant, Nolte avait raison », sans rencontrer d'opposition de la part des milieux universitaires et médiatiques. C'est une grave entache au livre de Hanebrink qu'il ne mentionne même pas le nom de Baberowski, ni celui de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) néofasciste qu’on a délibérément transformé en principal parti d'opposition au parlement allemand. [3]

Le fait que ce genre de révisionnisme néofasciste déclaré se soit établi est grandement lié à la domination des conceptions et des récits anti-marxistes et anti-socialistes du XXe siècle, y compris des sources du fascisme et de l'antisémitisme. À cet égard également, les années 1980 ont marqué un tournant. Les attaques brutales de personnalités telles que Daniel Goldhagen et Christopher Browning contre Why did the Heavens not Darken d'Arno Mayer, que Hanebrink résume très brièvement et sans prendre de position claire à leur sujet, étaient symptomatiques d'un changement beaucoup plus vaste.

Exploitant certaines faiblesses du récit de Mayer, qui insistait sur le fait que la motivation première du génocide des Juifs européens par les nazis était l'anti-bolchevisme de ces derniers, Browning et Goldhagen nièrent avec véhémence l'existence de toute relation entre la montée des Nazis et leur haine génocidaire des Juifs, et la réaction bourgeoise à la menace de révolution socialiste et au mouvement ouvrier marxiste.

Au milieu des années 1990, Browning a cherché à dépeindre l'Holocauste comme le résultat des actions et des pensées des "hommes ordinaires" dans la "société moderne". Pendant ce temps, Goldhagen, dans  Les Bourreaux volontaires de Hitler, affirmait que l'Holocauste avait été un « projet national allemand », soutenu et mis en œuvre par des « Allemands ordinaires ». Ces conceptions complètement anhistoriques et anti-marxistes ont depuis dominé les cercles universitaires. Ils ont beaucoup fait pour désarmer les travailleurs et les intellectuels face à l'assaut des forces fascistes, y compris dans les universités. [4]

Dans ce contexte, la tentative de Hanebrink d'attirer une fois de plus l'attention sur le lien entre contre-révolution et antisémitisme revêt une certaine importance. Cette tentative, cependant, est finalement tiède: ne dépassant pas le cadre de l'anticommunisme et de l'anti-marxisme qui prévalent dans le monde universitaire, le récit de Hanebrink est non seulement inadéquat et imparfait, mais il reste aussi impuissant, face aux forces droitières mêmes dont il cherche à aborder l'idéologie et la résurgence.

Si le livre de Hanebrink mérite d'être lu, il doit surtout être considéré comme un moyen d'encourager la poursuite de recherches sur les origines politiques et idéologiques de l'antisémitisme moderne et la voie à suivre dans la lutte contre le fascisme aujourd'hui. Cela nécessitera un examen beaucoup plus sérieux et approfondi que celui fourni par Hanebrink.

Première partie: Contre-révolution et antisémitisme

Notes en fin de texte

[1] Tumanova, Alla, "Shag vpravo, shag vlevo", dans : I. A. Mazus (ed.), Poka svobodoiu gorim. O molodezhnom antistalininskom dvizhenii kontsa 40-kh - nachala 50-kh godov, Moskva : Nezavisimoe izdatel'stvo "Pik" 2004, pp. 223, 337.

[2] Ernst Nolte, « Between Historical Legend and Revisionism? », dans: Forever in the Shadow of Hitler? Original Documents of the Historikerstreit, the controversy concerning the singularity of the Holocaust, traduit par James Knowlton et Truett Cates. New Jersey : Humanities Press 1993, p. 14.

[3] Il convient de noter que Paul Hanebrink n'a pas répondu à un courriel du WSWS, attirant son attention sur une subvention de $300 000 que l'Université de Princeton a récemment accordée au projet de Baberowski sur « les dictatures en transition ». Voir aussi :Des étudiants bloquent la création d'un groupe de réflexion de droite sur la «Recherche sur la dictature» à l'Université Humboldt de Berlin

[4] Pour une analyse de Goldhagen, voir David North. « The Myth of Ordinary Germans: A Critical Review of Daniel Goldhagen’s Hitler’s Willing Executioners «  dans The Russian Revolution and the Unfinished Twentieth Century [La révolution russe et le 20e siècle inachevé], Mehring Books 2014, pp. 277-300

(Article original paru en anglais le 9 juillet 2019)

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