Macron et Le Pen tentent de grappiller les électeurs de Mélenchon

Lancés dans la campagne de l’entre deux tours, Macron et Marine Le Pen multiplient les sorties médiatiques cyniques pour essayer de grappiller les voix nécessaires pour se faire élire. Dans un second tour qui s’annonce serré, les deux candidats se tournent du côté des électeurs de Mélenchon arrivé troisième avec 22 pour cent des voix.

Contre les deux candidats réactionnaires, le Parti de l’égalité socialiste (PES) appelle les travailleurs et les jeunes à rejeter à la fois le vote Macron et le vote Le Pen et de lutter pour un boycott par les travailleurs du second tour des présidentielles.

Elu largement contre Marine Le Pen en 2017 avec 66,1 pour cent des voix contre 33,9, Macron n’est plus sûr de se faire réélire. Contrairement aux dernières élections de 2017, la réserve de voix pour Macron n’est pas importante. Les partis traditionnels ayant gouverné durant la Ve République et qui ont appelé à voter Macron, les gaullistes et le PS, se sont effondrés avec respectivement 4,8 pour cent et 1,8 pour cent des votants. Même dans ces partis, le report des voix n’ira pas entièrement à Macron.

Marine Le Pen devrait bénéficier en plus des voix d’Éric Zemmour, qui a obtenu 7 pour cent au premier tour.

Dans les médias, on évoque la possibilité d’une victoire de Marine Le Pen envisageable tant fond l’écart entre les deux candidats au fur et à mesure que le second tour approche. Le 14 mars 2022, la moyenne des intentions de votes soulevés par les instituts de sondage pour Macron était donnée à 58 pour cent ; à un peu moins de deux semaines du second tour, Macron ne remporterait l’élection qu’avec seulement 51,9 pour cent des votes.

Un conseiller de Macron avant le premier tour craignait qu’un second tour Macron- Le Pen «va être un duel difficile car il n'y aura pas de front républicain ». Pour Bernard Sananès, le patron de l'institut de sondages Elabe, « Le front républicain avait déjà du plomb dans l'aile en 2017 mais il est désormais en état de mort clinique ».

D’après une étude Odoxa pour L’Obs, les Français qui voteront pour faire barrage à l’une ou l’autre sont désormais plus nombreux à vouloir s'opposer à Emmanuel Macron (19%) qu’à Marine Le Pen (18%).

La victoire de l’un ou l’autre des candidats dépendra de l’électorat de Jean Luc Mélenchon. Ce dernier a obtenu 22 pour cent des voix, surtout parmi les jeunes et les travailleurs qui s’opposent à la guerre et à l’austérité. Mélenchon a fini en tête à Marseille, où encore dans la métropole Ile-de-France, et a fini deuxième à Lyon, largement devant Le Pen et les écologistes qui détiennent la mairie de la ville.

Du côté des reports de voix, l'électorat de Jean-Luc Mélenchon, 39 pour cent des électeurs de l'Insoumis comptent voter pour Macron au deuxième tour, et 24 pour cent pour Le Pen. Les 37 pour cent restants prévoient de s'abstenir, de voter blanc ou nul.

Macron et Marine Le Pen ont bien compris et lancent leur campagne de l’entre-deux-tours en draguant l’électorat de Mélenchon. Macron qui prévoit une très impopulaire réforme des retraites reculant l’âge de départ à la retraite à 65 ans, tente cyniquement d’afficher une image plus à « l’écoute » comme l’affirme des membres du gouvernement. En marge d’un déplacement dans les Hauts-de-France, Macron a aussi dit qu’il « n’excluait pas un référendum sur quelque réforme que ce soit », y compris celle des retraites.

Macron compte travailler plus étroitement avec les syndicats : « Il y a un point d’horizon qui est de 65 ans en 2031 mais s’il n’y a pas d’accord là-dessus et que je sens que ça crispe trop, je suis prêt à avoir des clauses de revoyure. Je veux tout de suite en discuter avec les forces politiques et avec les forces syndicales ».

Macron va se rendre à Marseille qui a voté pour Mélenchon au premier tour. Il a rappelé ce mercredi matin sur France2 les propos de Marine Le Pen sur des journalistes de 'Quotidien' ainsi que sur la peine de mort. Il a critiqué « cette recette qui consiste à changer la Constitution à sa main sous prétexte de consulter le peuple, qui consiste à choisir les journalistes, qui consiste à nous dire le même jour 'moi revenir sur la peine de mort ? Je ne suis pas contre, sauf si évidemment on met les gens en prison toute la vie' ».

Mardi, Marine Le Pen a affirmé vouloir « revivifier » les institutions et le fonctionnement démocratique du pays, lors d'une conférence de presse à Vernon (Eure), en proposant une « révolution référendaire »: «Un référendum n'est pas dangereux, donner la parole au peuple n'est pas dangereux, ce qui est dangereux, c'est de ne pas lui donner».

Devant le journaliste elle a aussi critiqué la réforme des retraites de Macron et ses manœuvres pour grappiller les votes de gauche : « Il n’y a rien à attendre d’Emmanuel Macron dans ce domaine. En réalité la retraite à 65 ans c’est son obsession : il ne parle que de ça, il n’envisage que ça, et il a été fort marri lors du dernier quinquennat de ne pas pouvoir aller au bout de cette réforme. Tous les Français sont extrêmement intelligents, tous ont compris que c’est la manœuvre d’Emmanuel Macron pour tenter de récupérer, ou en tout cas d’atténuer, l’opposition des électeurs de gauche ».

Marine Le Pen a assuré, sur TF1, avoir « le projet le plus protecteur » et vanté la « cohérence globale de son programme ». Se rendant mercredi matin dans une cimenterie, elle a averti que la France est « confrontée à un mur de l'inflation qui arrive … Les prix augmentent, vont augmenter dans les semaines qui viennent. Il y a une forme de déni du gouvernement. La France de Macron c'est une France qui va s'arrêter ».

Les travailleurs et les jeunes ne peuvent rien attendre ni de Macron, ni de Marine Le Pen, quelles que soient les critiques de Macron sur la nature d’extrême droite de la politique de Le Pen ou encore les attaques de cette dernière contre la politique sociale de Macron.

Macron a poursuivi une politique violemment réactionnaire. Par décret, il a imposé la loi travail qui facilite les licenciements de masse et sabré les salaires des cheminots. Face à son impopularité, Macron a cultivé l’extrême-droite saluant le dictateur collaborationniste Philippe Pétain contre le mouvement des « gilets jaunes ». Son ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, un sympathisant de l’Action française d’extrême-droite, a fait une loi qui impose des obligations discriminatoires aux associations musulmanes. Darmanin a même traité Le Pen de « molle » contre l’Islam.

Sur la pandémie mondiale de Covid-19, il a fait la politique européenne de « vivre avec le virus » qui a fait 1,8 millions de morts en Europe.

A présent, Le Pen s’avance frauduleusement en tant que défenseur des acquis sociaux. Le Pen est toutefois une néofasciste implacable qui, élue, ferait une politique aussi sanglante que Macron, avec notamment des attaques drastiques contre les droits des immigrés. Sa politique, comme celle de Macron s’il était réélu, sera avant tout façonnée par la poussée de l’Otan vers une guerre avec la Russie, l’inflation, et les pertes effroyables causées par la pandémie.

L’appel du PES au boycott actif du second tour et à la mobilisation politique indépendante de la classe ouvrière constitue l’alternative à ces deux candidats réactionnaires. Il est inséparable de la mobilisation des travailleurs contre la guerre impérialiste, les politiques antiscientifiques sur la pandémie, et le pillage de la société par l’élite financière.

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