Alors qu'Israël prépare l'assaut sur Rafah, les États-Unis expriment des préoccupations humanitaires vides de sens

Alors que le régime israélien s'apprête à lancer une offensive barbare sur la ville de Rafah, dans le sud de Gaza, le secrétaire d'État américain Antony Blinken s'est entretenu hier pendant deux heures avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou. La seule objection de Blinken à l'attaque militaire était qu'Israël n'avait pas encore fourni de plan humanitaire.

Le secrétaire d'État américain Antony Blinken avec le ministre israélien de la Défense Yoav Gallant, à droite, au poste-frontière de Kerem Shalom, en Israël, le 1er mai 2024 [AP Photo/Evelyn Hockstein/Pool Photo]

« Nous ne pouvons pas, nous ne soutiendrons pas une opération militaire majeure à Rafah en l'absence d'un plan efficace pour nous assurer que les civils ne sont pas blessés et non, nous n'avons pas vu un tel plan », a déclaré Blinken aux journalistes après la réunion. Il a affirmé qu'il y avait d'autres façons de traiter avec le Hamas qui ne nécessitaient pas une opération militaire majeure à Rafah.

Quelle hypocrisie! L'impérialisme américain a politiquement soutenu, financé et armé l'assaut génocidaire d'Israël à Gaza qui, à ce jour, a coûté la vie à plus de 34 500 personnes, dont la majorité étaient des femmes et des enfants. Biden vient de signer une loi qui fournit 26 milliards de dollars supplémentaires d'aide à Israël, dont plus de la moitié sont de l’armement militaire.

Il est évident que toute opération israélienne, qu'elle soit «majeure» ou non, à Rafah, où plus d'un million de Palestiniens sont entassés, fera des milliers, voire des dizaines de milliers de victimes civiles supplémentaires. Le secrétaire général de l'ONU, António Guterres, a averti mardi qu'un assaut militaire sur Rafah « serait une escalade insupportable, tuant des milliers de civils supplémentaires et forçant des centaines de milliers à fuir ».

Les expressions purement verbales de préoccupation humanitaire de Blinken, comme l'implication de Washington dans des pourparlers prolongés en Égypte sur un cessez-le-feu, ne visent qu'à masquer le fait que les États-Unis sont le principal facilitateur des crimes monstrueux du régime sioniste.

À la suite de sa discussion avec Blinken, Netanyahou a réitéré ce qu'il avait déclaré mardi : que l'offensive israélienne sur Rafah se poursuivrait, qu'un accord soit conclu ou non avec le Hamas sur un échange de prisonniers. Son cabinet a déclaré que Netanyahou avait dit à Blinken qu'une opération à Rafah «ne dépendait de rien» et qu'il rejetait toute proposition de trêve qui mettrait fin à la guerre de Gaza.

Dans ses commentaires de mercredi, Blinken a fait la promotion des améliorations limitées apportées par Israël pour permettre l'accès de l'aide à Gaza, où les Palestiniens sont confrontés à des pénuries extrêmes de tous les produits de base – nourriture, eau et abris, ainsi que de médicaments et d'équipements médicaux. Après avoir noté que des camions d'aide en provenance de Jordanie avaient franchi le point de passage d'Erez pour la première fois, il a déclaré: «Les progrès sont donc réels, mais compte tenu des besoins... cela doit être maintenu ».

En réalité, il n'y a pas de répit dans la politique israélienne consistant à tuer les Palestiniens par la faim et la maladie aussi bien que par des opérations militaires. Une grande partie de Gaza, en particulier le nord dévasté de l'enclave, est sur le point d'être déclarée en état de famine par les agences de l'ONU, comme défini par de graves pénuries alimentaires, des niveaux aigus de malnutrition et des décès quotidiens dus à la famine.

Dans un commentaire publié hier sur Reliefweb, Mari Carmen Viñoles, responsable des programmes d'urgence de Médecins Sans Frontières (MSF), a fustigé l’affirmation israélienne qu’il n'y avait pas de limites à l'acheminement de l'aide humanitaire à Gaza. Elle a expliqué que les autorités israéliennes avaient refusé les demandes de MSF d'apporter à Gaza, où les principaux hôpitaux ont été dévastés, des équipements biomédicaux essentiels tels qu'un concentrateur d'oxygène. «Sans ce simple dispositif, nos équipes médicales à Gaza sont obligées de voir leurs patients mourir de causes entièrement évitables», a-t-elle déclaré.

Viñoles a déclaré que MSF avait fait une demande début novembre pour faire venir à Gaza des réfrigérateurs et des congélateurs essentiels au stockage des médicaments et des vaccins, qui n'ont été approuvés qu'en avril et ne sont pas encore arrivés«Nous attendons toujours l'autorisation d'apporter des générateurs, des bouteilles d'oxygène, des échographes, des défibrillateurs externes, des solutions intraveineuses de chlorure de sodium, essentielles pour réhydrater les patients et diluer les médicaments. La liste est aussi longue qu'alarmante», a-t-elle commenté.

Vingt-sept pour cent avaient été empêchés, 10 pour cent refusés et 8 pour cent ont annulés en raison de contraintes logistiques.

La dernière mise à jour du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) publiée mercredi a révélé que plus de 10 000 personnes étaient portées disparues sous les décombres à Gaza selon les estimations de la Défense civile palestinienne (PCD). «La PCD a ajouté qu'elle est confrontée à d'énormes défis pour récupérer les cadavres, comme le manque d'équipement, de machinerie lourde et de personnel, avertissant qu'il pourrait falloir jusqu'à trois ans pour récupérer les corps en utilisant les outils primitifs qu'elle a sous la main.»

Le fait que Gaza ait été transformé en une zone de guerre présentant de grands dangers pour la population est souligné par les estimations de l'ONU selon lesquelles il y aurait environ 7 500 tonnes de munitions non explosées (UXO) éparpillées dans toute la bande de Gaza. Une équipe d'évaluation de l'ONU qui s'est rendue à Khan Younis en avril, a signalé que les rues et les espaces publics étaient jonchés d'engins non explosés, avec « des bombes non explosées de 1 000 livres qui se trouvaient sur les principales intersections et à l'intérieur des écoles ».

Plus sinistre encore est un rapport publié lundi par le bureau des médias du gouvernement à Gaza selon lequel un adolescent de 14 ans a été grièvement blessé et a été amputé d'un membre après avoir ouvert une boîte de conserve piégée qu'il avait trouvée à l'intérieur de sa maison, qui avait été bombardée par les forces israéliennes. Le bureau des médias a noté que d'autres personnes avaient été blessées récemment par des conserves piégées.

Les opérations militaires israéliennes impliquant des chars et des frappes aériennes se poursuivent. Selon le ministère de la Santé de Gaza, 80 Palestiniens ont été tués et 118 blessés entre lundi après-midi et 11 heures mercredi. Depuis le 7 octobre, au moins 34 568 Palestiniens ont été tués à Gaza et 77 765 blessés.

Le chef de l'aide humanitaire de l'ONU, Martin Griffiths, a averti mardi qu'une opération terrestre israélienne à Rafah était «à l'horizon immédiat». Il a souligné que les améliorations apportées par Israël à l'accès de l'aide à Gaza «ne peuvent pas être utilisées pour préparer ou justifier une attaque militaire à grande échelle contre Rafah». Une attaque militaire sur Gaza ne serait «rien moins qu'une tragédie au-delà des mots», a-t-il dit.

Griffiths a déclaré qu'une opération terrestre porterait un coup désastreux aux «agences qui luttent pour fournir une aide humanitaire malgré les hostilités actives, les routes impraticables, les munitions non explosées, les pénuries de carburant, les retards aux points de contrôle et les restrictions israéliennes». Cela apporterait encore plus de traumatismes et de morts pour «les centaines de milliers de personnes qui ont fui vers le point le plus au sud de Gaza pour échapper à la maladie, à la famine, aux fosses communes et aux combats directs ».

(Article paru en anglais le 2 mai 2024)

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