Le ministre de l’Éducation de l’Ontario demande de façon arrogante de la «stabilité» dans les salles de classe alors que les négociations contractuelles débutent

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Avant même que les négociations contractuelles ne débutent cette semaine pour plus de 250.000 travailleurs de l’éducation en Ontario, le ministre de l’Éducation Stephen Lecce a demandé de façon provocatrice de la «stabilité» pour la prochaine année scolaire. Cette tentative scandaleuse d’intimider les enseignants, les aides-enseignants et le personnel de soutien, venant d’un homme qui a supervisé les années les plus instables du système d’éducation de l’Ontario en plus d’un siècle, souligne que le premier ministre Doug Ford et son gouvernement progressiste-conservateur de droite ont l’intention d’imposer des contrats remplis de concessions aux travailleurs de l’éducation et ne toléreront aucune opposition.

Le ministre de l’Éducation Lecce et le premier ministre de l’Ontario Doug Ford (PressProgress)

Plus tôt ce mois-ci, Lecce a déclaré sans détour que les élèves devraient retourner à une «expérience d’apprentissage normale»lors de la prochaine année scolaire 2022-2023, comprenant entre autres «des activités parascolaires et des sports.»

Les travailleurs de l’éducation qui ont entendu ces remarques obtuses ont dû se frotter les yeux d’incrédulité. Avant même que la pandémie ne frappe en mars 2020, le gouvernement Ford a imposé des coupures dans le budget de l’éducation qui ont fait des classes surchargées, du manque de soutien à l’éducation spécialisée et des bâtiments scolaires délabrés l’«expérience d’apprentissage normale» de centaines de milliers d’élèves en Ontario. Venant s’ajouter à plus d’une décennie d’austérité brutale imposée par les gouvernements libéraux de l’Ontario soutenus par les syndicats, l’élimination par le gouvernement Ford de l’équivalent de 10.000 postes d’enseignants à temps plein, dans le cadre des réductions de dépenses qu’il a mises en œuvre au début de 2019, a poussé l’ensemble du système éducatif au bord de l’effondrement.

La pandémie de la COVID-19 qui évolue rapidement et s’intensifie actuellement est utilisée par l’élite capitaliste pour accélérer sa guerre contre la classe ouvrière en promouvant et en mettant en œuvre une politique propatronale d’«immunité collective» qui favorise l’infection de masse. Pour maintenir en activité les entreprises non essentielles et assurer un flux ininterrompu de profits capitalistes, le gouvernement Ford sacrifie les enfants, les parents et le personnel du secteur de l’éducation à l’infection.

Cette politique meurtrière d’infection de masse a complètement déstabilisé le système d’éducation en Ontario. Des centaines de travailleurs de l’éducation démissionnent ou prennent une retraite anticipée, des milliers d’autres sont handicapés par la COVID longue, et trop de travailleurs de l’éducation sont envoyés à une mort précoce.

L’insistance de Lecce sur la «stabilité» exprime les exigences de ses maîtres au sein de l’élite capitaliste. Ils insistent pour que les écoles restent ouvertes pour l’enseignement en classe, afin que les parents puissent être contraints d’aller travailler, même si cela signifie infecter des millions d’autres personnes avec la COVID et maintenant la variole du singe, qui se répand comme une traînée de poudre avec peu de surveillance. Ils soutiennent également les plans du gouvernement Ford visant à réduire davantage le financement par habitant de l’éducation publique, qui est déjà parmi les plus bas au Canada, afin de réduire davantage les impôts des entreprises et d’«équilibrer» le budget aux dépens des travailleurs.

La déclaration de «stabilité» de Lecce est également un avertissement sans subtilité que le gouvernement prendra les mesures nécessaires pour rendre illégale toute grève des enseignants, des aides-enseignants, du personnel d’entretien et de soutien administratif qui chercheraient à renverser des années de réductions salariales en termes réels, à se protéger de l’inflation galopante et à s’opposer au démantèlement de l’éducation publique.

Sa menace n’est pas dirigée contre les syndicats de l’enseignement. Ceux-ci se bousculent en effet pour s’asseoir à la «table des négociations» avec un ministre de l’éducation détesté et dont le parti n’a obtenu le soutien que de moins de 18 % de l’électorat totallors des élections provinciales du 2 juin. Sa sortie s’adresse plutôt aux travailleurs de l’éducation de la base, qui sont prêts à mener une véritable lutte pour obtenir des augmentations de salaire et une amélioration de leurs avantages sociaux, ainsi qu’un système d’éducation publique bien financé, mais qui sont enchaînés par les bureaucraties syndicales qui cherchent à empêcher toute action militante des travailleurs et toute contestation du programme d’austérité du gouvernement.

Admirateur de longue date du dictateur fasciste en herbe Donald Trump, Ford a récemment déclaré que les travailleurs de l’éducation obtiendraient certes une augmentation de salaire supérieure à 1%, tout en prévenant qu’elle ne sera pas «exceptionnellement élevée». Cela signifie que le contrat que le gouvernement va proposer et qu’il espère imposer aux travailleurs de l’éducation avec l’aide des syndicats sera loin de répondre à leurs demandes. L’inflation galope actuellement à un rythme annuel de 7,7 % et rien n’indique qu’elle va ralentir de sitôt. De plus, les travailleurs de l’éducation travaillent sous le plafond salarial de 1% par an imposé par le Projet de loi 124édicté depuis trois ans – une réduction des salaires réels que les syndicats ont volontairement appliquée.

Le gouvernement et ses alliés des médias de la grande entreprise tenteront de présenter leurs offres contractuelles comme une augmentation de salaire «généreuse» par rapport aux trois dernières années, mais dans le contexte d’une inflation galopante, cela équivaudra dans les faits à une réduction de salaire radicale.

Le gouvernement Ford peut se comporter de façon aussi agressive parce qu’il sait que les syndicats de l’éducation n’ont pas l’intention de se battre. Alors que les pourparlers débutent cette semaine avec quatre des cinq syndicats, aucun des bureaucrates du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), de la Fédération des enseignantes et des enseignants des écoles secondaires de l’Ontario (FEESO), de l’Association des enseignantes et des enseignants catholiques anglo-ontariens (OECTA) ou de Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO) n’a dit un seul mot au sujet d’un vote de grève, sans parler d’un véritable mouvement de grève. Et ce, malgré le fait que, selon un récent rapport de Global News, les dirigeants syndicaux «s’attendent à ce que les pourparlers se prolongent bien au-delà de l’expiration des contrats le 31 août». Selon les affirmations de Karen Littlewood, présidente de la FEESO, «Nous sommes loin d’un vote de grève. C’est tellement prématuré à l’heure actuelle».

Autrement dit, les travailleurs de l’éducation sont censés se croiser les bras et ne rien faire pendant que Ford et ses ministres de droite radicaux profèrent des menaces, lancent une campagne féroce contre les enseignants et le personnel de soutien – les accusant d’avoir l’intention de prendre les enfants en «otage» et de «perturber» leur éducation – et «négocient» en coulisse avec les syndicats un ensemble de réductions salariales en termes réels. Les travailleurs de l’éducation seront ensuite appelés à approuver ces accords de principe pourris lors de votes accompagnés d’une cacophonie de propagande sur les enseignants et le personnel de soutien égoïstes mettant en danger «l’expérience d’apprentissage normale» des élèves et les services de garde d’enfants pour les familles qui travaillent.

Les travailleurs de l’éducation ont déjà vu ce jeu auparavant. En 2019, alors que la colère grandissait dans toute la province à cause du programme d’austérité du gouvernement Ford, les syndicats ont retardé l’appel aux votes de grève jusqu’à l’expiration des contrats. Alors que 55.000 membres du personnel de soutien s’apprêtaient à débrayer au début d’octobre 2019 après un vote de grève écrasant, le SCFP a conclu un accord de dernière minuteavec Ford comprenant l’application du plafond salarial du Projet de loi 124, quand bien même cette loi n’était alors pas encore en vigueur. Les syndicats d’enseignants ont été contraints par la colère de leur base de déclencher une série de grèves régionales tournantes, soigneusement planifiées pour s’assurer qu’elles ne se produisent jamais le même jour ou à la même heure. Après des mois de pression de la part de leur base, les syndicats d’enseignants se sont finalement sentis obligés d’appeler 200.000 enseignants à une grève d’un jour en février 2020, ce qui a provoqué un enthousiasme général de la part du public. Choqués par cette vague de soutien populaire, les syndicats d’enseignants ont réagi en annulant toutes autres grèves à venir, avant de se servir de la pandémie comme d’une excuse pour faire appliquer l’accord salarial de 1% prévu dans les contrats de trahison. Ils ont ensuite dénoncé comme «illégale» toute action collective contre l’infection massive des travailleurs de l’éducation et des étudiants.

Si Ford et Lecce sont réellement préoccupés par la «stabilité» du système de l’éducation et par la garantie d’une expérience d’apprentissage complète pour tous, ils pourraient commencer par accorder au personnel de l’éducation une augmentation salariale immédiate de 20% afin d’inverser la baisse de salaire de 19% après inflation que les travailleurs de l’éducation ont subie depuis 2012. Ils pourraient ensuite indexer les augmentations salariales sur l’inflation au cours de la deuxième année du prochain contrat et au-delà. Ils pourraient immédiatement allouer les 14 milliards de dollars requis pour les réparations et les modernisations laissées en suspens dans les bâtiments scolaires de la province, compenser les 1,3 milliard de dollars qu’ils ont été éliminés du budget de l’éducation de 2021-2022 et prendre des dispositions pour couvrir les 12,3 milliards de dollars qui, selon les prévisions mêmes du Bureau de la responsabilité financière de l’Ontario, manqueront dans les dépenses en éducation d’ici 2030.

Les travailleurs de l’éducation savent tous très bien que Ford et Lecce ne feront rien de tout cela, car leur prétendue préoccupation pour l’éducation des enfants est une imposture. Ces mesures nécessaires et urgentes ne seront obtenues que dans la mesure où les enseignants, les aides-enseignants, les personnels d’entretien et de soutien s’unissent pour organiser une mobilisation de masse des travailleurs dans une lutte politique pour un système d’éducation publique solide avec des emplois sûrs et bien rémunérés pour tous les travailleurs, et le retour de mesures strictes en matière de santé publique pour arrêter la propagation de la COVID-19. Les travailleurs de l’éducation doivent mener une lutte indépendante pour obtenir ce qu’ils savent qu’ils méritent et dont ils ont besoin, non seulement en ce qui concerne les salaires, mais aussi pour fournir le type de système d’éducation nécessaire pour enseigner et élever les enfants afin de leur assurer une vie épanouie.

Tous les travailleurs de l’éducation en accord avec ces revendications doivent se joindre à la lutte pour mettre sur pied le Comité de base des travailleurs de l’éducation en Ontario. Contactez-nous au ontedrfc@gmail.compour participer à cette lutte.

(Article paru en anglais le 17 juillet 2022)

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