Sir Kier Starmer du Parti travailliste, a été l’un des premiers dirigeants mondiaux à dénoncer le soulèvement courageux des Palestiniens contre l’occupation israélienne, le décrivant comme un « acte de terrorisme épouvantable ». Alors que les missiles pleuvent sur les Palestiniens assiégés de Gaza, tuant des centaines de civils non armés, Starmer a soutenu les délires fascistes des généraux sionistes annonçant qu’ils « détruiraient » les Palestiniens et « ouvriraient les portes de l’enfer », déclarant : « Israël a le droit de se défendre. »
Le soutien sans réserve de Starmer à la guerre d’Israël contre les Palestiniens a été exprimé à la veille de la conférence du Parti travailliste qui s’est ouverte dimanche à Liverpool. La conférence est organisée avec un objectif central : montrer que le parti est prêt à gouverner sur la base d’un programme de militarisme et de guerre de classe. Son soutien au bain de sang israélien sert de pierre de touche dans ces efforts.
S’exprimant lors d’un événement en marge de la conférence ce week-end, le secrétaire d’État fantôme aux Affaires étrangères, David Lammy, a fait écho aux déclarations de Starmer, déclarant que si un acte de « terrorisme » similaire avait lieu en Grande-Bretagne, « nous l’aborderions sur le pied de guerre ». Lisa Nandy, secrétaire d’État fantôme au Développement international, a déclaré que la Grande-Bretagne devrait revoir toute l’aide accordée aux Palestiniens après l’attaque de samedi.
La ministre des Finances fantôme Rachel Reeves a dénoncé le plaidoyer de l’ancien leader travailliste Jeremy Corbyn en faveur d’un « cessez-le-feu et d’une désescalade urgente » ainsi que son appel à la fin de l’occupation israélienne. Elle a déclaré à l’émission Today de Radio 4, « Gaza n’est pas occupée par Israël ». Lundi, elle a déclaré que Corbyn « ne serait absolument pas le bienvenu en tant que député ».
Le Comité exécutif national du Parti travailliste a préparé une motion à l’intention de la conférence autorisant l’expulsion de tout membre du parti qui appuierait Corbyn ou d’autres personnes désapprouvées par le Parti travailliste.
Starmer a profité de la conférence pour démontrer la tolérance zéro du Parti travailliste à l’égard de toute opposition aux crimes de l’État israélien, alors même que le gouvernement d’extrême droite de Netanyahu bafoue le droit international, en annonçant sa campagne militaire génocidaire et en imposant des punitions collectives aux civils. Samedi, le Parti travailliste a interdit les mots « mettre fin à l’apartheid » lors d’un événement en marge de la campagne de solidarité avec la Palestine lors de la conférence. Un porte-parole du parti a déclaré : « le Parti travailliste ne publiera pas de description d’Israël comme d’un État d’apartheid ». Le terme « apartheid » a été utilisé par Amnesty International et Human Rights Watch dans des rapports récents qui font date, démontrant les décennies de violence d’État d’Israël et « l’oppression inhumaine » du peuple palestinien (article en anglais).
Le soutien de Starmer à la guerre déclenchée par Israël contre les Palestiniens, y compris l’envoi par l’administration Biden du groupe aéronaval USS Gerald Ford et des escadrons d’avions de guerre F-35, F-15, F-16 et A-10 dans la région, est un élément essentiel d’une stratégie militaire mondiale soutenue jusqu’au bout par le cabinet fantôme travailliste.
Le 27 septembre, le journal pro-conservateur Telegraph a publié un article de Lammy et du secrétaire fantôme à la Défense du Labour, John Healey, sous le titre « La dissuasion nucléaire fait partie de l’héritage du Labour ».
Leur article a redoré le blason du Labour en tant que « parti de l’OTAN », assurant aux lecteurs du Telegraph – surtout les chefs de l’armée et de la défense britanniques – que sir Keir Starmer a exorcisé la position anti-guerre de Corbyn et que le Labour poursuivra inconditionnellement les intérêts vitaux de l’impérialisme britannique aux quatre coins du globe, de l’Europe à la mer de Chine méridionale.
Healey et Lammy ont écrit : « avec Keir Starmer, notre engagement envers l’OTAN et la dissuasion nucléaire du Royaume-Uni – maintenu pour le compte des alliés de l’OTAN – est inébranlable. »
Ils ont exposé les plans du Parti travailliste visant à renforcer massivement l’alliance de l’OTAN, à renforcer les capacités nucléaires britanniques et à se préparer à un conflit militaire direct avec la Russie et la Chine, engageant ainsi le futur gouvernement travailliste dans une voie militariste et expansionniste qui dégénère rapidement vers une Troisième Guerre mondiale.
Les deux hommes se sont vantés de leurs audiences privées dans les couloirs du pouvoir américain : « Notre visite conjointe à Washington DC la semaine dernière – pour des réunions à la Maison-Blanche, au Département d’État, au Pentagone et au Congrès – a renforcé la gravité et l’ampleur des défis que les travaillistes tentent d’hériter après l’élection. Le monde est devenu moins stable et plus dangereux depuis que nous étions ministres dans les gouvernements Blair et Brown. »
Quelles sont les implications de cette déclaration ? Healey et Lammy parlent en tant qu’hommes de référence pour le prochain gouvernement travailliste, successeurs désignés d’un gouvernement conservateur considéré à Washington comme ayant perdu toute influence. Les travaillistes se préparent à faciliter une confrontation militaire directe contre la Russie et à soutenir les plans américains de guerre contre la Chine, une politique affichée par Healey dans une série de discours belliqueux (article en anglais).
Le Parti travailliste est le parti de la guerre en Grande-Bretagne. Ses crimes sanglants incluent le soutien du parti au dépeçage impérialiste de pays suite à la Première Guerre mondiale et sa coalition avec les conservateurs pendant la Seconde Guerre mondiale, englobant la répression brutale de l’insurrection anti-impérialiste et antifasciste en Grèce et en Indochine. En 2003, au nom de l’impérialisme américain et britannique, le gouvernement travailliste de Blair a fabriqué des renseignements selon lesquels l’Irak possédait des « armes de destruction massive ». Leurs mensonges ont été utilisés pour pousser la Grande-Bretagne vers une invasion et une occupation illégale de l’Irak menées par les États-Unis, qui ont coûté la vie à plus d’un million de personnes.
Quels sont les défis « plus dangereux » que Lammy et Healey ont discuté avec les généraux du Pentagone ? Et quels engagements ont-ils pris au nom d’un futur gouvernement travailliste ? Les deux hommes restent silencieux. Mais leur première action dès leur retour – louanger le programme d’armes nucléaires britannique – indique quel était le sujet de leurs négociations, qui pose d’immenses dangers à la classe ouvrière.
Healey et Lammy sont arrivés aux États-Unis en pleine crise politique à Washington suite à l’échec de « l’offensive de printemps » de l’Ukraine, soutenue par l’OTAN. L’administration Biden cherche à faire avancer les plans d’une escalade majeure de la guerre contre la Russie, pouvant aller jusqu’à la mobilisation des troupes de l’OTAN. L’article du Telegraph de Healey et Lammy a été suivi quelques jours plus tard par l’interview du journal avec le secrétaire britannique à la Défense, intitulée : « Grant Shapps va envoyer des troupes britanniques en Ukraine » (Grant Shapps to send UK troops to Ukraine).
Shapps avait déclaré que la Grande-Bretagne déploierait des entraîneurs militaires en Ukraine et que la Royal Navy britannique doit se préparer à affronter les forces russes en mer Noire. Vendredi, le Parti de l’égalité socialiste (Royaume-Uni) a répondu par une déclaration : « Halte à l’envoi de troupes britanniques en Ukraine ! Mobilisez la classe ouvrière contre la guerre impérialiste ! »
Alors que le Premier ministre du Parti conservateur, Rishi Sunak, s’est joint à Shapps pour faire marche arrière sur l’annonce des troupes, les déclarations antérieures de l’équipe de défense fantôme du Labour et leurs discussions de haut niveau à Washington suggèrent que les plans d’escalade militaire sont bien avancés.
Le 23 septembre, le Telegraph a rapporté la visite du Labour à Washington avec le titre : « Labour : “Vous pouvez nous faire confiance en matière de défense. Nous sommes dévoués au rôle directeur de l’OTAN et des États-Unis” ». Il a déclaré sans ambages : « Deux décennies après l’Irak, les secrétaires fantômes des Affaires étrangères et de la Défense du parti font écho à Blair alors qu’ils montent une offensive de défense et de diplomatie. »
À la veille des élections générales britanniques attendues l’année prochaine, et alors que les travaillistes ont une avance de 20 points dans les sondages sur les conservateurs, le Telegraph a rapporté que le cabinet fantôme de Starmer « a accumulé des dizaines de milliers de kilomètres aériens en traversant l’Atlantique et les liens avec la Maison-Blanche de Biden se développent. »
Lammy et Healey étaient à Washington, a rapporté le Telegraph, « pour promouvoir une nouvelle et robuste politique étrangère et de défense travailliste », leur visite coïncidant avec l’audience de Vlodymyr Zelensky avec de hauts responsables américains « pour discuter d’une impasse au Congrès sur le soutien militaire américain à l’Ukraine. »
Ils se sont vantés du fait qu’en Grande-Bretagne, aucun conflit similaire n’existe à cause de la guerre par procuration de l’OTAN en Ukraine – les deux partis, conservateur et Labour sont tout autant engagés, l’un que l’autre, à poursuivre une confrontation militaire avec la Russie. Comme le dit le Telegraph, la guerre en Ukraine « a fourni au parti l’occasion d’enlever le vernis de méfiance à l’égard des questions de défense qu’il a acquis parmi les électeurs britanniques après la guerre en Irak et le leadership assiégé de Jeremy Corbyn ».
Ceci est une inversion grotesque de la réalité. Corbyn fut élu chef travailliste en septembre 2015 par plus de 250.000 membres du parti qui exigeaient la fin du programme d’austérité et de guerre des blairistes. Une campagne de déstabilisation s’ensuivit immédiatement, impliquant les agences militaires et de renseignement britanniques, américaines et israéliennes, visant à renverser la volonté démocratique de la population britannique. Des généraux anonymes ont menacé de faire mutinerie si Corbyn était élu Premier ministre, tandis que des soldats britanniques ont ensuite été filmés en train de tirer à balles réelles sur des photos de la tête de Corbyn.
Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a déclaré quelques mois seulement avant les élections générales de 2019 que les États-Unis « réagiraient » pour empêcher Corbyn de devenir Premier ministre.
Cette campagne de déstabilisation, menée par la droite travailliste, a été facilitée par la capitulation constante des partisans de Corbyn. Corbyn et le Groupe de campagne socialiste des députés travaillistes, dont John McDonnell et Diane Abbott, ont cédé aux principales revendications des blairistes : autoriser un vote libre sur le bombardement de la Syrie, maintenir le soutien à l’OTAN et aux sous-marins nucléaires Trident dans le programme travailliste, et être de connivence avec l’expulsion massive de membres du parti présentés comme antisémites pour leur défense de Corbyn et leur soutien aux Palestiniens contre l’oppression sioniste.
Healey et Lammy affichent clairement les résultats de cette sale conspiration d’État, déclarant qu’un nouveau gouvernement travailliste veillera à ce que la Grande-Bretagne joue un rôle de « première nation européenne » au sein de l’OTAN, « avec une mise à l’épreuve d’un “test OTAN” des forces armées dans le premier 100 jours du gouvernement de sir Keir. » Ils ont critiqué les conservateurs pour avoir « affaibli » les forces armées britanniques et se sont engagés à augmenter les dépenses militaires de plusieurs milliards de livres pour rivaliser avec l’Allemagne.
La planification de la défense des travaillistes va au-delà de la guerre actuelle en Ukraine. Ils préparent un nouveau partage impérialiste du globe. C’est pourquoi Lammy et Healey ont été « invités au Pentagone pour des réunions avec de hauts responsables, dont Michael Chase, le secrétaire adjoint à la Défense pour la Chine, Taiwan et la Mongolie » et c’est pourquoi l’équipe de défense travailliste décrit l’alliance militaire AUKUS contre la Chine comme « une opportunité unique ». Faut-il s’étonner que le Telegraph conclue : « Parmi les spécialistes politiques de l’establishment de la défense de Washington, il ne semble plus y avoir de préoccupation quant à l’engagement du Labour envers l’OTAN ».
(Article paru en anglais le 10 octobre 2023)